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Le beau est-il un plaisir désintéressé ?

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« Nous jugeons belles les oeuvres humaines quand elles suscitent en nous du plaisir par leurs seules formes.

Ce qui est beau, selon Kant, n'est pas ce qui nous est agréable sur le seul plan de nos sensations.

Pour cette raison, un vin ne peut pas être beau.

Le peintre Poussin écrit que la fin de la peinture est la délectation.

Ce terme exclut tout autre motif que l'impression produite par le jeu des formes et des couleurs.

Il évoque un plaisir raffiné, accessible seulement à un amateur cultivé et éclairé, qui s'adonne avec une attention active à l'inspection d'une oeuvre, et qui s'expose, pour ainsi dire, à elle, se projette sur elle, échange avec elle, à l'opposé de la satisfaction immédiate et gloutonne d'un désir sensuel.

Le caractère désintéressé du plaisir suscité en nous par le beau serait donc le signe distinctif de l'oeuvre d'art.

Alors que le désir vise à satisfaire nos sens en consommant l'objet réel, l'art vise, selon Hegel, à satisfaire l'esprit dans ce qu'il a de rationnel, d'abstrait, et donc d'universel, en laissant intact l'objet représenté. Le plaisir esthétique suscité par la représentation d'un objet, d'un paysage, d'une personne, d'une émotion, ou même d'une idée, est indépendant du désir envers ce qui nous est présenté ou évoqué.

Il est, selon Hegel, le plaisir que prend l'esprit à se voir sous une forme sensible. Étant indépendant de ce qui est agréable à chacun par son contenu sensible, le beau est donc universel.

Le beau n'est pas ce qui plaît à tous, mais ce qui mérite de plaire à tous les hommes.

De là, on a pu conclure que le beau ne devait surtout rien évoquer : ni le bien moral, ni le vrai, ni les sentiments de l'homme, ni la réalité extérieure.

On trouve la formulation la plus radicale de cette théorie de « l'art pour l'art » sous la plume de l'écrivain Théophile Gautier : « Il n'y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid, car c'est l'expression de quelque besoin, et ceux de l'homme sont ignobles et dégoûtants, comme sa pauvre et infirme nature. L'endroit le plus utile d'une maison, ce sont les latrines .

» Cette idéalisation de l'art fait écho à la conception du beau selon Platon.

Pour celui-ci, le beau est une idée suprasensible, une réalité existant indépendamment de nous et de tout support matériel, un idéal dont on s'approche à mesure qu'on s'éloigne de la réalité sensible. Mais ne peut-on pas soutenir, au contraire, que la forme est belle quand elle exprime, par elle-même, un contenu, qu'il s'agisse d'une idée, d'un désir, d'un sentiment, d'une fonction ou d'une force ? Au début de la « Critique du jugement » Kant propose quatre définitions du beau qui définissent le plaisir éprouvé et partent donc du sujet et non de l'objet. · Première définition : « Est beau l'objet d'une satisfaction désintéressée ». La satisfaction est désintéressée, ce qui signifie que nous ne pouvons l'éprouver que si nous sommes dans un certain état d'esprit par rapport à l'objet.

Kant ne veut pas dire que la beauté ne nous intéresse pas, que nous sommes indifférents mais que le plaisir esthétique naît lorsque nous n'avons pas le souci de l'utilité (celui qui va en mer dans le seul but de pêcher, qui porte sur elle un regard de technicien, n'éprouvera pas de plaisir esthétique), de l'agréable ( celui qui porte un regard lubrique sur un Nu, éprouve une satisfaction charnelle qui est d'un autre ordre que la satisfaction esthétique), du bien ( celui qui apprécie une oeuvre engagée en raison de son caractère moral, éprouve une satisfaction morale qui n'est pas esthétique).

Le beau n'est ni l'agréable ni le Bien.

Certes une satisfaction peut être morale et esthétique, les deux ne s'excluent pas mais en tant qu'esthétique, elle n'est pas morale.

A l'encontre de Platon, Boileau, Hegel, Kant affirme que le beau n'est pas le vrai.

Mais il n'est pas non plus le pur sensible puisque le beau ne se réduit pas à l'agréable bien que satisfaction esthétique et sensuelle ne s'excluent pas.

Et de cela Hume ne peut rendre compte.

De même qu'une oeuvre d'art immorale peut être belle, de même, peut l'être une oeuvre désagréable, qui nous déchire et bouleverse.

Et inversement, une musique agréable (par les sonorités, le passé qu'elle évoque) n'est pas belle pour autant bien que nous ayons tendance à confondre beauté et agrément.

Par conséquent, le plaisir esthétique est le seul plaisir libre.

Il n'est pas l'effet de la satisfaction de quelque chose, du besoin du corps ou d'une impératif de la raison.

Libre parce que désintéressé. · Deuxième définition : « Est beau ce qui plaît universellement sans concept ». Ø « Ce qui plait universellement »: Le fait que cette satisfaction soit universelle, valable pour tous découle de la première définition.

En effet nous avons vu qu'être sensible à la beauté relève d'une sensibilité purifiée de la convoitise, de la crainte, du désir, du confort ...

bref de tous les intérêts particuliers.

Ce plaisir éprouvé n'est donc pas celui d'un sujet enfermé dans sa particularité et ce dernier peut à juste titre dire: « c'est beau », comme si la beauté était dans l'objet.

Il peut légitimement s'attendre à ce que tout autre éprouve la même satisfaction. Ø « sans concept »: « L'assentiment universel est seulement une Idée ».

Il n'y a pas de preuve pratique ou conceptuelle de la beauté.

On juge et on sent que cette musique ou cette montagne sont belles mais on ne. »

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