Le besoin de conviction est-il une preuve de faiblesse ?
Extrait du document
«
Le terme conviction vient du latin convictio, de convincere "convaincre".
Quand on parle d'un homme de conviction, on
désigne un homme qui a une croyance ferme et assurée en la vérité d'une thèse, un homme convaincu donc du bien fondé
de sa pensée.
Il y a dans la notion de conviction, une idée de certitude.
Une pièce à conviction est preuve établissant la
culpabilité de quelqu'un et généralement cette pièce à conviction ne peut pas mentir, elle désigne la culpabilité.
Mais la
certitude n'est pas forcément une bonne chose, c'est même celle-ci qui mène au fanatisme, à l'intolérance envers ceux qui
ne possède pas la même conviction que moi.
Pourtant ne dit-on pas aussi un homme de conviction, dans la mesure où cet
homme a le courage d'aller au bout de ces idées? Avoir une conviction et la défendre n'est-ce pas une preuve de force, de
détermination? N'a-t-il pas dès lors plusieurs sortes de conviction?
La conviction est violence et immobilisme
On le voit bien de nos jours, une conviction qui n'est pas remise en question peut être dangereuse.
N'est-ce pas par
exemple par conviction que notre pensée est la seule valabe que l'homme entend l'imposer aux autres, contre leur grès,
même si cela doit se faire par la violence? Penser par exemple aux actes terroristes.
Ainsi, Saint Thomas d'Aquin disait: «Timeo hominem unius libri.» Cette réflexion, qui signifie: «Je crains l'homme qui n'a lu
qu'un seul livre», peut être interprétée de la manière suivante: il faut craindre celui qui ne jure que par une idée unique.
Il
est assez faible pour se montrer méchant, c'est-à-dire imposer, par la violence s'il le faut, ce
qu'il croit être la vérité.
De plus, la conviction peut m'empêcher d'accepter la contradiction.
Comme l'explique Edgar Morin, quand la conviction se
ferme sur elle-même, elle refuse toute objection, toute contradiction des faits, du réel.
Elle en vient donc à nier la réalité
même et refuse de voir autre chose que ce qui corrobore sa thèse.
Avoir besoin d'une conviction, c'est refuser le réel, faire
preuve de faiblesse face à ce qu'il pourrait nous apporter de nouveau, c'est se rattacher à une idée pour ne pas être
perdu dans la complexité du monde.
Enfin, rester sur une conviction, c'est s'empêcher d'agir.
Jamais les Européens n'auraient découvert le Nouveau Monde s'ils
en étaient restés à cette conviction: la Terre est plate; au-delà de l'horizon, il y a le vide.
Toute conviction est un arrêt de
la pensée.
Or, les hommes les plus courageux ont toujours été ceux qui ont tenté
l'aventure de l'esprit.
La conviction est ce qui permet la vie et l'action
Pourtant, la conviction n'est pas forcément irréfléchie.
Elle désigne en effet, dans le domaine du droit, une certitude
acquise de bonne foi et après un examen approfondi.
Contrairement, à l'opinion, la conviction est beaucoup moins
soumise au changement.
Elle désigne un engagement durable du sujet.
Mais surtout, en regardant bien, on peut apercevoir que la conviction sous-tend tous les actes.
Par exemple, la raison
toute entière ne repose pas en fin de compte sur une conviction, sur la "foi" en la valeur universelle de l'humanité.
En fait, sans conviction première, les hommes conscients de leur existence et des drames qui la jalonnent, ne verraient
plus l'intérêt de mener leur vie.
C'est par la conviction que l'existence a un sens, conviction que chacun partage, que
l'humanité continue à exister et à vouloir vivre.
«Pourquoi ne penses-tu pas, écrit Sénèque à Lucilius, que l'instrument le plus efficace pour atteindre au bonheur réside
dans la conviction que l'unique bien, c'est la vertu ?» (Lettres à Lucilius).
L'action humaine n'est pas guidée uniquement
par la raison, loin de là.
C'est la conviction que chacun acquiert de ce que peut être le bien, le bonheur qui est moteur de
tout acte et de tout effort.
Ainsi, par exemple, Nietzsche affirme que l'on peut refuser la vérité et mettre sa conviction dans
une autre valeur, si celle-ci est plus bénéfique.
Un homme de conviction est alors un individu qui a la force de mettre toute son énergie au service d'un but, qu'il considère
comme Bien.
La conviction doit être un choix réfléchi et doit se savoir conviction
En fait, il faut bien voir que la conviction comporte deux aspects : un négatif et un positif.
La conviction peut être
enfermement dans une seule idée.
L'homme peut se raccrocher à une seule idée, parce qu'il a peur de partir à l'aventure,
parce qu'il a peur de pense.
La conviction dès lors se fait avant toute réflexion, par peur de la réflexion même.
Pourtant, il
y a une seconde conviction, celle qui est vitale pour l'homme.
On ne peut en effet jamais être sûr de la vérité de nos
principes ou de nos idées.
Pourtant il faut bien agir.
A force d'avoir peur de se tromper, on ne peut guère avancer.
Il faut
dès lors comme le préconise Edgar Morin, dans Pour sortir du XXème siècle, faire un choix pour une conviction mais être
conscient que notre idée n'est qu'une conviction, qu'elle n'est peut être pas la vérité.
En effet, la conviction reste, par
définition, subjective.
Si elle ne veut pas dialoguer avec le réel, elle devient dangereuse et marque de faiblesse.
La
conviction qui est choix pour une hypothèse est la force de celui qui préfère agir, même au risque de se tromper.
La
conviction a conduit les plus grands esprits à accomplir leur oeuvre.
La conviction peut donc au premier abord, de par sa certitude, marquait la faiblesse d'un esprit qui ne veut pas voir la
complexité d'un monde et préfère se réfugier dans l'unicité d'une idée.
Cette conviction est dangereuse, puisqu'elle peut
engendrer soit le fanatisme, soit l'immobilisme.
Pourtant la conviction peut être une force qui pousse l'homme à agir en
vue de ce qu'il considère comme un bien.
Elle est courage et moteur de toute action humaine.
Pour cela, il faut néanmoins
que l'homme reconnaisse que sa conviction n'est qu'une conviction et qu'elle n'est peut être pas toute la vérité.
La vie
humaine est dans son entier un pari, dans lequel nous misons sur ce que nous croyons être le mieux.
Cela est nécessaire,
mais il ne faut cependant pas oublier que les autres, le réel lui-même sont là pour nous permettre de nous rendre compte
que nous nous trompons.
La conviction est ce qui permet de sortir du doute destructeur, mais elle a aussi besoin de ce
doute pour ne pas sombrer dans le fanatisme..
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