L'art est-il un produit du travail ?
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L’art se comprend sous la catégorie générale de « texnè« , qui désigne dans la pensée grecque toute production faite volontairement par la main de l’homme par opposition à la « phusis« , la production spontanée de la nature. Plus spécifiquement, l’art se comprend sous la catégorie des beaux-arts qui désigne l’ensemble des œuvres produites pour elles-mêmes comme des fins en soi (tableaux, statues, bijoux, monuments, vêtements de haute couture …) par distinction avec la technique artisanale qui désigne l’ensemble des œuvres produites pour autre chose qu’elles-mêmes comme des moyens ( décoration d’intérieur, vêtements et nourriture en tant qu’ils satisfont des besoins inhérent à l’existence animale de l’homme…) Le travail désigne l’ensemble des actes et des efforts que l’homme doit accomplir en vue d’obtenir une fin ( par exemple, le paysan des Travaux et des jours travaille en vue de sa subsistance). Dans la mesure où l’art en son sens général désigne une activité usant de la matière dans un processus soumis à une règle afin de produire un objet, l’art peut être défini comme un produit du travail. Toutefois si l’on définit l’art comme produit du travail, ne risque t-on pas de le confondre avec l’artisanat et ainsi de ne plus être capable de distinguer les œuvres d’art des œuvres techniques ? Nous sommes alors amenés à réviser cette thèse en proposant une nouvelle définition de l’art. Ainsi l’art serait moins le produit du travail, que la vision d’un individu exceptionnel appelé génie qui produirait ses œuvres sous le coup de l’inspiration. Néanmoins à vouloir comprendre l’art comme vision, ne risque t-on pas de transformer l’artiste en intellectuel et ainsi de négliger ce qui l’en distingue, c’est-à-dire sa confrontation féconde avec la matière ? Nous sommes alors confrontés avec ce problème : l’œuvre d’art doit-elle être pensée comme le produit d’un processus de production réglée analogue à celui de l’artisan ou doit-elle au contraire être pensée comme l’exécution d’une vision idéelle analogue à celle de l’intellectuel ?
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Introduction :
L'art se comprend sous la catégorie générale de « texnè« , qui désigne dans la pensée grecque toute production
faite volontairement par la main de l'homme par opposition à la « phusis« , la production spontanée de la nature.
Plus spécifiquement, l'art se comprend sous la catégorie des beaux-arts qui désigne l'ensemble des œuvres produites
pour elles-mêmes comme des fins en soi (tableaux, statues, bijoux, monuments, vêtements de haute couture …) par
distinction avec la technique artisanale qui désigne l'ensemble des œuvres produites pour autre chose qu'ellesmêmes comme des moyens ( décoration d'intérieur, vêtements et nourriture en tant qu'ils satisfont des besoins
inhérent à l'existence animale de l'homme…) Le travail désigne l'ensemble des actes et des efforts que l'homme doit
accomplir en vue d'obtenir une fin ( par exemple, le paysan des Travaux et des jours travaille en vue de sa
subsistance).
Dans la mesure où l'art en son sens général désigne une activité usant de la matière dans un
processus soumis à une règle afin de produire un objet, l'art peut être défini comme un produit du travail.
Toutefois
si l'on définit l'art comme produit du travail, ne risque t-on pas de le confondre avec l'artisanat et ainsi de ne plus
être capable de distinguer les œuvres d'art des œuvres techniques ? Nous sommes alors amenés à réviser cette
thèse en proposant une nouvelle définition de l'art.
Ainsi l'art serait moins le produit du travail, que la vision d'un
individu exceptionnel appelé génie qui produirait ses œuvres sous le coup de l'inspiration.
Néanmoins à vouloir
comprendre l'art comme vision, ne risque t-on pas de transformer l'artiste en intellectuel et ainsi de négliger ce qui
l'en distingue, c'est-à-dire sa confrontation féconde avec la matière ? Nous sommes alors confrontés avec ce
problème : l'œuvre d'art doit-elle être pensée comme le produit d'un processus de production réglée
analogue à celui de l'artisan ou doit-elle au contraire être pensée comme l'exécution d'une vision idéelle
analogue à celle de l'intellectuel ?
I Dans la mesure où l'art en son sens général désigne une activité usant de la matière dans un processus
soumis à une règle afin de produire un objet, l'art peut être défini comme un produit du travail.
_ Le travail désigne l'ensemble des actes et des efforts que l'homme doit obtenir en vue d'une fin.
Il consiste en un
effort de l'activité humaine sur une matière en vue de le transformer.
