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Le renouvellement des théories scientifiques conduit-il a douter de la certitude des sciences ?

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« DIRECTIONS DE RECHERCHE • Que peut signifier « certitude des sciences »? (Consulter le commentaire du sujet ci-dessous : En quel sens peut-on parler de certitude scientifique ?) • Qu'est-ce qui, précisément, peut amener à douter de la certitude des sciences lorsqu'on constate le renouvellement des théories scientifiques ? — Importance du terme « théories ». — Que peut-on penser sous le terme « renouvellement »? (Cf., entre autres, la problématique de « l'enveloppement » — plutôt que du « développement » — et du « rejet ».) • La réponse ne dépendrait-elle pas, éventuellement, de la conception que l'on peut se faire du « vrai »? (Une dichotomie absolue « vrai-faux » ne pouvant peut-être pas rendre compte de ce qui est à l'œuvre dans les sciences et servir de critère de jugement.) • Sur quoi, précisément, peut porter le doute lorsqu'on doute de la certitude des sciences ? Il y a trois siècles, on pensait que la Terre était au centre du monde.

On pensait être dans le vrai en défendant le système géocentriste.

Aujourd'hui, notre image du monde a changé, et ce grâce à la science qui a su construire le modèle héliocentriste.

Ces deux théories, si antagonistes soient elles, étaient néanmoins toutes deux considérées comme scientifiques au moment où elles se sont affrontées.

En voyant combien la science peut produire des erreurs plausibles et tout d'un coup changer notre vision du monde, il semble légitime de se poser la question de savoir si le renouvellement des théories scientifiques nous conduit à douter de notre certitude dans les sciences.

Les théories scientifiques se succèdent, parfois complètement en rupture avec celles qui les précèdent, diffèrent d'une époque, d'une culture à l'autre… Comment ne pas penser que ces bouleversements sont liés à des facteurs extrascientifiques et que la vérité scientifique n'est ni ne sera jamais absolue ? Cependant, on peut aussi penser que le renouvellement des théories scientifiques est la manifestation du progrès des sciences, qui avancent au fur et progressivement vers le vrai en éliminant le faux. I.

La relativité et la détermination des vérités scientifiques : et si le vrai absolu était inatteignable ? Dans une perspective déterministe, on peut penser que toutes les théories scientifiques ne sont que les produits d'une civilisation.

Elles sont entièrement déterminées par un contexte politique, social, politique…qui dessine a priori les grandes lignes de l'activité scientifique.

Michel Foucault dira par exemple que la science n'est pas un point de vue objectif sur le monde mais plutôt un « regard » dépendant du contexte dans lequel les théories se construisent. On peut aussi envisager que les théories scientifiques sont déterminées de l'intérieur.

Thomas Kuhn, dans La structure des révolutions scientifiques, explique que le théories scientifiques sont en fait organisées autour d'un « paradigme », à savoir un ensemble d'idées et de méthodes qui forment une vision du monde et une manière de faire de la science.

Toute théorie scientifique est tributaire d'un certain paradigme.

Quand les théories se renouvellent, c'est qu'il y a eu un changement de paradigme.

Le problème, c'est que les paradigmes entre eux sont « incommensurables », ils n'ont aucune mesure, ils sont incomparables, on ne peut définir si l'un est plus vrai que l'autre. LA NOTION DE PARADIGME SELON KUHN L'histoire des sciences, pour Kuhn, n'est pas constituée par un progrès continu et cumulatif, mais par des sauts, par des crises qui voient des paradigmes se substituer soudainement à d'autres.

Un paradigme, c'est un modèle dominant, faits de principes théoriques, de pratiques communes, d'exemples fondateurs qui soudent une communauté de chercheurs, qui orientent leur recherche et sélectionnent les problèmes intéressants à leurs yeux.

Un paradigme n'est jamais totalement explicite.

C'est pourquoi, selon Kuhn, le questionnement scientifique n'est jamais neutre. Dans la postface à son livre La Structure des révolutions scientifiques (1 962), Kuhn cherche à classer les différentes significations du concept de paradigme : La notion de PARADIGME Explications Désigne une manière d'être et de penser propre à une communauté scientifique. (La communauté scientifique est une société comme les autres, avec ses circuits, ses relations, ses communautés d'intérêt et de discussion.) Désigne la matrice communauté. disciplinaire de cette (Le paradigme représente « l'ensemble de croyances, de valeurs reconnues et de techniques qui sont communes aux membres d'un groupe donné.

» C'est ici une communauté technique de pratiques, de gestes et de vocabulaire qui soude le groupe de chercheurs.) Désigne au sens strict les exemples communs utilisés fréquemment et qui forment la pensée et la pratique du groupe. ( Les solutions exemplaires sont « les solutions concrètes de problèmes que les étudiants rencontrent durant leur carrière de recherche et qui leur montrent aussi, par l'exemple, comment ils doivent faire leur travail.

») Une partie de l'efficacité opérationnelle d'un groupe de chercheurs provient d'habitudes intellectuelles inconscientes. 1) Un même cursus de formation; dans les matières scientifiques, cette « initiation professionnelle est semblable, à un degré inégalé dans la plupart des autres disciplines » : même enseignement, même littérature technique, mêmes exemples, etc.). 2) Un ensemble d'objectifs communs, « qui englobent la formation de leurs successeurs ». 3) Des réseaux spécifiques de circulation d'informations : périodiques, conférences spécialisées, articles, correspondances officieuses ou officielles. 1 ) Des généralisations symboliques : ce sont les éléments formalisables (symboles, concepts, principes, équations de base...) couramment utilisés. Certaines équations fonctionnent à la fois comme lois de la nature et comme définitions conceptuelles.

