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Le fétichisme en psychanalyse

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« Si la nature humaine était constituée de telle sorte que les hommes désirent au plus haut point ce qui leur est le plus utile, aucune science ne serait nécessaire pour instituer la concorde et la bonne foi ; mais comme on constate qu'il en va tout autrement avec les hommes, l'État doit être nécessairement institué de sorte que tous, aussi bien les gouvernants que les gouvernés, qu'ils le veuillent ou ne le veuillent pas, accomplissent pourtant ce qui importe au salut commun, c'est-à-dire que tous, spontanément ou par la force, ou par la nécessité, soient contraints de vivre selon les prescriptions de la Raison; si les affaires de l'État sont ainsi agencées, il en résultera que rien de ce qui concerne le salut commun ne sera totalement délégué à la bonne foi d'un individu.

Personne en effet n'est assez vigilant pour ne pas dormir parfois et personne n'eut jamais l'âme assez forte et intègre pour n'être pas parfois brisé ou vaincu, précisément quand la plus grande force d'âme eût été nécessaire.

Ce serait la pire sottise que d'exiger d'autrui ce que personne ne peut s'imposer à soi-même, d'exiger que l'autre soit plus soucieux d'autrui que de soi, qu'il ne soit pas cupide, ni envieux ni ambitieux, lui qui, chaque jour, est sollicité par toutes ces passions. SPINOZA éléments d'explication Selon Spinoza, l'homme peut savoir ce qui lui est vraiment utile en ne jugeant plus selon le sentiment, mais selon la Raison, qui est la connaissance du deuxième genre, fondée sur des idées adéquates, c'est-à-dire, selon la terminologie cartésienne, claires et distinctes.

Cette connaissance vraie des causes et des effets permet à l'homme de juger quel est son véritable intérêt en n'étant pas esclave de ses passions ni de ses désirs immédiats.

Il aura, en effet, « égard à l'avenir ».

Car « sous la conduite de la Raison, nous désirons un plus grand bien futur, de préférence à un moindre bien présent et un moindre mal présent de préférence à un plus grand mal futur » (Éthique, IV, prop.

66). De plus, la Raison étant universelle, celui qui jugera selon elle jugera d'un point de vue universel : en désirant ce qui est bon et utile pour lui, il désirera donc ce qui est bon et utile pour la nature humaine en général et par conséquent pour la nature de chaque homme en particulier.

Il s'ensuit que « dans la seule mesure où les hommes vivent sous la conduite de la Raison, ils s'accordent toujours nécessairement par nature » (id., IV, prop.

35).

C'est pourquoi « si les hommes étaient disposés par la Nature à n'avoir de désirs que pour ce qu'enseigne la vraie Raison », c'est-à-dire de désirs nés d'idées adéquates, « la société n'aurait besoin d'aucunes lois » (Traité théologico-politique, V). Mais les hommes, observe Spinoza, sont nécessairement en proie aux « affections », c'est-à-dire aux passions, aux sentiments.

Or la raison ne saurait éliminer, supprimer totalement ces sentiments, bien qu'elle puisse, à condition d'être elle-même un sentiment car seul un sentiment peut combattre un sentiment, « contenir et gouverner les affections ». Mais cette voie de la raison reste difficile puisqu'elle implique la connaissance vraie des causes de nos affections.

De plus, les causes de ces affections peuvent être des opinions qui « croissent par ouï-dire ou bien par expérience » : si la raison peut assez aisément détruire par sa seule lumière les premières, « il n'en est pas du tout de même pour les opinions que nous avons par expérience » (Court Traité, II, 31).

Il est donc chimérique de croire « qu'il est possible d'amener la multitude ou les hommes occupés des affaires publiques à vivre selon les préceptes de la raison » (Traité politique, I, 5). Ainsi ne pouvant se borner à « éclairer par des enseignements moraux » ceux qui ne vivent pas selon la Raison, toute société se verra-t-elle contrainte de recourir à la force contraignante de la loi et à la crainte qu'elle inspire pour « modérer les passions sans frein » et orienter les désirs des hommes vers l'intérêt de tous, qui est l'intérêt de chacun. Mais surtout, il ne convient pas de fonder l'Etat, qui a pour fin l'intérêt général, en le faisant dépendre (comme le faisait par exemple Platon avec les gardiens de la cité) de la faculté de ceux qui mènent les affaires publiques à suivre la voie de la raison, c'est-à-dire à comprendre que l'intérêt de chacun passe par l'intérêt de tous, mais en l'organisant de telle sorte que quelles que soient les motivations, les affections de ceux qui sont amenés à l'administrer, ils ne puissent agir que dans un sens bénéfique à la collectivité, tout entière.

C'est donc l'État lui-même qui doit, dans l'élaboration de ses institutions, « prendre la raison pour son fondement et sa règle » (Traité politique, V, § 1), et non pas s'en remettre à la raison des citoyens ou des dirigeants.. »

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