L'artiste est-il un être à part ?
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L'artiste est-il un être à part ?
L'artiste et le génie en particulier ont toujours exprimé des choses que personne encore n'avaient vu, ils ouvrent des
territoires de l'imaginaire et de l'art encore vierge.
Marcel Proust dans A la recherche du temps perdu écrit : « Par
l'art seulement noue pouvons sortir de nous, savoir ce que vois un autre de cet univers qui n'est pas le même que le
nôtre, et dont les paysages nous seraient restés aussi inconnus que ceux qu'il peut y avoir dans la lune.
».
Par
« autre monde » il faut entendre un monde imaginaire bien différent que ce que chacun peut voir.
L'artiste se doit
donc d'être différent, qu'est-ce qui créé cette différence ?
1) La bohême ou l'artiste en marge de la société.
La notion de bohème fait partie de la petite histoire du romantisme ; le terme, qui apparaît pour la première fois dans
cette acception sous la plume de George Sand (La Dernière Aldini), s'applique, par analogie avec la vie errante et
vagabonde des Bohémiens, au mode de vie que menèrent la plupart des jeunes artistes et poètes parisiens de cette
période, ou aux individus eux-mêmes.
Ils se regroupaient volontiers pour conjurer l'isolement auquel les condamnait
une société d'autant plus réfractaire aux beautés de leur art qu'ils furent révolutionnaires — entendez romantiques
avec fureur.
Ces jeunes hommes ne séparèrent jamais leur art de leur vie.
De même qu'ils rejetèrent avec éclat les
formes vieillies et convenues du classicisme, de même les bohèmes affichèrent un anticonformisme agressif, par les
beuveries et les tapages nocturnes.
C'est la vie de bohème, pleine de fantaisie et de gaieté, avec des moments
grandioses de mystifications macabres, d'orgies et de beuveries.
Cette frénésie, qui correspond plus à un jeu
littéraire qu'à une réalité, traduit, cependant, leur immense appétit de vie, leur haine de la mesure et de la grisaille
des classiques.
Leur anticonformisme s'affiche par la singularité d'un costume volontiers médiévalisant et par une
surabondance de chevelure.
Épicuriens à leur manière, ils supportaient fièrement la pauvreté et avaient en
contrepartie le sens de la mort et le goût du macabre.
2) L'artiste comme dandy.
Au cours du XIXe siècle, plusieurs symptômes d'une crise grave de la fonction artistique manifestent les réactions
de l'art à cette marginalité imposée et à cette humiliation : le mythe romantique de l'artiste maudit et du philistin
bourgeois.
Les artistes romantiques laissèrent peu à peu la place à un type nouveau d'individu qui est l'esthète.
L'esthète est un artiste infiniment plus raffiné, qui donne à l'art une place essentielle dans sa vie et dans sa
conception du monde.
C'est bien plus qu'un praticien, au point qu'il peut se passer de toute pratique artistique,
devenant lui-même pur « goûteur » des « choses de l'art ».
Le XIXe siècle a engendré des individus qui ne vivent
que pour l'art et qui se sont coupés de la réalité.
Ils ont demandé dès lors à l'art d'être de plus en plus sophistiqué
pour répondre à toutes leurs attentes qui sont restées dans le domaine de la rêverie.
Ce raffinement décadent de
l'esthétisme, qui a trouvé son expression littéraire dans le personnage de Des Esseintes chez Huysmans (À rebours,
1884) n'a pas été sans influencer le mouvement même des arts.
En protégeant et en encourageant les recherches
destinées à satisfaire les goûts les plus délicats et les plus blasés, l'esthétisme a favorisé l'éclosion des créations
rares à la fin du siècle, notamment dans le domaine des arts du décor (mobilier, céramique, tissu, vitrail, etc.).
Les
principaux artisans de l'Art nouveau, Gallé notamment, que Montesquiou admirait, lui doivent beaucoup, de même
que les plus ésotériques ou les plus précieux des peintres symbolistes.
Cette recherche continue d'un art toujours
plus élaboré et original, a débouché sur le kitsch fin de siècle de l'éclectisme outrancier, sur un kitsch baroque et
assez luxueux.
Le dandysme est une réponse à l'uniformité de la vie moderne en montrant l'éclat de ce qu'il reste
d'héroïsme dans la décadence.
Il soulignera par là l'importance du maquillage chez la femme, de la toilette, et la
volonté de rompre avec la monotonie au risque du mauvais goût.
Des dandys comme Oscar Wilde n'hésitent pas à
mettre des costumes violets assez kitsch pour se faire remarquer tout en ne s'étonnant de rien.
Le refus de la
médiocrité passera par la provocation et l'étrange.
Le dandysme sera une tentative désespérée de sauver les
restes d'un passé glorieux où les aristocrates avaient une vie essentiellement faite de loisirs, de flâneries et de
dîners mondains.
Baudelaire a une pensée résolument moderne et antiacadémique, mais il ne s'y abandonne pas
totalement, car il reste en retrait par rapport à elle en voulant fonder une esthétique propre à son époque.
3) L'artiste se différencie car il est un génie.
On méconnaît parfois la nature du génie, et l'artiste est souvent confondu avec celui qui produit de manière quasi
miraculeuse une œuvre sans effort et sans rectification.
Certes, le génie est celui qui invente des règles, mais pour
cela il a dû travailler à rectifier sans cesse ses premières intuitions, à retravailler des esquisses, à corriger ses
erreurs, à se rendre compréhensible.
Chaque génie est aussi un peu artiste, artisan, ouvrier.
Le génie résidant dans
l'intuition, une intuition nouvelle et sans commune mesure avec une quelconque règle existante.
C'est cette.
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