Par exemple, la formule newtonienne : la force est le produit de la masse par l'accélération, est à la fois une loi de la nature, et une définition de la force. 2) Des croyances en des métaphores, des analogies fonctionnant comme modèles heuristiques (qui aident à la découverte).

Par exemple, l'analogie entre le courant électrique et le modèle hydraulique ; entre des molécules de gaz et des boules de billard élastiques se heurtant au hasard... 3) Des valeurs générales : exactitude des calculs, cohérence interne, simplicité, «beauté» d'une démonstration, efficacité des théories...

Ces valeurs peuvent être communes à plusieurs groupes, mais leur application, leur hiérarchisation diffèrent souvent d'un cercle scientifique à un autre. Ces exemples fonctionnent comme : 1 ) Outils d'initiation pédagogique : « en l'absence de tels exemples, les lois et les théories que [l'étudiant] a déjà apprises auraient peu de contenu empirique.

» 2) Outils d'initiation intellectuelle : l'exemple permet de « voir » les ressemblances mathématiques ou de structures, entre problèmes différents.

« Une fois que [l'étudiant] a vu la ressemblance et saisi l'analogie entre deux ou plusieurs problèmes distincts, il peut établir une relation entre les symboles et les rattacher à la nature d'une manière qui s'est déjà révélée efficace ». Le chercheur s'incorpore des règles méthodologiques à partir de ces exemples, sans même s'en rendre compte. 3) Outils d'initiation sociologique : « dans l'intervalle, [l'étudiant] a assimilé une manière de voir autorisée par le groupe et éprouvée par le temps ». Ces deux analyses de l'histoire des sciences nous amènent à penser que les théories scientifiques sont sur-déterminées, que ce soit de l'intérieur ou de l'extérieur.

Par là même, leur vérité est entièrement relative à ce qui les détermine, en témoigne leur perpétuel renouvellement.

Il semble donc pertinent de douter de la vérité (au sens absolu et universel) des sciences. II.

Le renouvellement des théories scientifiques comme preuve que la science va vers plus de vérité. Peut-on se satisfaire de ce relativisme ? Telle est la question qu'il est légitime de se poser.

Il s'agit désormais d'étudier les arguments qui appuient l'idée que le renouvellement des théories scientifiques peut et doit nourrir notre certitude dans les sciences. S'il ne fait aucun doute que les théories scientifiques évoluent, se renouvellent, il est moins certain que l'on puisse lire l'histoire des sciences qu'en terme de rupture.

En effet, les changements sont progressifs, ils se font détail par détail.

Les scientifiques mettent peu à peu à jour des nouvelles lois qui viennent parfois remplacer mais le plus souvent compléter ou affiner une théorie pré-existante.

Prenons l'exemple de la théorie de l'évolution : elle fût énoncée canoniquement par Darwin, puis corrigée, poursuivie…par de nombreux biologistes avec par exemple une interrogation de plus en plus poussée sur l'origine de nos facultés mentales.

Le progrès des sciences n'est pas du à un contexte particulier mais à des questions et des découvertes proprement scientifiques. Dans cette perspective, on peut légitimement penser que le renouvellement des théories scientifiques est le signe que les sciences avancent vers le vrai.

Si elles sont déterminées, ce n'est que par le pouvoir de notre raison.

Avec le temps, notre raison se perfectionne (et par là même nos instruments de mesure et d'observation du monde), permettant ainsi à l'homme d'avancer dans sa quête de la vérité.

Le renouvellement des théories scientifiques est donc ce qui nous prouve que nous continuons à progresser, et ce qui doit appuyer notre certitude dans les sciences. III.

Vers une redéfinition de la vérité scientifique en terme d'obstacle épistémologique. Existe-t-il une juste mesure entre la méfiance et la naïveté face au renouvellement des théories scientifiques ? En effet, il semble décevant de penser que toute vérité scientifique est relative et trop optimiste de croire en ce grand mythe du développement de la raison dans l'humanité.

La question est donc de trouver une troisième voie qui permette d'une part de conserver un fondement objectif des sciences et d'autre part de justifier le renouvellement des théories.

Il semble que Bachelard nous propose une réponse avec la notion d'obstacle épistémologique.

Les théories scientifiques que nous élaborons sont d'abord déterminées par des croyances théologiques puis métaphysiques. Nous imaginons par exemple que les objets tombent parce qu'ils rejoignent leur « maison » avant de mettre à jour la loi de la chute des corps.

Ce phénomène de transformation des théories est observable chez chacun de nous mais aussi dans l'histoire.

Des théories pré-sientifiques sont construites puis les générations suivantes se heurtent à des problèmes dans l'application des théories, des obstacles épistémologiques.

Le rôle du scientifique est de les surmonter en faisant appel à toujours plus d'abstraction et d'objectivité.

Notons que l'apparition des obstacles épistémologiques est la conséquence d'un contexte particulier qui impose à la science de s'interroger sur ses théories.

L'obstacle n'est mis à jour que parce qu'un nouveau besoin en terme d'utilisation d'une théorie scientifique a fait surface.

Ces obstacles nous amènent à réviser nos théories scientifiques, et donc à les débarrasser de. »

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