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Le hors la loi peut-il être juste ?

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« La difficulté tient ici du sens à donner à "être juste".

Le mot français vient du latin jus, qui veut dire le droit, dans son acceptation générale, le respect du droit.

Cependant la définition actuelle, même si elle conserve se sens en tant que respect à l'institution judiciaire, lui en rajoute un autre, à savoir être moral.

C 'est deux sens sont repris par Platon dans La république où il affirme qu'être juste est en même temps une vertu et le respect d'une organisation de la vie sociale.

Le hors la loi comme son nom l'indique est un individu qui ne respecte pas les lois posées par la justice d'un pays.

Or, dans un premier temps, être juste, nous l'avons dit, c'est respecter le droit et accomplir ses devoirs.

Le hors la loi ne semble pas pouvoir être juste.

Mais cela ne postule pas que la loi soit toujours juste ? Est-ce toujours le cas ? Dès lors, comment agir pour être juste ? Peut-on bafouer la loi si elle n'est pas juste ? Le juste est celui qui respecte la loi - Nous l'avons donc rappelé le mot juste est étymologiquement identique avec le droit, dès lors être juste c'est ne pas sortir des limites que les lois me donnent, de mon droit.

Aristote a défini la justice comme "une disposition à accomplir des actions qui produisent et conservent le bonheur, pour une communauté politique." Il faut voir que la justice s'incarne principalement dans un appareil judiciaire et institutionnelle, et donc en dernière instance dans les lois.

Pour le philosophe Hobbes, la justice n'est d'ailleurs que les lois qui régissent la cité.

Pour Proudhon, dans Propriété, affirme que « le droit est l'ensemble des principes qui régissent la société ; la justice , dans l'homme, est le respect et l'observation de ces principes.

Pratiquer la justice, c'est obéir à l'instinct social.

» - En effet, les lois se doivent d'être basées sur le principe de justice, c'est- à dire d'égalité et d'équité.

Rousseau précise bien que les lois ne sont pas la création d'un seul ou d'une minorité mais qu'elles émanent de la volonté générale et donc sont dégagées de la satisfaction des intérêts particuliers. - On peut donc dire qu'être juste, c'est respecter le droit puisque les deux reposent sur un même principe, celui d'égalité.

Platon dira d'ailleurs que « c'est par la justice[ donc l'institution du droit] que les justes sont justes.

»( Hippias Majeur).

Il n'y a d'hommes justes qu'éclairés par l'idée de justice, c'est-àdire de conformité à la loi et d'équité.

Le hors-la-loi ne peut donc absolument pas être juste et respecter l'idée de justice. - Enfin, la justice dans une société ne peut jamais être personnelle.

C 'est toujours au nom de la communauté que la justice doit être rendue, parce que le tort fait à toute victime signale une atteinte à la totalité de l'organisation sociale, puisque c'est la loi qui est bafouée.

Si le hors-la-loi veut faire la justice tout seul, il bafoue la justice tout entière.

Si tout le monde s'amuse à outrepasser les lois, celles-ci ne peuvent continuer à fonctionner et risquerait de détruire les possibilités mêmes de la justice.

Si tout le monde faisait ce qu'il voulait, jugeant que la loi est injuste, toutes lois n'auraient plus cours et l'édifice social tout entier serait remis en cause.

Kant défendra la même idée.

Selon lui, le citoyen a droit de parler contre les lois mais celui qui enfreint les lois publiques rend celui qui a commis la transgression « indigne d'être citoyen »( Métaphysique des mœurs). Les lois ne sont pas toujours justes Si l'équité reste la vertu même de l'homme juste, la notion de droit et donc de conformité à la loi pose problème.

En effet, n'est-il pas possible de concevoir des lois injustes ? Comme le rappelait Pascal, la justice institutionnelle, le droit sont relatifs, les lois sont changeantes : « Plaisance justice qu'une rivière borne ! Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà.

» Pour lui, l'équité telle qu'elle est pratiquée dans le droit est liée aux mœurs et non pas à un principe universel. De même Platon affirme dans Le politique qu'aucune loi ne sera un jour « capable d'embrasser avec exactitude ce qui, pour tous à la fois est le meilleur et le plus juste et de prescrire à tous ce qui vaut le mieux.

» Kant soutient cette thèse.

