Le droit positif ou la puissance de la classe dominante ?
Extrait du document
«
VOCABULAIRE:
DROIT:
a° Un droit: liberté d'accomplir une action (droit de vote); possibilité d'y prétendre ou de l'exiger (droit au
travail, droit de grève).
b° Le droit: ce qui est légitime ou légal, ce qui devrait être, opposé au fait, ce qui est.
c° Ce qui est permis par des règles non écrites (droit naturel) ou par des règles dûment codifiées (droit
positif).
Le droit positif est l'ensemble des règles qui régissent les rapports entre les hommes dans une société donnée.
Le droit naturel est l'ensemble des prérogatives que tout homme est en droit de revendiquer, du fait même de
son appartenance à l'espèce humaine (droit au respect).
Cette interprétation est mise en avant par Rousseau :
« je vois des peuples infortunés gémissant sous un joug de
fer, le genre humain écrasé par une poignée
d'oppresseurs, une foule affamée, accablée de peine et de
faim, dont le riche boit en paix le sang et les larmes, et
partout le fort armé contre le faible du redoutable pouvoir
des lois.
» (« Fragment sur l'état de guerre »).
Le fort, ici, c'est en particulier le riche.
Dans la seconde
partie du « Discours sur l'origine de l'inégalité »,
Rousseau tente de montrer comment a pu se produire
l'appropriation de ce qui tout d'abord n'est à personne :
« le premier qui ayant enclos un terrain s'avisa de dire :
Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le
croire, fut le vrai fondateur de la société civile ».
Une
telle appropriation, qui n'est qu'un coup de force, s'expose
au nouveau coup de force de celui qui, tenté, voudrait à
son tour s'emparer du bien ; l'auteur de l'appropriation doit
donc trouver le moyen de conserver sa propriété en se la
faisant garantir par un titre, respecté par les autres
hommes ; il désire la structuration de la vie sociale :
« telle fut ou dut être l'origine de la société et des lois, qui donnèrent de nouvelles entraves au
faible et de nouvelles forces au riche, détruisirent sans retour la liberté naturelle, fixèrent pour
jamais la loi de la propriété et de l'inégalité, d'une adroite usurpation firent un droit irrévocable,
et pour le profit de quelques ambitieux, assujettirent désormais tout le genre humain au travail, à
la servitude et à la misère ».
Une perspective comparable se retrouve dans le
marxisme, qui explique par des
évolutions économiques les évolutions sociales, politiques et idéologiques.
A un certain type
d'organisation de l'activité économique correspond un certain type de division de la société en
classes sociales, aux intérêts opposés.
La « lutte des classes » est directement responsable des
événements politiques, par exemple l'arrivée au pouvoir de telle ou telle force politique qui va
légiférer, au profit des groupes sociaux dont elle représente les intérêts.
Le droit en vigueur à un
moment donné se présenterait donc toujours comme un droit partial, favorable aux groupes
sociaux par lesquels, indirectement, et pour lesquels, il est institué.
Dans le cadre d'une société
capitaliste , la bourgeoisie d'affaires étant dominante, le droit en vigueur ne pourrait être qu'un
droit bourgeois.
En théorie, seul un contrat libre passé entre les hommes permet de fonder le droit positif, mais dans l'histoire
ce sont les faits qui tranchent.
Lorsqu'une révolution réussit, un nouvel ordre s'impose.
De nouvelles lois sont
instaurées par les vainqueurs.
Dès lors, on peut se demander si la théorie du contrat social n'a pas une
fonction idéologique et ne vient pas, en quelque sorte, justifier le droit du plus fort en en faisant le produit d'un
pacte librement conclu par tous.
Car plutôt que d'envisager avec Calliclès la loi comme étant faite par les
faibles contre les forts, ne faut-il pas, au contraire, considérer qu'elle se fonde sur la force des puissants dont
elle constitue une justification ? C'est cette thèse de Marx soutient.
Selon lui, le droit est l'expression de la
puissance de la classe dominante.
Il traduit ses intérêts particuliers et, en même temps, tente de les légitimer
et de les occulter en les faisant passer comme l'intérêt commun de tous les membres de la société.
Sartre
reprend cette analyse à sa manière.
Constatant que le droit est toujours lié à des rapports de force parce qu'il
est fait pour régler des conflits, il affirme que c'est le plus fort qui impose sa loi.
Mais ce dernier ne pouvant
supporter que sa victoire soit un « pur fait », il désire la justifier.
Le droit est donc issu de la force mais il est
autre chose que la force car « il est la justification par après ».
Le vainqueur reconnaît le vaincu comme son
égal et comme un être libre afin que sa propre loi puisse être acceptée comme juste.
Mais cette liberté qu'il
reconnaît au vaincu n'est pas la liberté concrète, « c'est la liberté absolu »..
»
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