Les démonstrations en mathématique reposent-elles sur des évidences ?
Extrait du document
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Définition des termes du sujet:
ÉVIDENCE : Ce qui s'impose immédiatement à l'esprit, avec une vérité dont on ne peut pas douter.
Qu'elle soit
naïve (dans l'opinion) ou non (dans la connaissance rationnelle), l'évidence est une expérience subjective.
DÉMONSTRATION: Opération mentale, raisonnement qui consiste à établir la vérité d'une proposition en la
rattachant à d'autres propositions évidentes ou déjà admises comme vraies.
MATHÉMATIQUE: ensemble des sciences hypothético-déductives ayant pour objet les nombres, les figures
géométriques, les structures algébriques et topologiques, les fonctions, le calcul intégral et le calcul des
probabilités.
Les mathématiques se distinguent des sciences naturelles par le fait que leurs objets sont a priori, cad
indépendants de l'expérience sensible.
De la géométrie d'Euclide aux géométries non euclidiennes.
La géométrie d'Euclide est bien abstraite, mais les objets (la droite, par exemple) qu'elle considère sont abstraits du
réel perçu par nos sens.
Les postulats, les axiomes de cette géométrie sont considérés comme évidents.
Les
Anciens essayèrent, en vain, de déduire le cinquième postulat de la géométrie d'Euclide (par un point extérieur à une
droite donnée, on peut mener une seule parallèle à cette droite) des autres postulats.
Au début du XIXe siècle,
Lobatchevski et Bolyai fondèrent une nouvelle géométrie en partant du postulat que par un point extérieur à une
droite donnée on peut mener plusieurs parallèles à cette droite.
En 1854, Riemann créa une autre géométrie
postulant qu'il n'existe pas de droites parallèles.
Si ces géométries sont sans rapport avec notre représentation
familière de l'espace, elles n'en sont pas moins légitimes à partir du moment où elles n'impliquent aucune
contradiction logique.
Axiomatisation des mathématiques.
Dès lors les mathématiciens, se méfiant des évidences, construisent l'édifice mathématique en partant d'axiomes
aussi simples et aussi peu nombreux que possibles et en enchaînant les propositions en vertu des seules règles de la
logique.
Parallèlement à cet effort d'axiomatisation des mathématiques, se constitue avec Boole, Peano et Frege
une logique enfin capable de formaliser effectivement le discours mathématique.
Dès lors, la tâche du mathématicien
est de déduire des théorèmes à partir d'axiomes ni vrais ni faux mais simplement posés.
Quant à la validité des
démonstrations, elle ne repose plus que sur la structure des énoncés qu'elles contiennent et non sur la nature
particulière de ce dont elles parlent.
Peu importe, au fond, qu'il s'agisse de nombres, de droites ou de triangles.
Comme le constate Bertrand Russell, « les mathématiques pures sont cette discipline où on ne sait pas de quoi on
parle ni si ce qu'on dit est vrai » (The International Monthly, juillet 1901).
« L'évidence est le caractère (ou signe ou critérium) d'une vérité clairement et distinctement conçue qui s'impose
à l'esprit.
» Lagneau, Célèbres Leçons et Fragments, 1950 (posth.)
« Toute vérité nouvelle naît malgré l'évidence.
» Bachelard, Le Nouvel Esprit scientifique, 1934.
Préjugé : « Ce qui est jugé d'avance, c'est-à-dire avant qu'on se soit instruit.
Le préjugé fait qu'on s'instruit mal.
» Alain, Définitions, 1953 (posth.)
« Pour ce que nous avons tous été enfants avant que d'être hommes, et qu'il nous a fallu longtemps être
gouvernés par nos appétits et nos précepteurs [...], il est presque impossible que nos jugements soient si purs ni si
solides qu'ils auraient été si nous avions eu l'usage entier de notre raison dès le point de notre naissance.
»
Descartes, Discours de la méthode, 1637.
« Qui a une idée vraie sait en même temps qu'il a une idée vraie, et ne peut douter de la vérité de la chose.
»
Spinoza, Éthique, 1677 (posth.)
« Nous ne prendrons jamais le faux pour le vrai tant que nous ne jugerons que de ce que nous apercevons
clairement et distinctement.
» Descartes, Principes de la philosophie, 1644.
« Descartes n'ayant point mis d'enseigne à l'hôtel de l'évidence, chacun se croit en droit d'y loger son opinion.
»
Helvétius, De l'Esprit, 1758..
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