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Les doctrines politiques: L'anarchisme, la démocratie, la crise du libéralisme démocratique, l'absolutisme ?

Extrait du document

« L'individu n'appartient pas seulement à une famille, il est aussi membre d'un État, d'une Nation, d'une Patrie.

Ces trois termes ne sont d'ailleurs pas à confondre.

L'État désigne une « communauté juridique », c'est-à-dire un ensemble d'individus soumis à une même législation, à une même autorité politique.

Plus précisément d'ailleurs, l'État désigne cette autorité politique elle-même.

L'état c'est le gouvernement et l'ensemble des structures par lesquelles il manifeste son autorité.

La nation apparaît plutôt comme une communauté naturelle, du moins comme une communauté résultant de l'Histoire, reconnue par chacun de ses membres.

Au temps où la Pologne était «partagée», divisée en tronçons respectivement soumis à l'autorité de l'État russe, de l'État autrichien, de l'État prussien, les habitants du pays ne s'en reconnaissaient pas moins membres de la nation polonaise.

L'État autrichien des Habsbourg groupait sous son autorité plusieurs nations.

Lorsque, d'autre part, les membres de la communauté nationale ne reconnaissent pas leurs propres exigences dans les décisions de leur gouvernement, on dit que la nation ne se reconnaît plus dans l'État.

L'agitation révolutionnaire par exemple manifeste un conflit entre la nation et l'État. Entre l'idée de Nation et l'idée de Patrie, en revanche, la distinction est plus subtile.

La patrie est le «nom sentimental de la nation».

L'idée de patrie désigne une «communauté affective ».

La patrie c'est au fond la nation elle-même en tant qu'elle est objet d'attachement, de vénération, de la part des individus. Sur ce problème nous pouvons schématiser les différentes thèses possibles en distinguant l'absolutisme, l'anarchisme et la démocratie. a) L'absolutisme Nous entendrons par là le système d'après lequel l'État a un pouvoir absolu.

L'individu n'a pas de valeur en lui-même, il est réduit à l'obéissance.

L'autorité de l'État dans cette perspective ne saurait émaner des individus eux-mêmes, mais a une origine transcendante.

Ou bien le souverain est Dieu lui-même (théocratie) comme le Pharaon égyptien qui est l'incarnation terrestre du Dieu Horus, comme l'Empereur romain divinisé.

Ou bien le souverain est le représentant de Dieu sur la terre.

C'est dans une certaine mesure le cas des rois et des empereurs chrétiens de l'ancienne Europe.

Sans doute le roi n'est-il le maître que des affaires temporelles, l'Église présidant au domaine spirituel.

Même, selon certains papes, le roi ne tient qu'indirectement de Dieu son pouvoir temporel, par l'intermédiaire des papes.

Toujours est-il que le Pouvoir n'émane pas des individus, n'est pas responsable devant les sujets.

D'après Bossuet, l'État n'a pas à rendre des comptes aux hommes.

Le roi, «oint du Seigneur», n'est responsable que devant Dieu, et «il ne reste aux particuliers aucun droit contre la puissance publique».

La politique de Bossuet doit d'ailleurs s'interpréter dans le cadre de sa théologie.

Si les sujets doivent au souverain une obéissance inconditionnelle, c'est parce que l'homme à cause du péché originel est radicalement mauvais.

Livrés à eux-mêmes, dans un état de «liberté farouche et sauvage où chacun peut tout prétendre et en même temps tout contester, les hommes s'entre-déchireraient au gré de leurs passions désordonnées.» Seul le souverain toutpuissant, responsable devant Dieu, peut leur assurer l'ordre et la paix. b) L'anarchisme Les anarchistes (les Russes Bakounine et Kropotkine, en France Élisée Reclus et Jean Grave) voient au contraire dans l'État le Mal radical et dans l'Individu la valeur suprême.

« Vivre sa vie», « faire ce qu'on veut », «épanouir sa personnalité », telles sont leurs formules préférées.

Pour eux toute obéissance est une abdication, une destruction de la personnalité.

La révolte est permise contre toute autorité : «Ni Dieu, ni maître », s'écrie Jean Grave.

L'État est condamné parce qu'il est l'aliénation de la liberté, et comme le dit Bakounine, «un immense cimetière où viennent s'enterrer toutes les manifestations de la vie individuelle».

Non seulement l'État est le monstre abstrait qui détruit la liberté des individus vivants, concrets, mais l'État, parce qu'il rompt la solidarité universelle, parce qu'il ne se pose qu'en s'opposant à d'autres États, ce qui engendre la guerre et ses souffrances, apparaît comme le plus grand obstacle à l'épanouissement des valeurs réellement universelles. Comprenons bien que les anarchistes ne sont pas pour autant des immoralistes antisociaux.

Ils sont au contraire tout à fait persuadés que l'individu ne peut s'épanouir que dans les relations de la vie communautaire.

Mais il s'agit pour eux de liens sociaux librement consentis.

L'État avec ses contraintes artificielles n'est qu'une caricature de la société naturelle.

Les anarchistes réclament donc une révolution qui abattra l'État, ses juges, ses policiers, ses armées.

Sur les ruines de l'État s'établiront alors de libres associations humaines. Sans doute les théories anarchistes ne doivent-elles pas être rejetées sans examen.

Il est exact que l'État, au cours de l'histoire, a pris souvent une forme tyrannique qui paralyse ou détruit l'épanouissement des personnes. L'Etat représente bien souvent l'expression déguisée d'une classe sociale dominante et ses lois ne sont alors que l'instrument dissimulé d'une «exploitation de l'homme par l'homme».

On peut admettre aussi qu'une meilleure organisation de la vie sociale, assurant une répartition plus juste des charges et des richesses, permettrait de diminuer l'appareil de contraintes et de sanctions dont l'Etat est encore aujourd'hui — sous tous les régimes politiques — inséparable.

Mais on ne saurait suivre les anarchistes jusqu'au bout de leur rêve.

Leur idée-force est précisément que l'individu — en dehors de toute organisation imposée — ne demande qu'à nouer avec ses semblables des liens pacifiques et féconds.

Kropotkine croit à un besoin naturel irrésistible d'altruisme et d'entraide. Les hommes par nature, ont des instincts généreux prédominants : c'est là le postulat si discutable de l'anarchisme qui fait trop bon marché de l'égoïsme et des passions. c) La démocratie. »

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