Pour lui, le droit est toujours imparfait : « Dans un bois aussi courbe que celui dont est fait l'homme, on ne peut rien tailler de tout à fait droit »( Idée d'une histoire universelle) Dès lors, le respect des lois peut entrer en contradiction avec le principe d'équité.

Comme le rappelle Rousseau, les lois ont la forme de la généralité, autant dans leur origine( volonté générale) que dans leur contenu( elles statuent sur des règles de vie en générale).

Par suite, elles ne peuvent prendre en compte les particularités des situations. Etre juste dès lors, ce n'est pas toujours être dans son droit et respecter les loi, mais tenir compte des situations particulières.

Si la loi prescrit qu'il faut rendre un dépôt, est juste dans la plupart des cas, l'est-elle encore lorsque l'on se trouve à un homme qui a manifestement des intentions criminelles et qui réclame l'arme qu'il nous a confiée ? Saint-Thomas dans la Somme Théologique, soutient que la seule manière d'être juste est de transgresser la loi.

Pour Herbert Marcuse, la véritable justice réside dans la résistance au loi.

« On témoigne que le devoir de résister est le moteur du développement historique de la liberté, le droit et le devoir de la désobéissance civile étant exercé comme force potentiellement légitime et libératrice.

Sans ce droit de résistance, nous en serions aujourd'hui encore au niveau de la barbarie primitive.

»( Conférence : Le problème de la violence dans l'opposition) Dès lors, le hors la loi peut véritablement être juste en transgressant les lois. La véritable justice ne se réduit pas aux lois - On voit donc que la vraie justice ne se réduit pas au pure et simple respect du droit et des lois mais qu'elle exige une intelligence pratique du juste, une clairvoyance qui permet de trouver la solution la plus équilibrée possible et de concilier avec les exigences du réel.

Dès lors, on peut se demander, à l'instar de Kant, si la justice fondée sur les lois n'a pas quelque chose d'impure et si celui qui agit conformément à la légalité, qui reste dans son droit, par peur du châtiment ou par simple souci d'être en paix avec autrui, est véritablement juste.

C'est dans ce sens qu'Hegel affirme que le droit comme "juridiquement correct" est moins noble que le droit comme comportement morale.

C'est que la conduite morale donne au sujet "conscience de sa perfection singulière." - Être juste demande en fait une véritable réflexion personnelle, une éthique construite par la raison de chacun.

Pour être juste, il faut être capable de transgresser les lois, de sortir de son droit parce que notre réflexion fonde notre action.

Ainsi cacher un juif pendant la guerre outrepassait le droit accordé à chacun et sortait de la légalité de l'époque.

Pourtant la raison montre que le traitement des juifs pendant la guerre n'avait rien de juste puisqu'il est évident que le principe d'égalité et donc de dignité humaine, a été bafoué.

Ce qu'on a le droit de faire ne se définit donc pas par une règle immuable qu'est la loi, mais doit se réfléchir au quotidien en fonction de la morale et du respect. C'est aussi en ce sens que Platon déclare que des lois ne peuvent avoir aucun pouvoir s'il n'y a pas eu d'éducation préalable.

Parce que si chacun n'a pas une idée du juste au préalable, il ne peut dénoncer et lutter contre des lois mauvaises. - Il faut donc prendre le droit de défendre sa conception de la justice mais si les lois nous disent que nous ne sommes pas dans notre droit en agissant. Cependant, la transgression des lois ne doit pas devenir une règle.

Elle doit répondre à des cas exceptionnels, quand la justice est vraiment bafouée et quand seulement quand autrui est concerné et menacé. Ainsi, le hors la loi, dans un premier temps, en ne respectant pas les lois, ne peut être juste parce que les lois sont basées sur la justice et sur l'équité. Pourtant, les lois ne sont pas toujours justes.

Elles sont générales et peuvent parfois ne pas respecter les droits de l'homme et du citoyen.

Les lois antijuifs sont l'exemple parfait du déraillement possible du droit.

La justice n'est pas tout le temps irréprochable.

Le hors-la-loi est dès lors peut-être juste s'il cache des juifs ou si ses actions sont basées sur une véritable recherche d'équité et d'égalité.

Être véritablement juste demande donc une véritable réflexion personnelle qui permet de ne pas respecter les lois quand cela est nécessaire, sans pourtant le faire tout le temps.. »

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