Les passions peuvent-elles nous donner le bonheur ?
Extrait du document
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Discussion :
La notion de bonheur a une histoire récente ; elle remonte au XVIIIè siècle et a surtout trouvé sa plus forte expression avec la
révolution française.
En ce sens elle est la conséquence d'une évolution socio-économique qui permet à un nombre de gens de plus en
plus grand de prétendre jouir de l'existence.
Même l'on peut dire que le XXè siècle a jeté un profond discrédit sur les valeurs qui
avaient marqué les siècles antérieurs : répétition, habitude, assiduité...
tout cela apparaît rébarbatif et désuet.
L'idée de passion
semble donc l'expression juste de l'excitation que veulent vivre les hommes dès lors qu'ils souhaitent donner à leur existence une
réelle intensité.
Suggestion de plan :
I.
La passion et la déraison
Il semblerait que le mot lui-même, passion, serait un mot suspect si l'on considère ses origines.
Il vient du grec pathos qui signifie le
fait d'être affecté (moralement ou physiquement), mais aussi la souffrance, et les sentiments.
Le pathos du mot, passion, s'opposerait
donc au logos qui, lui, désignerait la raison.
Toute théorie des passions tendrait donc à montrer que les affections qui frappent l'homme
sont connotées négativement.
Or on sait depuis les Grecs que l'âme qui se trouve dans la raison, pour philosopher, doit être exempte
de toute passion.
Elle doit être affectée d'un pouvoir rationnel.
C'est dans le but de mener sa philosophie à bien que Platon voulait chasser les poètes de la cité.
Parce que si ce dernier flatte l'âme il
introduit le pathos, le sentiment, et par conséquent il trouble l'âme dans sa recherche de la vérité.
Dès lors on voit que le bonheur ne
peut pas se trouver en accord avec le passionnel, car si la passion c'est l'irrationnel alors elle ne peut pas conduire au bonheur.
De
plus le bonheur est considéré comme la tranquillité de la raison, une sorte d'harmonie et de juste équilibre entre les désirs du corps et
les désirs de l'âme.
Dans la tradition classique, comme pour Descartes, les passions ne viennent pas de l'âme mais du corps.
C'est ce qui expliquerait leur
caractère irrationnel.
L'âme seule ne peut pas dominer la volonté du corps.
Descartes, Les passions de l'âme: « Or, c'est par le succès
de ces combats que chacun peut connaître la force ou la faiblesse de son âme.
Car ceux en qui naturellement la volonté peut le plus
aisément vaincre les passions et arrêter les mouvements du corps qui les accompagne ont sans doute les âmes les plus fortes.
».
Ainsi pour Descartes le bonheur serait d'empêcher les passions qui viennent du corps d'arriver à atteindre l'âme.
Il faut donc purger le
corps de ses passions.
Car c'est parce que le corps est parcouru par des passions que l'homme ne peut pas être heureux.
Descartes, Lettres à Elisabeth : « Il n'y a point d'âme qui puisse acquérir un pouvoir absolu sur ses passions »
II.
Vertus de la passion
Mais cependant l'opposition pathos/logos telle que la tradition l'a conçue, pourrait être de nouveau examinée, pour montrer comment la
raison elle-même peut avoir besoin de la passion.
Elle nécessiterait le besoin d'être stimulée par une certaine tension venant du désir.
C'est ainsi qu'Hegel traitait les passions.
Puisque pour lui la passion est une puissance qui permet à l'homme d'atteindre une certaine
fin.
Si l'homme n'avait pas de passions les buts simplement rationnels auraient manqué de force et d'énergie.
Hegel : « La passion est
la puissance de l'homme qui tend vers son objet ».
Ainsi la passion devient un aiguillon, un adjuvant de la raison, car elle est conçue
comme une puissance.
Dans cet esprit-là, il ne peut y avoir de bonheur sans la motivation apportée par la passion.
Le bonheur est une
entité qui ne peut être réalisée que si le couple passion- raison est lui même en excès sur lui même.
III.
Passion et bonheur conciliables
Si le couple passion-raison, ouvre à la dimension d'un excès et que le dépassement de soi est une forme de bonheur cela signifie qu'il
y a dans l'homme une dimension qu'il ne maîtrise pas tout à fait.
L'homme n'est donc pas uniquement une entité de raison.
Nietzsche
pense à la passion comme étant une force, venant d'ailleurs que de la pensée, mais sans connotation négative.
De la même manière
que dans la pensée il n'y a pas un je qui pense mais plutôt un ça, la pensée du bonheur n'est pas toujours une pensée qui vient du je
rationnel.
L'absence de passion signifie le règne de la platitude et de la monotonie.
Si la passion est risquée en ce sens qu'elle pousse en quelque
sorte l'individu hors de lui-même, elle est aussi une intensité donnée au cours des jours.
Elle n'est pas nécessairement synonyme de
bonheur et même son étymologie de « patior » veut indiquer le contraire, mais elle a la puissance dont les hommes ont besoin pour
éprouver avec plus de vivacité leur être.
Conclusion :
Le sujet était construit autour du verbe « pouvoir » donc on peut y répondre avec netteté : oui, les passions permettent parfois le
bonheur, y contribuent, même si elles sont vécues souvent dans le danger et le risque.
Elles ne sont pas la condition absolue de ce
bonheur, mais elles ont le pouvoir d'attiser les sens, les forces physiques et spirituelles..
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