Aussi il est possible de concevoir le travail
sous les deux formes correspondantes aux deux matières possibles.
On peut travailler soit sur soi, soit sur ce qui
est extérieur à soi.
L'éthique est un travail sur soi qui consiste par l'intermédiaire des exercices spirituels à se traiter
soi-même comme une matière afin de se transformer pour devenir meilleur.
L'art est quant à lui un travail sur autre
chose que soi qui vise à produire un objet extérieur à l'agent qui le produit.
Cette distinction recoupe la distinction
conceptuelle d'Aristote entre « praxis« , et « poiésis » : praxis est un travail sur soi qui consiste à se transformer
soi-même alors que ce que l'on pourrait appeler la poétique désigne la technique de production elle-même.
Etymologiquement, un poème n'est qu'une chose faite au même titre qu'une table fabriquée, ou un repas.
Ainsi l'art
comme technique productive implique un travail qui consiste à produire une chose extérieure à l'agent qui le produit.
.
L'art désigne un processus de production qui a sa fin en dehors de lui-même et par conséquent, l'art compris
comme l'ensemble des œuvres produites par la technique productive peut être compris comme un produit du travail.
_ A l'instar du travail, l'art est une production volontaire qui consiste à introduire dans une matière un principe qui lui
est extérieur.
En ce sens, elle peut se comprendre sous l'espèce générale de la technè par opposition à la phusis.
La
texnè se distingue de la phusis de deux manières : tout d'abord, la nature est une production spontanée, c'est-àdire qu'il est dans l'essence même de la nature de produire sans cesse de nouveaux être alors que l'art résulte de la
volonté humaine et qu'il peut subir des interruptions.
Ensuite, la nature engendre des vivants qui peuvent vivre par
elles-mêmes alors que l'art n'engendre que des œuvres dépendantes de l'agent qui les produit.
C'Est-ce que l'on
peut soutenir avec Aristote dans sa Physique, II : « la nature engendre un vivant ayant en lui-même son propre
principe de mouvement ».
Qu'est-ce à dire ? Les vivants naissent, croissent et meurent alors qu'il faut que l'artiste
introduise de l'extérieur un principe de mouvement.
Or s'il faut l'introduire de l'extérieur ce principe pour lui donner
forme, alors l'information de la matière implique une confrontation et un effort sur la matière.
Par conséquent l'art
est une production volontaire qui implique un travail compris comme l'introduction d'un principe dans une matière.
_ L'art est un processus de production qui est soumis à une règle d'application.
Si les hommes entament un travail,
c'est qu'ils cherchent à amener une matière à la perfection.
La perfection est l'état de ce qui n'a plus besoin d'être
fait.
Ainsi le travail se donne pour visée la perfection et cherche à faire disparaitre l'écart existant entre la matière
et l'œuvre.
L'artiste se donne une visée qui oriente son travail et cette visée n'est pas infinie ; la perfection n'est
pas un idéal de l'esprit, mais une mesure accessible.
Par exemple, les raisins peints de Zeuxis, constituent pour
toute la civilisation occidentale un modèle archétypique à atteindre.
C'Est-ce que l'on peut montrer avec l'anecdote
racontée par Pline l'Ancien, au chapitre XXXV de ses Histoires naturelles : Zeuxis peint des raisins si ressemblants
que les oiseaux viennent picorer la toile.
On voit par cet exemple que si l'art est une production réglée, c'est parce
qu'elle a un commencement, un milieu et surtout une fin qui oriente tout le travail de l'artiste.
La finalité de l'artiste
est l'imitation du réel, aussi il peut considérer que son travail est achevé lorsque sa technique du trompe-l'œil est si
accomplie que ce qui n'est qu'apparence est pris pour la réalité.
La fin du travail artistique peut ainsi être comprise
en deux sens constitutifs de la perfection : elle désigne le but assigné à la démarche de l'artiste, et le dernier terme
de cette démarche.
Ainsi la perfection d'une œuvre désigne le moment où le travail de l'artiste s'arrête en coïncidant
avec le but qu'il s'était fixé.
Par conséquent, l'art est un processus de production soumis à des règles comme tout
travail.
T Dans la mesure où l'art en son sens général désigne une activité usant de la matière dans un processus soumis à
une règle afin de produire un objet, l'art peut être défini comme un produit du travail.
Toutefois si l'on définit l'art
comme produit du travail, ne risque t-on pas de le confondre avec l'artisanat et ainsi de ne plus être capable de
distinguer les œuvres d'art des œuvres techniques ?.
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