LES IDÉES MÈNENT-ELLES LE MONDE ?
Extrait du document
«
Problématique:
Les hommes construisent leur présent en fonction de projets d'avenir.
Mais ce sont le plus souvent des intérêts
matériels qui déterminent l'action.
Cependant, la prise de conscience peut amener la réalisation de projets plus
ambitieux ou plus généreux.
Introduction
L'idée fait référence à l'action de l'esprit qui conçoit un objet quelconque, qui se l'approprie sous une nouvelle
forme (ainsi en grec, puis en latin, idea veut dire « forme ») : avec les idées, l'esprit se représente la réalité, sur un
mode qu'il convient de distinguer et de la pure imagination et de la perception.
L'idée est donc un objet de pensée
en tant qu'il est pensé.
Elle n'est pas la chose sensible elle-même, pas non plus une pure image, ni une pure
impression de type affectif.
L'idée que j'ai d'un chien me le représente susceptible d'aboyer ; mais l'idée, elle, n'aboie
pas.
L'idée est ainsi par nature abstraite, puisqu'elle provient de l'observation du concret.
Et l'intérêt d'une idée
abstraite, c'est de pouvoir être réinjectée dans le concret : c'est donc au contraire le concret qui a besoin des
idées pour être pourvu de sens.
Peut-on alors penser que les idées puissent se suffire à elles-mêmes, ou nécessitet-elle une interface (l'homme) pour établir une compréhension du monde ? Aussi, les idées en l'homme peuvent-elles
le dépasser au point qu'il n'a pas conscience d'être subordonné à elles ?
I.
L'autonomie des idées
a.
La théorie platonicienne des idées a été élaborée pour combattre le relativisme des sophistes.
Pour ces
derniers, rien n'est absolument vrai ; les hommes n'ont que des croyances, plus ou moins acceptables selon le degré
d'adhésion commune qu'elles provoquent.
Aussi l'instrument privilégié des sophistes est la rhétorique, qui s'efforce
non de dire ce qui est vrai, mais de persuader les hommes de certaines valeurs utiles à la Cité.
Platon rétorque à
cela par un véritable retournement ontologique : ainsi, les choses ne sont pas dites belles en vertu d'un jugement
relatif à chacun, mais les hommes les déclarent belles parce qu'ils parviennent à les rapporter à une idée absolue,
éternelle et immuable, commune à toutes les âmes éclairées.
Dès lors, l'idée existe en soi, indépendamment de la
connaissance que les hommes en ont.
Ce n'est qu'à cette condition que les notions de vérité et de jugement vrai
prennent sens.
b.
Dans un esprit différent, Descartes et les cartésiens admettent
également l'indépendance ontologique des idées vraies, considérées comme
l'œuvre de l'être absolu, Dieu.
Ce sont ainsi les idées innées, claires et
distinctes, considérées comme des « semences de vérité » mises par Dieu en
mon esprit, qui me permettent de connaître la nature avec certitude, sans
passer par l'entremise des sens.
Le pur raisonnement rigoureux, conduit à
partir d'idées claires et distinctes, est le seul moyen de construire une
science certaine du réel.
Contrairement à ce qu'admet le sens commun, la
connaissance même du monde des corps ne se constitue pas en enregistrant
passivement leurs qualités sensibles, diverses et changeantes, mais en les
réduisant à des idées essentielles par une simple « inspection de l'esprit »,
c'est-à-dire en les concevant sans recours à la sensation, ni à l'imagination
(cf.
analyse du morceau de cire dans la deuxième méditation des Méditations
métaphysiques).
II.
Empirisme et criticisme
a.
Contre l'affirmation d'une autonomie des idées s'élèvent les nominalistes et les empiristes.
Pour les premiers
(Hobbes, Condillac, Stuart Mill), les idées n'existent pas.
Il n'y a que des noms par lesquels le langage humain
ressaisit des qualités communes appréhendées dans les choses.
Pour les empiristes (comme Hume), l'idée n'est
d'abord qu'une copie affaiblie des impressions sensibles, image que le contact avec la réalité imprime dans l'esprit.
Ainsi, affirmer, comme le font les empiristes, que l'idée ne prend naissance en dernier ressort que dans l'expérience
sensible, c'est réduire la connaissance à des inductions.
Hume admet tout à fait l'existence d'idées issues d'une
déduction de l'esprit, mais les relations d'idées à quoi on peut réduire la logique ne nous apprennent rien sur la
réalité.
La connaissance du réel suppose que l'esprit enregistre des relations de faits ne devant rien à la logique.
L'idée de causalité, par exemple, est l'effet d'une répétition constatée dans l'expérience : « le soleil ne se lèvera pas
demain », cela n'est pas logiquement plus contradictoire que l'inverse.
Les idées mises en œuvre dans les sciences
des faits débouchent donc sur des connaissances hautement probables, nullement sur des certitudes absolues (cf.
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