Le temps n'est-il, pour l'homme, que le signe de sa dégradation ? (Pistes de réflexion seulement)
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«
éléments de réflexion
• Il peut être intéressant d'étudier les différents sens de
dégradation :
— C'est d'abord la destitution infamante d'un grade, d'une dignité.
— En physique, c'est la transformation de l'énergie en
forme de moins en moins utilisable (cf.
le deuxième principe de la thermodynamique).
- C'est plus généralement une détérioration, un délabrement.
• Sur le temps comme signe de dégradation, comme signe de moindre dignité, consulter Platon, Le Timée; en
particulier : 28a-39e.
• Réfléchir sur les phénomènes de vieillissement.
• Sur le mythe de l'âge d'or et de sa dégradation, consulter Hésiode, Les travaux et les jours.
• Le temps est ici le lieu du devenir.
lectures
• Jankélévitch, La mort (Flammarion).
• Hegel, La raison dans l'histoire (10-18), et surtout le 2e tome de La phénoménologie de l'esprit.
• F.
Alquié, Le désir d'éternité (PUF).
Introduction
Le temps paraît à la fois comme une évidence première (comment ne pas percevoir ses effets, le
vieillissement, la succession, l'irréversibilité?) et comme une énigme (comment en parler sans le dénaturer?).
Cette
ambivalence est féconde pour la philosophie, mais aussi pour la littérature ou encore la religion, qui trouve là matière
à faire du temps une clé pour comprendre, décrire, interpréter la situation de l'homme, la condition de l'homme dans
le monde, dans l'existence.
Or, dans ces trois domaines de l'esprit il est frappant de constater que mettre l'accent
sur le temps implique souvent de montrer l'homme dans sa finitude, misère de l'homme qui donne lieu au sentiment
nostalgique envers un autre que le temps, âge d'or, vie adamique ou état de nature.
C'est que le temps est
interprété et valorisé négativement, il est le signe de la dégradation.
On entend par là plusieurs choses, et en premier lieu l'idée générale d'un avilissement, d'une déchéance,
que cette dégradation soit donnée une fois pour toutes, qu'elle soit au contraire un phénomène progressif, ou plus
souvent les deux à la fois.
Il faut souligner d'emblée l'extrême plasticité du terme, qui peut recouvrir beaucoup de
nuances présentes dans plusieurs autres termes comme l'usure, la décadence, la perversion, la corruption.
Il y a
aussi bien une dimension purement matérielle, par exemple au sens de désagrégation moléculaire, que des
connotations morales avec l'avilissement ou la perte d'un grade, ou encore la référence à la vie avec l'idée
d'affaiblissement progressif.
Cette plasticité fait que l'on peut appliquer ce terme de dégradation aux différentes
manières de concevoir le temps.
1)
Comme changement continuel par lequel le présent devient le passé, le temps sera signe de la
dégradation de l'homme en tant que celui-ci est lui-même soumis à un changement sur lequel il n'a pas prise.
2)
Comme milieu indéfini analogue à l'espace dans lequel se dérouleraient les événements, le temps sera le
signe pour l'homme d'une place qu'il n'a pas choisie, où il n'a pas de repères qui lui préexistent.
Toute la difficulté est alors de penser en quoi cette dégradation serait propre à la condition humaine, pour autant
qu'il s'agit de sa dégradation et non de la dégradation de toute chose soumise à génération et corruption, comme
dans le cadre des physiques grecques.
C'est que le temps doit valoir comme signe, et non plus simplement comme
donné, mais ce signe ne présume pas de l'usage qu'on doit en faire.
Ainsi, le temps pensé comme dégradation pourra
être utilisé comme un sens à interpréter ou comme un indice, voire une indication, selon qu'on y cherche plutôt une
signification ou une orientation.
I.
Le temps interprété comme finitude
1.
L'interprétation janséniste de la chute
Le temps est d'abord ce qui fait la différence entre l'homme adamique et l'homme après la chute, si l'on
cherche à donner un sens philosophique à l'idée de dégradation.
Pascal permet de penser la logique de cette chute,
notamment dans la Pensée Lafuma 148 : « Qu'est-ce donc qui nous crie cette avidité et cette impuissance, sinon
qu'il y a eu autrefois dans l'homme un véritable bonheur, dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace
toute vide et qu'il essaie inutilement de remplir de tout ce qui l'environne, recherchant des choses absentes le
secours qu'il n'obtient pas des présentes, mais qui en sont toutes incapable parce que ce gouffre infini et immuable,
c'est-à-dire que par Dieu même ».
Le temps apparaît comme le veut l'idée de chute comme le lieu du souvenir d'un
bonheur impossible à atteindre parce que passé, pur souvenir..
»
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