l'action peut-elle se passer de la réflexion ?
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«
Analyse du sujet :
Ce sujet est formulé sous forme d'une question totale, autrement dit qui exige une réponse par oui, ou par
non : soit l'action peut se passer de la réflexion, soit elle ne le peut pas.
En effet si on se limite à l'opinion
commune, l'action semble s'opposer à la réflexion.
L' homme d'action serait celui qui agit dans l'immédiat, alors que la
réflexion, en revanche, exigerait étant donné la mouvement de retour sur elle-même qu'elle implique et qu'elle exige
une certaine durée, autrement dit du temps.
Cependant l'action se fait dans le temps et exige aussi du temps.
Nous
le voyons le problème que laisse présager une analyse de l'opinion commune nous invite à nous attarder plus
précisément sur les deux concepts en présence.
L'action
On peut dégager plusieurs acceptions de ce terme.
1/ L'action est tout d'abord une opération d'un être considérée
comme produite par cet être lui-même et non par une cause extérieure.
L'action est celle du sujet qui agit.
2/
L'action c'est aussi l'effort, le travail, l'activité non plus comme processus opératoire à proprement parler mais
comme se distinguant du repos et de l'inactivité.
3/ L'action se pense aussi directement dans son opposition à
l'intelligence, la réflexion et la pensée : c'est la spontanéïté des êtres vivants, et plus précisément de l'homme
considérée comme se distinguant de la représentation.
NB :Nous ne prenons volontairement pas en considération
l'action au sens d'influence d'un corps sur un autre.
(Exemple : On parle à ce titre d'action de l'acide chlorydrique
sur les métaux) En effet notre interrogation portant sur le lien « action » / « réflexion », cette acception ne nous
semble pas prioritaire.
La réflexion
La ré-flexion est un retour de la pensée sur elle-même avec pour objet non pas un objet extérieur mais ses propres
opérations.
Ici la réflexion notons, car cela nous sera utile par la suite est quasi définie comme une action.
Dans le
sens plus courant, la réflexion elle est suspension du jugement afin de prendre en considération d'avantage les
tenants et les aboutissants d'une situation.
Dans ce cas la réflexion apparaît comme suspension de l'action.
« Se passer de » : clé pour la problématisation
Pourquoi s'interroger sur ce concept qui semble évident, clair et distinct.
En effet se passer de, c'est faire
l'économie de, faire l'abstraction de.
Cependant cette question part d'un présupposé évident : Si on accepte
l'hypothèse selon laquelle l'action pourrait se passer de la réflexion, c'est que la réflexion ne serait qu'un moyen non
nécessaire et donc contingent au service de l'action.
Nous nous installerions dans un primat de l'action qui dénierait
toute valeur à la réflexion.
On le voit, le sujet a des enjeux insoupçonnés.
Néanmoins penser le lien « action » /
« réflexion » sur ce mode, autrement dit sur celui de la supériorité de l'un par rapport à l'autre semble infructueux.
Ceci apparaît dans les distinctions conceptuelles que nous avons pu élaborer.
La réflexion est dans une certaine
mesure un type d'action ; et l'action dans son caractère d'opération semble intégrer une part de réflexion.
D'où la
question : l'action peut-elle se passer de la réflexion ?
Plan
I.
Dans quelle mesure « action » et « réflexion » s'excluent-elles mutuellement ?
II.
Dans quelle mesure la notion de délibération est ce qui fait lien entre action et réflexion ? : la réflexion
comme partie intégrante de l'action
III.
La réflexion comme entrave possible à l'action : la réflexion une action pas comme les autres.
I.
Dans quelle mesure « action » et « réflexion » s'excluent-elles mutuellement ?
1.
Un premier critère d'exclusion réciproque : le contingent contre le nécessaire.
On a tendance dans le langage commun à opposer action et réflexion.
L'une serait à proprement parler
confrontée au réel, à la contingence du réel, l'autre à la nécessité et à l'abstraction des Idées.
Ainsi on
oppose souvent trop facilement le guerrier, homme d'actions mais surtout homme dans l'action au sage
ataraxique.
Ceci reprend l'opposition entre le « monde sensible », monde contingent et le « monde
intelligible ».
L'action serait le mode de vie inhérent au monde sensible et la réflexion le modus vivendi,
cognoscendi ( le moyen de vivre, de connaître) du monde intelligible.
Ainsi de prime abord, il y aurait une
opposition entre l'action qui s'inscrirait dans la durée, qui se confronterait au contingent et la réflexion qui
arrêterait le temps pour passer du contingent au nécessaire.
Ainsi les polytechniciens et les polymathes n'ont
que faire de ce que leur propose Socrate.
Socrate veut réfléchir sur ce qu'est la piété, la beauté, la vérité,
la politique ou l'éducation, ses interlocuteurs eux la vivent, la pratiquent.
Il apparaît comme un fossé.
L'un
définit, les autres énumèrent des pratiques, des exemples issus de leur expérience propre.
2.
Néanmoins cette exclusion mutuelle ne tient qu'un temps : la réflexion semble devoir s'inscrire
dans l'action.
»
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