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Les techniques peuvent-elles nous rendre plus autonomes ?

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« O n imagine souvent que les techniques facilitent la vie humaine, qu'elles nous rendent moins dépendant d e notre environnement immédiat, en s o m m e p l u s libre pour nous-mêmes et moins astreint à d e s travaux de pure utilité ou de survie.

Or l'inverse se produit souvent, l'homme a certes gagné en autonomie par rapport à la nature et aux travaux utilitaires mais il s'est enchaîné aux techniques et aux machines qui produisent à sa place.

La dépendance de l'homme est passée aux outils techniques et aux machines.

Y- a- t- il encore une autonomie possible de l'homme face aux techniques modernes ou le condamne-t-elle à vivre que par elles ? 1) les techniques rendent l'homme plus autonome. Toute la technique ne se résume pas à la technique moderne, elle peut être aussi la simple fabrication d'outils, la création d'appareillage pour soulager l'homme d'efforts difficiles mais pourtant nécessaires.

A ce propos, La Physique d'Aristote dit : « La technè [...] parachève ce que la nature est dans l'impossibilité d'élaborer jusqu'au bout ». Mais si la technè effectue ce que la nature est dans l'impossibilité d'accomplir, c'est que cette chose était déjà portée par, donc elle est actualisation non naturelle d'un possible qui ne peut pas ne pas être naturel, par l'intermédiaire de cet agent particulier, l'homme, dont la physis propre contient précisément la virtualité d'actualiser le virtuel d e la physis en général. La technique peut être imitation de la nature, elle peut magnifier celle-ci par des ouvrages, elle peut la rendre accessible à l'homme, et simplement par le biais du travail, comme le pense Hegel, que l'homme s'approprie le monde qui l'entoure et le fasse sien afin de s'y reconnaître.

Dans l a Phénoménologie de l'Esprit, en particulier dans la dialectique du maître et de l'esclave, Hegel explique l'importance du travail et par là de la technique pour la fondation d e l'humanité de l'homme.

Désormais le valet est par le travail maître de la nature, et n'y est plus subordonné comme il l'était lors de son état animal.

Le travail est libération de soi vis-à-vis de la nature donnée, mais aussi vis-à-vis de sa propre nature d'esclave.

Le travail éduque l'homme en refrénant ses désirs, à la différence du maître qui jouit insatiablement de ce qu'il désire. C'est en transformant le m o n d e naturel selon s e s intentions q u e l 'h o mme prend conscience d e s a valeur, de sa réalité humaine initiatrice de progrès et de dynamisme dans le temps et dans l'espace, dans l'Histoire et dans le Monde.

L'activité du travail est aussi fonction d e libération d e la peur, d e l'angoisse que le valet a éprouvée depuis sa lutte avec le maître.

Le valet prendra conscience alors par le travail de sa liberté intérieure ou abstraite, car il ne vit pas en homme libre de façon effective.

Il n'est libre que par et pour sa p e n s é e , e n tant qu'entêtement, « liberté arrêtée à l'intérieure de la servitude.

» On ne devient véritablement humain, c'est-à-dire libre qu'après avoir exercé une activité transformatrice sur le monde, qu'une activité qui part extension peut être une technique.

Aussi les techniques rendent l'homme plus autonome car elles lui permettent de se libérer et de ne plus dépendre d'un maître. La libération par le travail est aussi autonomie, u n h o m m e qui travaille est un h o m m e autonome, il n'a pas besoin d'un autre pour survivre. 2) Les techniques ne rendent pas l'individu plus autonome, elle l'aliène. L'aliénation est un risque pour beaucoup de travaux humains soumis à la répétition, à la parcellisation.

L'aliénation est le contraire de la reconnaissance par le travailleur du produit de son travail comme étant le sien.

C'est le processus décrit par Hegel qui ne fonctionne plus. Le travail devient un but pour lui-même et non pour l'ouvrier.

Celui-ci n'est aliéné dans le produit que parce qu'il est aliéné dans l'activité du travail elle-même ; c'est lui-même que l'homme aliène, dans une activité qui appartient à un autre.

Finalement, le travail aliéné rend étranger à l'homme la nature, luim ê m e , l'autre homme, « la vie générique et la vie individuelle ».

Le travail rendu étranger, le travail aliéné, vient ainsi occuper la place dont Hegel faisait résulter d e la prise d e possession immédiate, devient le résultat, inconnu d e l'homme propriétaire, du travail aliéné, du travail devenu étranger.

En d'autres termes, le produit du travail devient étranger à l'homme qui l'a produit de par la division du travail de l'économie capitaliste.

L'homme rencontre le produit de son travail comme un être étranger, c o m m e une puissance indépendante d e lui-même en tant que producteur.

Cette promotion d e l'aliénation suppose q u e l'économie marchande elle-même couvre tous les rapports d e l'homme à l a nature, par la production et la consommation, et ceux de l'homme à l'homme, par la relation d'échange. L'aliénation vient d e l'oubli du rapport d e l' ho mm e à la nature, d e son recouvrement par des lois d'échanges qui n'ont rien d e naturel.

L'homme n'est plus possesseur d e s o n essence, le m o d e d e production capitaliste va contre la nature de l'homme.

Aussi, Marx et ses disciples tenteront de redonner au travail une dimension plus humaine par le biais du communisme.

Il tente en vérité de rapprocher l'homme du produit de son travail, et de revenir à une vraie reconnaissance du travail de l'ouvrier dans son objet.

Dans ce cadre, l'activité technique est ce qui a engendré l'aliénation, la division du travail, la parcellisation engendrée par la mécanisation et l'automatisation. 3) l'aliénation moderne. L'aliénation n'est plus réductible aux structures économiques ; plus profondément, elle porte sur le langage, sur la communication interhumaine.

L'homme est asservi à ses outils de communication : Internet, téléphonie mobile.

Il doit reformater son discours pour l'adapter à l'objet d e communication, et il ne peut plus procéder autrement.

Par la technique d e communication, l'homme est provoqué à découvrir et créer plus radicalement son existence sociale.

De plus, la valeur de l'espace et du temps ont changé quand la commande à distance annule l'éloignement et quand l'origine et l'ultime sont l'un dans l'autre.

Cela ne va pas évidemment sans que l'homme soit modifié.

La technique informationnelle qui implique communications, échanges et langage, manifeste encore plus clairement que tout autre technique combien ce phénomène est lié à l'existence sociale et à la pensée.

Mais la pensée n'est « humaine » que si elle est créatrice et non pas asservie ou répétitive, que si elle est poétique L'homme ne vit pas seulement de pain, une société technocratique peut devenir étouffante, mais aussi libérer des énergies pour l'art.

Le progrès technique peut engendrer du positif et libérer véritablement l'homme. Conclusion. Les techniques ne nous rendent autonomes si elles ne servent pas à des buts qui les dépassent.

L'aliénation, c'est la perte du sens de ce à quoi sert une technique, du bien-être, et de la libération qu'elle peut apporter.

L'un des buts du communisme a été de sortir de cette aliénation pour redonner au travail sa valeur et son but.

Mais peut-on réellement sortir de ce système dans un m o n d e d o m i n é par la technique ? C e que l'on a g a g n é en pénibilité, on l'a perdu en liberté.

Mais l'autonomie n'est-elle p a s avant tout du domaine d e la moralité et non de la technique.

Kant a clairement montré dans Qu'est-ce que les Lumières ? , que l'autonomie n'est en rien réductible à de simple progrès techniques, mais qu'il devait être accompli par une conversion morale.. »

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