Le seul service que l'art peut rendre à la société, c'est de lui permettre de douter d'elle-même. Qu'en pensez-vous ?
Extrait du document
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Le terme art( ars en latin traduit le mot grec technê) désigne aussi bien le savoir-faire, que la création artistique, la
recherche du beau.
Mais l'art est ici à prendre dans le sens de beaux-arts, de l'artiste, qu'un talent ou un génie
particulier rendent apte à créer la beauté.
La société est un groupe d'individu entre lesquels il existe des rapports
organisés et des services réciproques, consolidés en institutions et le plus souvent garantis par l'existence de
règles, de lois et de sanctions.
La société crée alors des comportements individuels et collectifs et des manières de
vivre différentes.
Mais si l'art se limite-t-il à reproduire la beauté naturelle, comment pourrait-il alors faire douter la société par une
imitation de la beauté de sa réalité? De plus, l'art se caractérise par une inutilité, comment alors peut-il rendre un
service à la société? Mais cette inutilité, cette absence d'utilité sociale, ne lui donne-t-il pas la liberté de poser des
questions sur la société, voire de la transformer?
I L'oeuvre d'art comme copie de la réalité peut flatter une société
Pour Taine, dans Philosophie de l'art, le génie est la résultante de trois forces dont la plus importante est le milieu :
" si inventif que soit un artiste, il invente peu." L'action des matériaux, des formes, des sujets, de la présentation,
c'est précisément l'action même du milieu.
L'artiste qui croit peindre le passé, peint en fait les moeurs de son temps,
l'environnement social qu'il voit autour de lui."
"Lorsque la société, inquiète de son vrai visage, cherche des miroirs où elle puisse à loisir se scruter, alors surgissent
les témoins de la réalité, peintres, romanciers, ou dramaturges, qui recomposent et lui offrent cette image désirée."
(Encyclopédie française)
En fait, l'artiste ne fait que refléter la société dans laquelle il vit et il ne se borne qu'à reproduire son environnement,
il ne peut par conséquent soit être indifférent pour la société, soit lui renvoyer une image positive (voir les films
américains où la culture américaine est reine).
En outre, s'il cherche à faire apparaître la beauté naturelle, il ne
montrera à la société que sa beauté, ou alors la beauté de ce monde.
De plus, si dans une société, l'art est florissant et est reconnu de qualité, alors cela renforce le prestige de la
société en question et la flatte.
Ainsi, par exemple, la société romaine est tenue pour grande parce qu'entre autre,
elle avait un art rayonnant, considéré d'ailleurs pendant très longtemps comme un modèle.
2.
L'art comme inutilité dans un monde d'efficacité
On peut se demander, en outre, si l'art en tant que beaux-arts, c'est-à-dire création d'oeuvres en but de la beauté
a un rapport ou un effet sur la société.
En fait, Kant définit la production artistique comme une finalité sans fin,
c'est-à-dire que l'oeuvre d'art n'a pas d'autre but que elle-même.
De même, le philosophe allemand caractérise la
réception de l'art comme désintéressé, comme pure contemplation esthétique qui ne vise aucune satisfaction d'un
désir, ou d'un bien moral.
L'oeuvre d'art ne peut dès lors délivrer aucun jugement sur la moralité d'une société.
Cependant, on peut se dire que l'inutilité de l'art même fait son pouvoir.
En effet, dans les sociétés dites
marchandes, l'utilité et l'efficacité tendent à devenir les valeurs principales, où les loisirs sont investis de la même
valeur marchande que le travail comme l'affirme Baudrillard, alors le seul fait que des activités puissent être inutiles
permet de remettre en question le fonctionnement des sociétés "capitalistes".
Ainsi, si pour Nietzsche, la glorification du travail était une volonté sourde de capter des forces créatrices, de les
détourner de leur vocation naturelle- la réflexion, le plaisir, pour les investir dans des activités socialement utiles.,
l'art peut permettre à l'individu de libérer ses forces et ainsi de réfléchir sur son existence et ses conditions sociales.
3.
L'art comme force de transformation
Cependant on peut aussi se demander si l'art ne peut pas faire plus qu'une simple remise en question.
L'artiste est certes le fils de son époque, mais malheur à lui s'il est aussi son disciple.
SCHILLER
L'artiste alors serait aussi celui qui inventerait de nouvelles formes, mais aussi de nouvelles manières d'appréhender
et de percevoir la réalité et la société.
Si l'artiste est celui qui peut justement libérer ses forces créatrices des
entraves sociales, alors il peut apporter des choses neuves à la société et la faire évoluer.
Dans l'art, nous faisons exister ce qui n'existe pas encore, nous faisons apparaître un monde et des univers
inconnus.
L'artiste "pro-duit", c'est-à-dire qu'il met en avant.
Des lors, l'art permet de rendre l'homme libre, puisqu'il s'aperçoit qu'il est possible de ne plus être asservi à l'utilité et
de créer lui-même sa propre voie, son existence, sans suivre inconsciemment le mode de vie utilement social.
Ainsi,
l'art remet au centre de l'existence la création, la résistance aux forces sociales et c'est la seule possibilité pour
Foucault d'agir sur les mécanismes de pouvoir sociaux.
Ainsi, si comme simple reproduction du réel social et de sa beauté, l'art peut renvoyer une image de la société, ou
au pire lui être indifférente.
Toutefois, toute société peut souhaiter avoir un art florissant pour le gain de prestige
que cela lui confère.
Pourtant, l'art par sa dimension de "finalité sans fin" est totalement étranger au principe
commerciale et utilitaire du quotidien social.
Il peut permettre à l'homme de se libérer de ces forces sociales qui
entravent sa réflexion et son existence même.
En créant ainsi des individus qui peuvent se libérer des
comportements sociaux par la contemplation ou la création, l'art permet de remettre en question la société mais
aussi la transformer en inventer de nouvelles pratiques, de nouvelles façon de percevoir et d'exister..
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