Le système de SAINT AUGUSTIN
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SAINT AUGUSTIN
Né en Numidie, à Thagaste, en 354, d'un père païen et d'une mère chrétienne, Monique, Augustin étudie à Carthage.
Dans sa prime jeunesse il ne rêve que de plaisir et de succès matériels et mondains.
Il envisageait de devenir avocat
(cette profession, dit-il, où plus on ment, mieux on réussit ).
En réalité il ouvrira à Carthage une école de rhétorique.
Son talent de professeur est tel que rapidement on le réclame en Italie.
Il enseigne à Rome puis — en 384 — à
Milan.
Cette brillante activité professionnelle ne l'empêche pas d'avoir une vie privée assez agitée.
Dès sa jeunesse il
est préoccupé par le problème de la chair : «J'aimais l'amour, dira-t-il9avant même d'être amoureux, nondum
amabam et amare amabam ».
Il eut une longue liaison avec une jeune femme très passionnée, qui lui donna un
enfant, Adêodat.
Mais la mère d'Augustin, Monique, devenue veuve, rejoignit son fils à Milan et obtint de lui que —
tout en gardant l'enfant Adéodat, il renvoyât sa compagne en Afrique.
A cette époque Augustin est adepte du
dualisme manichéen.
Cette doctrine qui fait du Mal un principe ontologique, rival du Bien, lui permet de rendre
compte des impulsions encore irrésistibles de sa sensualité (plus tard il expliquera la puissance des passions par le
poids du péché originel).
Mais sous l'influence de sa mère — et aussi en lisant Plotin et les néoplatoniciens, il
abandonne rapidement ce dualisme.
Plotin le convainc que l'Un c'est-à-dire le Bien originel est la source de tout ce
qui existe : le Mal, simple privation, défaut de Bien, n'est donc pas un principe substantiel.
Préparé dès lors à la
doctrine du Dieu unique, il se convertit au christianisme et demande le baptême en 388.
Ordonné prêtre en 391 il est
évêque d'Hippone (c'est-à-dire de Bône) en 396.
Vient alors le flot des invasions barbares.
Rome est prise et pillée
par les Goths en 410 : aux païens qui prétendent que les Dieux délaissés punissent les Romains, Augustin répond par
la « Cité de Dieu ».
C'est en 430 qu'Augustin meurt à Hippone tandis que les hordes vandales qui déferlent sur
l'Afrique assiègent sa ville.
Nous voyons déjà — à partir de ce rapide résumé de la vie de saint Augustin — que la philosophie de l'évêque
d'Hippone est toujours directement liée à son expérience humaine.
Son expérience de la culpabilité lui fait rejeter
l'interprétation manichéenne du Mal (si le mal vient d'un principe mauvais l'homme est exonéré de toute faute).
Mais
si saint Augustin insiste sur la liberté du pécheur (il a écrit un traité du libre arbitre) il ne peut partager l'orgueilleuse
naïveté des hérétiques disciples de Pelage qui croient que l'homme est capable de se sauver tout seul.
Saint
Augustin, fort de son expérience des passions, sait que l'homme est impuissant à se libérer complètement, par ses
seules forces, des sollicitations de la concupiscence si la grâce de Dieu ne vient pas à son secours : d'où sa
vigoureuse critique de l'hérésie pélagienne, d'où l'importance sans cesse croissante qu'il donnera à la Grâce.
C'est
toujours par une réflexion sur le donné vécu, sur l'existentiel, oserons-nous dire, que saint Augustin commence.
Ainsi
méditant sur les conditions de sa propre pensée, découvre-t-il avant Descartes la nécessité du cogito : je puis me
tromper en bien des choses, mais enfin si je me trompe c'est que j'existe : si Fallor, sum (Cité de Dieu XI, 26).
Cette
première vérité, tirée de l'expérience réflexive, triomphe du scepticisme de la Nouvelle Académie et pose le problème
des vérités éternelles dont le Dieu des chrétiens sera le support.
On peut citer aussi l'admirable analyse du temps, à
partir des données vécues par la conscience psychologique.
C'est le génie psychologique d'Augustin qui donne tout
son prix au plus connu de ses livres : ses admirables Confessions.
Saint Augustin a toujours rendu hommage à
Platon, le premier des Philosophes.
Il reprend la célèbre théorie des Idées à la lumière nouvelle du christianisme.
Certes, fort de la croyance chrétienne en la Création, Augustin rejette les mythes de la réminiscence et de la
métempsychose.
Nous n'avons pas, avant de naître, habité au ciel des Idées.
Nous ne vivons pas sur les souvenirs
d'une contemplation prénatale, mais Dieu nous fait librement participer aux vérités éternelles qu'il porte en lui.
Il se
fait en nous lumière intérieure par laquelle et en laquelle nous contemplons les vérités.
Telle est la théorie
augustinienne de l'Illumination.
Nous retrouvons aussi la théorie platonicienne des deux mondes, mais repensée à
travers l'exigence chrétienne de charité.
A la Cité terrestre où l'amour de soi est poussé jusqu'au mépris de Dieu,
Augustin oppose la « Cité de Dieu » où l'amour de Dieu doit être poussé jusqu'au mépris de soi.
Comment se pose, dans ces perspectives le problème des rapports de la raison et de la foi ? La formule de saint
Augustin est celle-ci : « Crede ut intelligas ; praecedit fides, sequitur intellectus » (sermo 118, I).
La foi précède
l'intelligence mais il n'y a pas de conflit entre l'une et l'autre : « Crois pour comprendre ».
La foi nous livre la clef de
l'univers et notamment de la destinée humaine.
La foi n'opprime pas l'intelligence d'après saint Augustin, mais tout
au contraire ouvre les yeux de l'intelligence que l'infidélité tenait fermés.
La foi nous assure en quelque sorte les
principes premiers, les axiomes fondamentaux qui nous donneront le moyen d'élaborer une interprétation cohérente
des données de l'expérience.
A partir des principes de la foi, la raison déduira par ses propres forces des
conséquences et tentera de résoudre les problèmes que Dieu a laissés à nos libres discussions.
L'objet de la foi est
par nature au-dessus de notre raison.
Mais la foi nous dispose à mieux comprendre, à mieux nous servir de la raison..
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