Les sciences humaine sont-elles véritablement des sciences?
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L'interrogation sur les sciences humaines est susceptible d'emprunter deux directions : d'une part, les
sciences humaines seraient véritablement scientifique en vertu de leur méthode ; d'autre part, en vertu de leur
objet.
Ainsi, il s'agit d'abord de déterminer s'il y a unité de méthode entre les sciences humaines et les sciences de
la nature : en d'autres termes, une pratique scientifique uniforme permet-elle de dépasser l'antinomie entre l'homme
(l'esprit) et la nature ? En retour, c'est l'objet des sciences humaines (homme ou esprit) qui se doit de questionner
les prétentions des diverses sciences à la scientificité elle-même.
En effet, nous nous demanderons si l'on peut-on se contenter de réduire les phénomènes sociaux à des faits
naturels (Durkheim) ou bien si l'on peut-on simplement importer un modèle d'explication naturelle à l'objet singulier
qu'est l'homme (Dilthey) ? Enfin, nous verrons si nous ne pouvons pas profiter de ce débat pour remettre en cause
la scientificité elle-même ?
I – La sociologie comme science de la nature : Durkheim
Le problème de la scientificité des sciences humaines pousse à les rapprocher des sciences de la nature.
C'est en ce sens que Durkheim propose, pour la sociologie, de traiter les phénomènes sociaux comme des choses ;
autrement dit, il s'agit de considérer que le principe de causalité qui s'applique uniformément au sein de la nature,
dans les mondes physico-chimique et biologique, puisse s'appliquer au monde social.
L'argument se fonde donc sur une unité de méthode entre toutes les sciences.
Quel que soit leur objet
spécifique, la nature ou l'humain (l'esprit), leur pratique demeure guidée par les mêmes exigences.
Il s'agit bien de ne
pas faire de métaphysique, c'est-à-dire de ne pas entreprendre de savoir ce que sont les choses en elles-mêmes (la
nature est-elle différente de l'esprit ? Celui-ci est-il libre alors que la nature est déterminée ?), mais de raisonner en
scientifique positiviste, c'est-à-dire en appliquant les mêmes règles, les mêmes schémas d'explication naturelle aux
phénomènes naturels comme aux phénomènes sociaux.
Si l'on parle, en ces conditions, de sciences humaines, il s'agit alors de mettre l'accent sur la scientificité de
ce type de sciences.
L'humain n'est pas considéré comme un objet particulier ou privilégié ; on se contente de
remarquer l'unité de méthode des sciences, malgré la disparité de leurs objets.
II – Dilthey et la fondation des sciences de l'esprit
À mi-chemin d'une séparation nette entre sciences de l'esprit et sciences de la nature et d'une
réunification de ces deux approches, le philosophe allemand Dilthey propose une théorie herméneutique fondée sur la
dialectique entre compréhension et interprétation.
Qu'est-ce que cela signifie ?
Dilthey formule le souhait de pouvoir saisir les formes majeures de l'existence humaine dans leur singularité.
Il s'agit d'arriver à comprendre une vie psychique étrangère (par exemple, une culture ou une civilisation ancienne)
dans ce qu'elle présente d'original et de singulier.
Cependant, afin de ne pas tomber dans la psychologie et, en un
sens, le relatif (comment savoir ce qu'on réellement pensé et éprouvé des individus appartenant à d'autres
civilisations ?), Dilthey recours à l'interprétation.
DILTHEY: «...Nous expliquons la nature, nous comprenons la vie psychique.»
La démarche propre aux sciences humaines repose sur la compréhension, non sur l'explication.
«Dans les sciences de l'esprit [...] l'ensemble de la vie psychique constitue partout une donnée primitive et
fondamentale.
Nous expliquons la nature, nous comprenons la vie psychique.» Dilthey, Idées concernant une
psychologie descriptive et analytique (1894).
• Dilthey, avec la distinction entre «expliquer» et «comprendre», essaie de penser une distinction entre: les
sciences de la nature (qui tâchent d'écarter le flou interprétatif), et les sciences de l'esprit (qui admettent leur
caractère interprétatif propre, sans perdre pour autant leur statut de science).
Contrairement aux ambitions du xviie
siècle, les sciences de l'esprit (qu'on appellera plus tard les «sciences humaines») doivent s'affranchir du modèle
géométrique pour constituer leur scientificité propre.
Tandis que la compréhension cherche à ressaisir un psychisme étranger, l'interprétation en cherche la trace
objective et scientifique.
Il s'agit de trouver les signes objectivés de psychismes singuliers : il s'agira des œuvres
écrites, des monuments ou vestiges, de l'art, etc.
La compréhension devient alors scientifique, puisqu'elle s'applique
à des signes tangibles.
L'expression « sciences humaines » (ou de l'esprit) confère alors une égale dignité aux deux
termes : il s'agit de comprendre l'humain (un psychisme étranger), mais de manière valide, c'est-à-dire scientifique.
II – Par-delà nature et esprit avec Husserl.
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