Le désir est-il une misère pour l'homme ?
Extrait du document
«
Problématique :
Poser que le désir est une misère, c'est inscrire le désir dans une anthropologie pessimiste.
Si le désir signale certes
notre imperfection, étant aussi tension vers ce qui nous manque, et en cela, désignant ce qui est susceptible de
nous mettre en mouvement, n'est-il pas dans ce cas un bienfait ? N'y a-t-il pas une certaine positivité à manquer
au sens où comme le dit Rousseau, « vivre sans peine n'est pas un état d'homme ; vivre ainsi, c'est être mort » ? La
misère ne serait-elle pas justement de ne manquer de rien, d'être privé de désirs ?
Enjeu : quelle attitude adopter face au désir ? Doit-il être tenu pour mauvais de sorte que l'on ne pourrait être
heureux que délivrés de ses désirs, dans un état de non-désir (= perspective chrétienne et celle du pessimisme de
Schopenhauer) ? Ou bien devons-nous lui accorder une valeur telle que la souffrance ou le manque qu'il signale ne
seraient des défauts que d'un certain point de vue (le bonheur dans la quête plus que dans l'obtention) ?
1-
LE DÉSIR EN TANT QUE PRIVATION ET SOUFFRANCE,
a)
Qu'est-ce que la misère ?
EST UNE MISÈRE POUR L'HOMME
Le terme de « misère » signifie au sens premier une condition pénible aussi bien physique, matérielle que morale à
laquelle s'ajoute un sentiment de pitié : la misère est appréciation d'un état posé comme défaut.
Plus précisément,
la misère est d'un point de vue religieux, la condition humaine en tant que déchue : sa faiblesse et son incapacité à
bien agir spontanément.
A partir de là, il est facile de ranger le désir en tant que signalant notre incomplétude (on
ne désire que ce dont on est privé, non ce que l'on possède déjà) sous le régime de la misère : le désir renvoie
l'homme à sa condition d'être déchu (le désir est là, « tant pour nous punir que pour nous faire sentir d'où nous
sommes tombés » Pascal : l'homme désire parce qu'il est déchu, il est ce « roi dépossédé » par sa propre faute,
désormais incapable de vrai et de bien, et impuissant à se suffire à lui-même.
Le désir participe de ces choses décidées par Dieu pour nous punir, c'est-àdire que la jouissance intacte de notre être nous est désormais inaccessible à
moins du secours de la Grâce que Dieu est libre de nous accorder ou non.)
b)
Symptôme de notre imperfection
En effet le propre du désir est donc de nous mettre face à ce que l'on est ou
ce que l'on a pas ; son essence est négative ; le désir se conjugue toujours
sur le mode de la privation.
Ainsi Descartes montre bien que c'est par
contraste avec l'idée d'un être parfait que nous éprouvons notre condition
d'être finis : « comment serait-il possible que je puisse connaitre que je doute
et que je désire, c'est-à-dire qu'il me manque quelque chose, si je n'avais en
moi aucune idée d'un être plus parfait que le mien par la comparaison duquel
je connaîtras tous les défauts de ma nature » (Méditations métaphysiques,
III).
Autrement dit, le doute valant comme signe de notre manque de
connaissance, le désir vaut comme signe de notre manque d'être.
C'est parce
que nous désirons que nous avons conscience de n'être pas Dieu, mais des
êtres relatifs, dépendant de l'être suprême.
c)
Le désir est souffrance
Désirer, n'est pas simplement constater que l'on est fini ; c'est aussi éprouver à l'égard de cette condition une
certaine souffrance morale, c'est-à-dire adopter à l'égard du désir un jugement de valeur où celui-ci est déprécié :
à la caractérisation simplement ontologique donnée par Descartes, s'adjoint une dévalorisation psychologique où se
manifeste alors le terme de « misère » dans toute son acuité : désirer, c'est souffrir, c'est-à-dire sentir en soi-même
une douleur, un mouvement qui perturbe son être propre : le désir = ce qui sort le sujet de la jouissance intacte de
son essence et qui, le met en position de passivité et d'impuissance.
Transition :
Si le désir est misère, c'est-à-dire qu'il signale notre faiblesse, notre imperfection, tant qu'il désire, l'homme ne
saurait donc être heureux Dès lors, seule l'ascèse peut nous rendre heureux.
Pour Schopenhauer, le bonheur
consiste en un détachement à l'égard du cycle des désirs, un retrait du monde au profit de la contemplation
esthétique.
D'où le problème : comment un tel retrait est-il seulement possible ? Chercher à en finir avec le désir, n'est-il pas,
comme le remarque Nietzsche, encore le fait d'un désir ? [Cf.
Troisième dissertation de la généalogie de la morale :
« l'homme préfère vouloir le rien que de ne pas vouloir du tout » ; l'ascète en renonçant à ses désir fait encore
preuve de désirs (désir de rien mais non pas état de Non-désir]
Manquer, est-ce nécessairement souffrir, et subir une absence éprouvée douloureusement ? Le désir n'est-il autre
chose que passivité ? N'est-il pas, par l'absence même qu'il signale, l'aiguillon qui excite l'industrie des hommes ? Et
ne peut-on alors déceler dans le désir l'indice de la grandeur de l'homme (sa capacité d'agir et de produire du
nouveau, de faire venir à l'être des choses inédites) ?
2-
LE DÉSIR ÉTANT MOTEUR DE L'ACTION N'EST PAS UNE MISÈRE
a)
L'inquiétude = « aiguillon qui excite l'industrie et l'activité des hommes » (Locke).
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