Les hommes sont-ils frères ?
Extrait du document
«
Analyse du sujet
●
Ce sujet peut être déroutant, par l'aspect bien peu philosophique du terme de « frère », et par
l'évidence simultanée des réponses possibles à la question.
En cela, il recouvre un piège, il propose une
mauvaise tentation au candidat : celle de ne pas chercher le problème d'où surgit la question.
Un sujet de
dissertation, en effet, n'est tel que s'il est sous-tendu par un problème philosophique, qu'il faut expliciter,
qu'il faut ensuite articuler au sujet lui-même, pour y enfin répondre, dans la structure ainsi mise au clair.
En
d'autres termes, on ne répond pas immédiatement à un sujet de dissertation philosophique; on l'articule tout
d'abord à un problème plus profond, ce qui permet d'avoir ensuite un cadre pour réfléchir, argumenter et
conclure.
Lorsque la question du sujet rassemble plusieurs concepts, la problématisation est beaucoup plus
simple : le rapprochement de concepts suffit souvent à articuler un problème.
La difficulté de notre sujet
réside dans le fait qu'un seul concept est interrogé, celui d'homme, et qu'il est rapproché de ce qui ne semble
pouvoir être qu'une image, le terme de frère.
Au sens littéral, nous ne sommes évidemment pas tous frères.
Le premier pas à faire pour articuler le problème consiste donc à étaler les différents sens possibles que l'on
peut donner à cette image dans le contexte de la question.
La seconde étape sera la recherche de l'unité
synthétique des différents sens découverts.
●
Une remarque sur la grammaire du sujet.
Une question du type « A est-il B? » interroge en principe
l'identité entre A et B.
En d'autres termes, elle demande si la proposition « A=B » est vraie.
Comprendre ainsi
la question n'aurait pas de sens immédiat : un homme n'est pas un frère.
On pourra éventuellement tâcher
de le montrer, mais on ne peut le faire qu'en élaborant un concept d'homme issu de la résolution de la
question la plus immédiate elle-même.
La forme plurielle nous pousse donc à l'expliciter ainsi : tous les
hommes sont-ils unis l'un à l'autre, et de par leur humanité, par un même lien? Peut-on dire que ce lien est
une fraternité?
Dégagement de la problématique
●
Notre première tâche consiste à déployer les différents sens possibles du terme de frère dans la formule
du sujet.
Au sens littéral, son frère deux hommes générés par les mêmes parents, éventuellement par un
même père ou mère.
Par extension, on peut donc voir en deux frères deux hommes unis par une même origine
constituante.
En ce sens, la tradition chrétienne affirme que tous les hommes sont frères comme fils de Dieu,
et, dans un sens plus réduit, la tradition biblique que nous sommes tous frères en Adam.
(Remarquons que
Michel Serres fait de la fraternité scientifique des hommes, dont témoigne l'évolution, la base de sa
philosophie.)
Dans le même sens, nous pouvons interpréter la fraternité comme une appartenance commune, au sens le
plus large.
On trouvera ainsi des frères dans une cause, dans une identité, dans une passion, dans une
culture, etc.
Ici s'ouvre déjà la question du fait et du droit, de l'effectivité et la puissance.
En effet, au sens
de la culture, de la langue, de la vision du monde, des pratiques, etc.
les hommes ont tous des frères mais
ne le sont pas tous entre eux.
Une question serait de savoir s'ils le pourraient de par leur nature; non pas,
évidemment, au sens où la culture serait inscrite dans les gènes, mais dans le sens d'un possible changement
après coup.
La fraternité nomme enfin tout ce qui est de l'ordre de la proximité, affective par exemple, de la similitude, de
caractère, de statut, de position dans la hiérarchie, etc.
●
Il nous faut à présent trier et ordonner ces sens afin de les articuler à un problème.
L'autre pôle de
l'articulation sera la notion d'homme.
Les différents sens possibles de la fraternité que nous avons exposés ne
considèrent en effet pas l'homme sous le même angle : l'homme en tant qu'il est généré, en tant qu'il est
historique et culturel, en tant qu'il a des appartenances, des affections, des caractères, des propriétés, etc.
Parmi les différents sens de la fraternité, nous pouvons les regrouper en deux catégories : d'une part la
nature, d'autre part la valeur.
En effet, les sens les plus évidents de la fraternité trouvent tous, en l'homme,
une fondation dans l'idée de nature : celle de créature, celle d'homo sapiens sapiens, etc.
Les sens les plus
métaphoriques, en revanche, renvoient tous à une valeur sous-jacente, engagent à prendre en compte des
impératifs dans nos actions touchant les autres hommes.
Et nous touchons ici l'enjeu du sujet : il est évident
qu'en un sens, qu'en plusieurs sens même, on peut affirmer avec certitude que les hommes sont frères; mais
que gagne-t-on le dire? A quoi cette affirmation nous engage-t-elle? Le problème est donc celui d'une
articulation entre les notions de nature et de valeur.
Y a-t-il une nature qui, par elle-même, vaille? Où se
fonderait alors cette valeur? Et, plus précisément encore : une communauté de nature peut-elle être une
valeur? En d'autres termes, un simple fait de nature (tel homme et moi-même partageons l'humanité) peut-il
être le fondement légitime d'une quelconque valeur?
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La tâche que nous donne le sujet est donc double.
Tout d'abord, déterminer en quels sens les hommes
sont frères.
Pour cela, il faudra utiliser l'idée de nature : la fraternité des hommes se réduit-elle à leur
nature? Y a-t-il, au-delà de la simple nature, une similitude, une proximité, ou une communauté de condition,
qui mériteraient que l'on parle de fraternité.
En second lieu, il nous faudra déterminer, parmi ces sens, et en
fonction de leur hiérarchie, lesquels peuvent être le lieu de la fondation de valeurs et, dans ce cas, de
quelles valeurs..
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