Le doute est-il utile à la connaissance et nuisible à l'action ?
Extrait du document
«
Douter, c'est d'abord examiner la vérité d'une pensée, en supposant qu'elle pourrait être fausse.
Est- ce pour
autant un échec de la pensée ? Certes vous pourriez, pour rendre compte de l'échec que constitue le doute
pour la pensée, montrer en quoi le doute peut conduire d'une part à l'incertitude, donc au silence de la raison,
mais aussi à l'inaction.
Mais ces deux limites ne valent que si on demande à la pensée de trouver la vérité
coûte que coûte et si on demande à la pensée d'éclairer nos actes.
Or la philosophie est une pensée qui, si elle
cherche le vrai et pose des question, n'obtient pas nécessairement une réponse.
Et pourtant le philosophe
continue de penser De même, dans nos actes, il y a toujours une part d'incertitude et de risque qui ne sont
pas nécessairement le signe d'un échec, mais la reconnaissance de la complexité du monde dans lequel on agit.
Ainsi Descartes a montré, pendant tout le temps où il doutait de la science et de ses connaissances, qu'il était
nécessaire d'établir une morale par provision, morale qui nous permet encore d'agir quand bien même nous
n'avons plus aucune certitude.
Autrement dit, si le doute peut m'aider à trouver le vrai, le rapport au monde
qui est le mien n'est pas qu'un rapport théorique : j'ai beau douter du savoir, je dois agir et cette urgence de
l'action rend impossible une incertitude.
Pourquoi ?
[C'est en remettant en doute ce que l'on tient
pour certain que l'on avance dans la connaissance.
Mais, concernant l'action, on doit s'en tenir à des décisions
sur lesquelles on ne revient pas.]
Il faut faire table rase de ce que l'on croît savoir
On sait que Descartes est parvenu à sa célèbre conclusion: «Je pense,
donc je suis», en mettant en doute toutes ses connaissances, qu'elles
proviennent de ses sens ou de sa raison.
Ainsi est-il arrivé à une
première certitude: tant que je pense, et peu importe ce que je pense,
je suis absolument certain d'exister.
Cette vérité ne peut pas être
remise en cause.
Cette phrase (« Je pense donc je suis ») apparaît au début de
la quatrième partie du « Discours de la méthode », qui présente
rapidement la métaphysique de Descartes.
On a donc tort de dire
« Cogito ergo sum », puisque ce texte est le premier ouvrage
philosophique important écrit en français.
Pour bien comprendre cette citation, il est nécessaire de restituer le
contexte dans lequel elle s'insère.
Le « Discours de la méthode »
présente l'autobiographie intellectuelle de Descartes, qui se fait le
porte-parole de sa génération.
Descartes y décrit une véritable crise
de l'éducation, laquelle ne tient pas ses promesses ; faire « acquérir
une connaissance claire & assurée de tout ce qui est utile à la vie ».
En fait, Descartes est le contemporain & le promoteur d'une véritable
révolution scientifique, inaugurée par Galilée, qui remet en cause tous les fondements du savoir et fait de la
Terre, jusqu'ici considérée comme le centre d'un univers fini, une planète comme les autres.
L'homme est
désormais jeté dans un univers infini, sans repère fixe dans la nature, en proie au doute sur sa place et sa
fonction dans un univers livré aux lois de la mécanique.
Or, Descartes va entreprendre à la fois de justifier la
science nouvelle et révolutionnaire qu'il pratique, et de redéfinir la place de l'homme dans le monde.
Pour accomplir cette tâche, il faut d'abord prendre la mesure des erreurs du passé, des erreurs enracinées en
soi-même.
En clair, il faut remettre en cause le pseudo savoir dont on a hérité et commencer par le doute :
« Je déracinais cependant de mon esprit toutes les erreurs qui avaient pu s'y glisser auparavant.
Non que
j'imitasse en cela les sceptiques, qui ne doutent que pour douter ; car, au contraire, tout mon dessein ne
tendait qu'à m'assurer, et à rejeter la terre mouvante & le sable, pour trouver le roc & l'argile.
» (« Discours
de la méthode », 3ième partie).
Ce qu'on appelle métaphysique est justement la discipline qui recherche les fondements du savoir & des
choses, qui tente de trouver « les premiers principes & les premières causes ».
Descartes, dans ce temps
d'incertitude et de soupçon généralisé, cherche la vérité, quelque chose dont on ne puisse en aucun cas
douter, qui résiste à l'examen le plus impitoyable.
Cherchant quelque chose d''absolument certain, il va
commencer par rejeter comme faux tout ce qui peut paraître douteux..
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