Le monde sensible est-il l'objet de la science ?
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INTRODUCTION ET PROBLEMATISATION
Pour construire une science il faut lui attribuer un objet qu'elle puisse soumettre à examen, à observation.
L'objet de
la science est un objet qui se donne aux sens : ainsi la médecine travaille sur le corps, les sciences de la vie et de
la terre sur le vivant en général.
Tout laisse croire que le monde sensible, celui qui se donne aux sens, soit l'objet de
la science.
Comment expliquer que le monde sensible, changeant et mobile, puisse faire l'objet d'une science, stable
et visant l'objectivité? Quels sont les objets possibles pour les sciences? Lorsque l'objet devient objet de science,
de quel objet s'agit-il?
PROPOSITION DE PLAN
I.
Le monde sensible est trompeur
1.
La distinction monde sensible et monde intelligible
TEXTE Platon L'allégorie de la caverne
(Traduction Bernard SUZANNE, © 1999, 2001
Eh bien ! après celà, dis-je , représente-toi d'après une épreuve telle que celle-ci notre nature par rapport à
l'éducation et au fait de ne pas être éduqué.
Figure-toi donc des hommes comme dans une habitation souterraine
ressemblant à une caverne ayant l'entrée ouverte à la lumière sur toute la longueur de la caverne, dans laquelle ils
sont depuis l'enfance, les jambes et le cou dans des chaînes pour qu'ils restent en place et voient seulement devant
eux, incapables donc de tourner la tête du fait des chaînes ; et encore la lumière sur eux, venant d'en haut et de
loin, d'un feu brûlant derrière eux ; et encore, entre le feu et les enchaînés, une route vers le haut , le long de
laquelle figure-toi qu'est construit un mur, semblable aux palissades placées devant les hommes par les faiseurs de
prodiges , par dessus lesquels ils font voir leurs prodiges.
Je vois, dit-il
Eh bien vois maintenant le long de ce mur des hommes portant en outre des ustensiles de toutes sortes dépassant
du mur, ainsi que des statues d'hommes et d'autres animaux de pierre et de bois et des ouvrages variés ; comme il
se doit, certains des porteurs font entendre des sons tandis que d'autres sont silencieux.
Étrange , dit-il, le tableau que tu décris, et étranges enchaînés !
Semblables à nous, repris-je ; ceux-ci en effet, pour commencer, d'eux-mêmes et les uns des autres, penses-tu
qu'ils aient pu voir autre chose que les ombres projetées par le feu sur la partie de la caverne qui leur fait face ?
Comment donc, dit-il, s'il est vrai qu'ils sont contraints de garder la tête immobile toute leur vie ?
Mais quoi des objets transportés ? Ne serait-ce pas la même chose ?
Et comment !
Eh bien ! sans doute, s'ils étaient capables de dialoguer entre eux , les choses présentes étant les mêmes, ne croistu pas qu'ils prendraient l'habitude de donner des noms à cela même qu'ils voient ?
Nécessairement.
Et quoi encore si de plus la prison produisait un écho en provenance de la partie leur faisant face ? Chaque fois
qu'un des passants ferait entendre un son, penses-tu qu'ils pourraient croire que le son entendu vient d'ailleurs que
de l'ombre qui passe ?
Par Zeus, certes non !
Très certainement, repris-je, ceux-là ne pourraient tenir pour le vrai autre chose que les ombres des objets
confectionnés.
De toute nécessité, dit-il.
Examine maintenant, repris-je, leur délivrance et leur guérison des chaînes et de la déraison : que serait-elle si
naturellement il leur arrivait ce que voici ? Quand par hasard quelqu'un serait délivré et contraint subitement à se
lever et aussi à tourner le cou et à marcher et à lever les yeux vers la lumière, tout ce que faisant, il éprouverait de
la douleur et serait en outre incapable, du fait des scintillements de la lumière, d'examiner ce dont auparavant il
voyait les ombres, que penses-tu qu'il dirait si quelqu'un lui disait qu'auparavant il voyait des balivernes alors que
maintenant, un peu plus proche de ce qui est et tourné vers des choses qui, plus encore, sont il voit plus droit , et
si de plus, lui montrant chacune des choses qui passent , il le contraignait en le questionnant à discerner dans ses
réponses ce que c'est ? Ne penses-tu pas qu'il serait dans l'embarras et qu'il croirait les choses vues auparavant
plus vraies que celles maintenant montrées ?
Et même de beaucoup ! dit-il.
2.
Les sens nous trompent quelquefois
TEXTE Méditations métaphysiques (1641), Méditation seconde,
traduction du duc de Luynes revue par Descartes.
Commençons par la considération des choses les plus communes, et que nous croyons comprendre le plus
distinctement, à savoir les corps que nous touchons et que nous voyons.
Je n'entends pas parler des corps en
général, car ces notions générales sont d'ordinaire plus confuses, mais de quelqu'un en particulier.
Prenons pour
exemple ce morceau de cire qui vient d'être tiré de la ruche : il n'a pas encore perdu la douceur du miel qu'il
contenait, il retient encore quelque chose de l'odeur des fleurs dont il a été recueilli; sa couleur, sa figure, sa
grandeur, sont apparentes; il est dur, il est froid, on le touche, et si vous le frappez, il rendra quelque son.
Enfin.
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