Le dialogue exclut-il toute violence ?
Extrait du document
«
AIDE ENVOYE PAR L'ELEVE: On considère traditionnellement que le dialogue peut être un moyen de mettre fin
à la violence.
Vous pouvez, par exemple, penser ici à l'importance et à la nécessité des négociations et des
rencontres dans des situations de conflit.
Vous remarquerez alors que la rupture des négociations conduit
inéluctablement à des actes de violence.
Il serait alors intéressant de montrer en quoi le dialogue peut
conduire à une attitude plus pacifiste dans cet effort de trouver un compromis ou un accord.
En effet, la
violence ne peut avoir pour fin, au premier abord, qu'une destruction de l'autre qui n'existera plus comme
ennemi.
Au contraire, le dialogue suppose une reconnaissance de l'autre avec qui il s'agit d'essayer de
s'entendre.
Voilà sans doute pourquoi, dans les situations de conflit, il est déjà extrêmement difficile de
commencer par déterminer un lieu et une date de rencontre.
Toutefois, il s'agit de se demander aussi à quelles
conditions le dialogue peut abolir la violence.
Tout d'abord parce qu'il est tout à fait possible d'avoir affaire à "
un dialogue de sourds ".
Ensuite parce que les faits nous montrent qu'il ne suffit pas qu'il y ait dialogue pour
que la violence disparaisse.
Vous pouvez montrer par exemple, en quoi les conflits se placent souvent à deux
niveaux différents, celui du soldat et celui du diplomate pour reprendre la distinction de Clausewitz.
Il ne suffit
pas que les discussions soient entreprises entre les négociateurs pour que les combats cessent.
En outre, vous
pouvez également montrer en quoi le dialogue peut consister en un déplacement de la violence sur un autre
terrain.
Pensez au fait que des dialogues peuvent aussi être très violents, même si la violence ne prend pas la
même forme ici.
Il s'agit donc de s'interroger ici sur les conditions à partir desquelles le dialogue pourrait abolir
la violence.
[Le dialogue est le propre de l'homme raisonnable.
Seul
un tel homme est capable, non seulement de communiquer
avec autrui, mais encore d'échanger des idées avec lui,
de poser des questions, de répondre.]
Dialogue et raison
Le dialogue institue entre les hommes un rapport fondé sur la raison et non sur la violence.
Réfuter, ce n'est pas avoir raison contre quelqu'un d'autre, c'est se prévenir soi-même de l'erreur.
On ne
triomphe pas de l'interlocuteur, on avance avec lui.
Il ne faut prendre garde qu'au propos lui-même, pas à une
lutte entre prétendus adversaires.
Dialoguer, c'est « donner ses raisons et accueillir celles d'autrui ».
Ainsi, il faut se mettre d'accord au début de l'entretien sur ce dont on parle, puis garder en vue cette
définition.
L'accord de l'interlocuteur est à chaque étape indispensable pour avancer.
Même la pensée solitaire dialogue avec elle-même : toute recherche de la vérité est un dialogue.
Le dialogue est un échanges d'idées
dialoguer, c'est moins communiquer à autrui des idées toutes faites que s'efforcer de les recréer en les
formulant devant lui et en s'exposant à la critique.
Dialoguer, c'est éprouver la solidité de ses arguments,
c'est accepter la critique.
C'est aussi accepter de répondre avec des mots, et jamais avec des armes lourdes.
Le dialogue contre la violence
Platon écrit toute son oeuvre sous forme de dialogues.
Cette tradition littéraire propre à la philosophie, née
avec la démocratie grecque, s'est prolongée au moins jusqu'au XVIIe siècle (Leibniz, Berkeley, Hume ont écrit
des dialogues philosophiques), et il n'est guère de philosophe pour ne pas reconnaître la vertu éminemment
philosophique de tout dialogue véritable.
Pourquoi accorde-t-on cette vertu au dialogue ?
1 – Il suppose l'égalité des interlocuteurs.
La relation qui passe par le dialogue est par nature contraire à la
relation d'autorité, car c'est une relation fondée, comme à l'Assemblée démocratique d'Athènes, sur l'échange
d'arguments : si je me plie aux arguments de l'autre, je ne lui obéis pas.
2 – Le dialogue exclut la violence pour lui préférer la raison.
La décision même de dialoguer indique que l'on a
refusé le recours à la force ou à l'intimidation pour s'imposer et qu'on fait confiance à la seule « force » des
idées et à l'examen de la validité des raisons avancées.
3 – Le dialogue interdit de décider du vrai pour les autres.
Il manifeste que penser est penser avec autrui, en
se confrontant à autrui : penser par soi-même ne doit pas se confondre avec le refus du commerce de la
pensée des autres.
4 – Enfin, le dialogue récuse la figure archaïque du maître de vérité.
La vérité recherchée en commun dans un
dialogue dépend des raisons qu'on avance ; elle n'est ni une vérité révélée, ni un dogme.
C'est à la lumière de ces vertus philosophiques du dialogue qu'il faut comprendre le prestige de Socrate, père.
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