Le dialogue vous paraît-il plus convaincant que L'essai ?
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«
Sujet : Le dialogue vous paraît-il plus efficace que l'essai pour convaincre ?
Le sujet nécessite d'une part de définir le dialogue et d'autre part l'essai, afin de comprendre quels sont leurs points de convergences
et/ou de divergences.
Définitions :
1.
Le dialogue : est une communication entre deux ou plusieurs personnes ou groupes de personnes.
Les historiens de la littérature
déclarent que Platon a introduit cette notion dans ses textes, une technique d'écriture qu'il a conservée de son ancienne carrière de
dramaturge.
Le dialogue, avant d'être un instrument pour exprimer ses points de vue, est un moyen d'entrer en communication.
2.
L'essai : est un ouvrage de réflexion en prose, qui propose sur un sujet donné une étude ou une analyse débouchant sur une
thèse.
L'ouvrage de base qui a donné son nom à ce genre littéraire est le livre des Essais de Montaigne (1533-1592).
Le mot essai
signifie bien expérience et ce que veut transcrire l'auteur, ce sont les expériences de sa vie.
Mais en même temps ce livre est luimême une tentative pour cerner sa pensée, pour interroger les philosophies humaines et le sens de l'existence : les Essais sont
donc aussi une expérience intellectuelle, un « essai » philosophique à partir des données autobiographiques qui forment le matériau
du livre.
Un second sens qui donne son impulsion au genre de l'essai, un genre concis, qui possède un caractère libre, subjectif.
L'essayiste défend une thèse avec vigueur sans se soucier d'être complet, méthodique ou exhaustif.
Il veut montrer un aspect des
choses sans prétendre tout dire.
Une différence nette désigne le dialogue comme un type d'écriture avant d'être un genre, alors que l'essai en est un.
Un fait
déterminant pour notre étude, car cela suggère qu'un dialogue peut bien prendre la forme d'un essai.
De ce fait, pourquoi affirmer
qu'un dialogue est plus efficace qu'un essai ? L'essai n'est-il pas au contraire plus à même de convaincre ?
Il est donc intéressant de s'interroger sur son emploi par les auteurs.
Le dialogue est-il toujours efficace et quelles sont ses limites ?
Quelle force possède l'essai que le dialogue néglige ?
I/Le dialogue : un instrument de communication, une porte ouverte sur la réflexion
·
Le dialogue est un type d'écrit où l'auteur/narrateur attribue non seulement des actions dont il fait le récit mais aussi un
« discours », des paroles et des pensées.
Il peut concerner plus de deux interlocuteurs.
Pour que le dialogue possède un intérêt, il
faut que les personnages en présence opposent leurs opinions et leurs arguments.
Ouvrir le dialogue c'est communément s'ouvrir à
l'autre, s'ouvrir sur le monde.
On peut imaginer ainsi que le dialogue permet d'influencer un interlocuteur, mais il ne faut pas perdre
de vue qu'instaurer le dialogue c'est aussi mettre en place une dialectique, un espace de réflexion libre.
Au Moyen Âge par exemple
le dialogue sert de vecteur aux débats des Pères de l'Eglise ou de certains philosophes comme Boèce ( Consolation de Philosophie).
Le dialogue est donc fondamental en philosophie.
·
Qui plus est, on distingue deux sortes de dialogues : soit didactique, soit polémique.
Dans le dialogue didactique l'un des
personnages développe son opinion.
Nous nous retrouvons dans une configuration chère à Platon, car dans ce cas précis un
protagoniste donne une leçon à son élève essentiellement sous la forme de questions, tandis que l'interlocuteur tente de développer
une argumentation.
Par conséquent le lecteur profite de l'enseignement « philosophique » reçu par l'élève.
En revanche dans le cas
du dialogue polémique, aucun des deux protagonistes ne possède l'avantage sur l'autre, mais l'objectif reste identique : échanger
leurs conceptions du monde sous l'angle de la dialectique.
Ce qui a pour effet de souligner une modalisation plus appuyée et des
formes plus théâtrales (interruptions, invectives…).
Ce genre de débat est ainsi utilisé dans certaines pièces dramatiques.
Les formes canoniques du dialogue offrent donc une analyse de telle ou telle conception sur le monde et sur l'existence.
Qu'il soit
didactique ou polémique son objet ultime n'est pas de convaincre mais de nous faire réfléchir.
À travers chaque dialogue se
développe une structure argumentative.
En ce sens le dialogue correspond au travail en amont de l'essai.
Il ne représente pas un
instrument de persuasion, mais de réflexion.
·
II/L'essai : puissance et desseins
·
·
·
Grâce à l'essai, l'écriture permet de préciser sa place au sein du monde.
Le projet vise une connaissance : se découvrir en
précisant sa pensée, mais ce regard sur le monde dans le choix du langage et la forme de l'essai n'est pas anodin.
Le désir de
transmission d'une idéologie se profile.
Une idée de convaincre autrui du bien fondé de ses idées pour un engagement politique,
social ou humain… Défendre et illustrer ses idées est une attitude qui se diffuse avec véhémence au cours des siècles.
Sur le
modèle des Essais de Montaigne, la fable (déjà célèbre dans l'Antiquité) ou le conte philosophique, identifiés comme des traités
« moraux », prennent place.
Cependant, notons que les moralistes du XVII e siècle ne se savent pas moralistes : à l'époque le
terme désigne un auteur traitant de morale, au sens normatif et didactique.
Il s'agit d'une morale avant tout descriptive et une
peinture des hommes qui peut prendre la forme d'une maxime, c'est-à-dire l'expression d'une vérité morale d'ordre général en une
phrase évocatrice et assertive.
On en trouve par exemple dans les tragédies de Corneille, dans les Caractères de La Bruyère, les
Pensées de Pascal…
Si l'essai peut rejoindre le dialogue c'est sans doute parce qu'il s'agit d'une prise de parole.
Dans un essai l'écrivain assume sa
réflexion et souhaite la faire découvrir.
Il se donne une voix en passant par la forme du texte.
C'est-à-dire qu'il donne son opinion
de sa conception des choses et tente de défendre sa cause par tous les moyens.
En ce sens l'essai est un écrit altruiste, très
réaliste ou complètement utopique.
Il diffère sur un point avec le dialogue, un point capital : si l'on décèle un réel désir de
communication, il ne faut pas perdre de vue que l'essai ne repose pas sur l'échange mais uniquement sur l'avis d'une personne qui
cherche à imposer son état d'esprit, un peu comme une sorte de propagande.
De la sorte l'essai peut avoir pour objet de persuader, de convaincre, peut-être même de manipuler.
C'est une arme efficace
dans un combat idéologique mais aussi une arme meurtrière : le Mein Kampf d'Hitler (« Mon Combat »), rédigé alors qu'il était
maintenu en détention, est une véritable apologie de l'idéologie politique du nazisme, une logique de la haine.
Cependant de sa
première date de publication en 1925 à 1935 1,5 million d'exemplaires ont été vendus.
Aujourd'hui on estime le tirage à 10 millions
d'exemplaires auxquels s'ajoutent les traductions en seize langues étrangères.
Cet exemple démontre la puissance de persuasion
(il s'agit ici d'une puissance meurtrière) d'une fiction littéraire, d'un essai..
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