L'art modifie-t-il notre rapport à la réalité ?

« VOCABULAIRE: ART: 1) Au sens ancien, tout savoir-faire humain, toute pratique produisant un résultat non naturel (artificiel).

2) Au sens esthétique moderne, production ou création d'oeuvres destinées à plaire (beaux-arts), c'est-à-dire à susciter par leur aspect, une appréciation esthétique positive. Oeuvre d'art : ensemble organisé de signes et de matériaux manifestant un idéal de beauté. Réalité / Réel : Réalité: * Caractère de ce qui a une existence concrète, par opposition aux apparences, aux illusions ou aux fictions de notre imagination. * Ensemble des choses et des faits réels. Réel: * Comme adjectif : qui existe effectivement, et pas seulement à titre d'idée, de représentation ou de mot (exemple : un pouvoir réel). * Comme nom : l'ensemble des choses qui existent, le monde extérieur (synonyme : réalité). Quelques personnes avouent publiquement leur désintérêt ou leur aversion pour l'art ; plus nombreux sont ceux qui ont une vision très prosaïque du monde et n'éprouvent pour l'art qu'un intérêt poli et distant.

Les vrais amateurs d'art sont rares.

Doit-on affirmer que seuls ces derniers sont véritablement concernés par l'art, ou peut-on dire que l'art modifie notre rapport à la réalité quel que soit notre intérêt pour lui ? Pour élucider cette question, nous étudierons tout d'abord la réaction spontanée à cette question : c'est la pure réalité, et non l'art lui-même, qui conditionne notre rapport au réel ; nous verrons ensuite pourquoi on peut affirmer qu'une telle réponse est réductrice et quelle influence on peut accorder à l'art.

Enfin, nous remarquerons que l'art lui-même et l'ensemble des données culturelles incitent à nuancer la notion de « rapport à la réalité » : ce dernier est ce que nous en faisons, notamment par l'art. 1.

L'art semble second par rapport à la conscience du réel. Bien souvent nous pensons que l'art est un domaine à part, déconnecté de la réalité, qui ne peut modifier notre rapport à cette dernière. Nous ne découvrons l'art que tardivement. Ce rapport à la réalité semble en effet premier par rapport à notre expérience de l'art ; nous avons déjà une bonne conscience de ce qu'est le monde lorsque nous entendons des poèmes, écoutons de la musique ou regardons un tableau. Réfugié dans les musées ou les salles de spectacle, l'art s'isole de la réalité. Ce décalage est d'autant plus vrai qu'il est souvent nécessaire d'aller chercher l'art là où il se conserve, au musée par exemple.

Exposé dans un musée et non pas dans une pièce d'habitation, le tableau semble coupé d'une influence possible sur notre perception de la réalité.

Le musée ou la salle de spectacle sont le royaume de l'esthétique ; mais notre rapport à la réalité est surtout pratique. L'art se veut une activité gratuite, non utilitaire. Enfin, l'art revendique souvent une place à part, et rejette une influence sur notre manière de vivre comme indigne de lui.

«L'art pour l'art », disait Leconte de Lisle ; notre rapport au réel est une chose, le temps que nous consacrons à l'art doit en être une autre.. »