L'attitude philosophique peut-elle être définie par la décision de ne jamais croire ?
Extrait du document
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Le philosophe est fréquemment évoqué comme un personnage qui réplique à tout propos par une question, et fait
preuve d'un esprit critique toujours en éveil: il n'adhère spontanément à rien, et paraît toujours prêt à douter de ce
que les autres admettent spontanément.
Cette image convenue correspond-elle à la réalité de l'attitude
philosophique? Celle-ci peut-elle être repérée comme conséquente à la décision de ne jamais croire?
Au point de départ de la philosophie se trouverait ainsi une décision.
Ce qui suppose que philosopher ne s'effectue
pas spontanément, en suivant le cours habituel de la pensée ordinaire.
Décider suppose un temps de recul, un
examen et un choix.
Ce temps de recul, c'est ce que les classiques, et Platon en premier, repèrent comme capacité d'étonnement.
Pour
commencer à philosopher, sans doute faut-il être d'abord capable de se déprendre du cours normal des événements
et de s'étonner à leur propos : qu'est-ce qui les rend tels qu'ils sont? Pourquoi (en) parle-t-on comme on (en) parle?
Que le doute puisse être la conséquence de cet étonnement premier n'a rien de surprenant, car l'examen de ce qui
a lieu amène aisément à considérer que les choses et les discours pourraient se produire autrement.
D'où en effet
une suspicion, et le refus d'adhérer à ce qui se présente — ce que l'on peut traduire par « ne pas croire ».
Ne pas croire, par exemple, que les mots n'ont que le sens qui leur est communément attribuer.
Ou même ne pas
croire qu'ils sont utilisés ordinairement avec un sens rigoureux.
C'est bien ainsi que peut être évoqué le point de
départ de la démarche socratique.
Ou, plus en amont encore, on peut la considérer comme la conséquence de la
surprise provoquée par la parole de l'oracle: Socrate est le plus sage des Athéniens — comment, en effet croire une
telle affirmation alors que tout semble indiquer le contraire.
Toutefois, «ne pas croire» n'implique pas que l'on refuse définitivement toute adhésion à quoi que ce soit.
Socrate
lui-même adhère à certaines valeurs.
Et lorsque les purs sceptiques s'en tiennent à la répétition de leur attitude, ils
ne peuvent aboutir qu'au mutisme, ou s'enfermer dans une contradiction : affirmer le doute comme seule attitude
convenable, c'est au moins sous-entendre une croyance initiale — celle de la nécessité du doute lui-même.
Aussi le doute cartésien, tout hyperbolique qu'il soit, n'est-il par d'ailleurs que provisoire.
Car il constitue un moment
inscrit dans une démarche qui a pour but, selon le titre complet du Discours de la Méthode, de «trouver la vérité
dans les sciences».
Dès lors, la non-croyance, qui résulte bien d'une décision volontaire, correspond à une mise à
l'épreuve du monde lui-même, mais elle prépare son retour.
Plus généralement, on a du mal à imaginer qu'un philosophe pourrait ne jamais croire à rien — pas même à ce qu'il
énonce.
Dans ce cas, on voit mal ce qui pourrait justifier sa démarche et son discours.
Dans l'élaboration du
système philosophique, vient au contraire un moment où l'adhésion au système est nécessaire.
Cela ne fait que
déplacer l'impact de la philosophie, mais n'en supprime aucunement la portée critique.
S'il peut en effet sembler d'abord que la dimension critique de la philosophie s'énonce le plus clairement lorsque le
philosophe se refuse à croire aux opinions, aux versions déjà faites et aux rumeurs, on doit reconnaître que
l'élaboration d'un système philosophique positif (qu'il soit celui de Descartes, de Kant ou de Hegel importe peu),
c'est-à-dire d'une doctrine à laquelle le philosophe adhère et croit, oppose à l'opinion une négation d'une tout autre
ampleur.
Très radicalement, ce que croit toujours le philosophe, c'est qu'il lui est possible de parvenir à quelque vérité et que
l'usage de la raison a quelque valeur.
À trop souligner la non croyance qui devrait caractériser l'attitude philosophique, on risque de la transformer en
activité purement négative et stérile.
Peut-être est-ce bien davantage lorsqu'elle aboutit à la construction
rigoureuse d'un système que la philosophie trouve sa meilleure définition: dans ce cas, on doit reconnaître qu'elle se
fonde radicalement sur une croyance en la rationalité.
Analyse du sujet :
q La philosophie signifie étymologiquement amour de la vérité.
q Or, la relation vis-à-vis du vrai n'est pas du même ordre que la croyance.
Je crois par habitude, mais je sais
par une méthode susceptible de découvrir le vrai.
q La remise en question de mes croyances est un moment crucial de la philosophie, il faut commencer par
mettre en difficulté les opinions communes afin d'entreprendre, selon une méthode, un cheminement vers le
vrai ?
q Il semble que ne jamais croire de façon absolue soit une injonction caractéristique de la philosophie.
q En réalité la philosophie ne se réduit pas à sa phase critique.
Souvent la critique prépare le terrain à un
nouveau dogme philosophique, un nouveau système : par exemple le système kantien.
Vis-à-vis de ce
nouveau dogme et des « vérités » qu'il met en lumière, il faut se demander si le philosophe n'est pas dans
une relation de croyance.
Problématisation :
Il faut donc se demander qu'est-ce qui est le plus à même de définir l'attitude philosophique par excellence.
Estce la découverte de vérités ou la critique ? L'injonction « ne jamais croire » définit-elle de façon satisfaisante la
philosophie telle qu'elle est, constitue-t-elle une norme de la philosophie ? La philosophie vise-t-elle seulement le
vrai ?
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