Les sciences progressent-elles vers la vérité ?
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«
Introduction
S'il est un progrès qui paraît peu contestable (si la notion de progrès a un sens sérieux), c'est bien dans
l'accumulation des savoirs scientifiques à quoi aboutit le développement des sciences modernes.
Cela signifie-t-il
que ces dernières s'avancent vers la vérité, c'est-à-dire vers une vérité qui pourrait être considérée comme absolue
ou définitive? Ne vaut-il pas mieux penser que la vérité scientifique elle-même est en fait à toujours réélaborer?
1.
Connaissance, réalité et vérité
— Rappeler que tous les problèmes rencontrés par la philosophie classique à propos de la vérité viennent d'une
confusion entre cette dernière et la réalité.
— Tant que l'on a admis (de Platon jusqu'au criticisme kantien) que la connaissance avait pour but de coïncider
avec la réalité (quelle que soit la conception de cette coïncidence, notamment sous l'aspect de la copie), on s'est
heurté à des difficultés insurmontables.
— A l'inverse, la distinction opérée depuis Kant entre vérité et réalité, distinction admise par les scientifiques euxmêmes (cf.
Einstein) permet définitivement de mieux situer les ambitions de la connaissance scientifique : elle a pour
tâche de constituer des vérités à partir des informations que nous pouvons recueillir sur les phénomènes.
Ce qui a
pour conséquence que la vérité ne doit plus être considérée comme capable d'atteindre l'absolu (la métaphysique
relève de la pensée, non de la connaissance).
II.
La vérité scientifique
Si l'on admet que les sciences progressent vers la vérité, cela sous-entend:
• que leur addition serait capable de composer une vérité homogène;
• que cette dernière offrirait la possibilité d'atteindre un état stable et
définitif du savoir (sans que l'on sache forcément quand);
• que les sciences connaîtraient ainsi une «fin» — lorsque la vérité globale serait atteinte.
On constate au contraire:
• que l'évolution des sciences modernes contredit le principe de leur totalisation dans un savoir unifié: les champs
scientifiques divergent en cours de développement et de spécialisation de plus en plus prononcée, au lieu de
converger;
• que l'hypothèse d'un état définitif du savoir se substitue simplement au concept de «réalité» et fait naître les
mêmes difficultés;
• que l'histoire des sciences s'annonce interminable — ne serait-ce que dans la mesure où la mise au point d'une
nouvelle vérité scientifique locale équivaut à la découverte d'un grand nombre d'ignorances jusqu'alors
insoupçonnées..
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