La volonté n'est-elle rien de plus que la force de nos sentiments ?
Extrait du document
«
La volonté n'est-elle rien de plus que la force de nos sentiments et de nos idées?
Observation.
— L'énoncé semble indiquer lui-même la réponse à la question posée.
Mais il est nécessaire de
préciser en quoi consiste ce « quelque chose de plus ».
Position de la question.
Les philosophes classiques ont parfois paru faire de « la volonté » une faculté à part, une
sorte d'entité abstraite distincte de notre être concret.
Il va de soi qu'il y a là une fiction et que notre volonté ne
serait rien, séparée de nos sentiments et de nos idées.
Mais nous allons montrer qu'elle est cependant quelque
chose de plus.
I.
Volonté et sentiment.
A.
— RIBOT est allé jusqu'à écrire : « Ce sont les sentiments seuls qui mènent l'homme.
» E.
RIGNANO a ramené la
volonté à « une tendance affective inhibitrice des autres ».
La volonté, affirme P.
RICoeUR, s'enracine dans le désir.
Il n'est pas douteux, en effet, que nos sentiments et nos désirs spontanés alimentent, en quelque sorte, la volonté
et lui donnent une grande partie de sa force.
La faiblesse de la volonté, chez les « apathiques » notamment, est
parfois due à « un affaiblissement général de la sensibilité ».
B.
— Mais il n'est guère douteux non plus que ces puissances affectives ne suffisent pas.
Chez le passionné, elles
sont au maximum; mais elles prennent une forme torrentueuse qui, à dire vrai, anéantit la volonté.
Comme l'a
observé fort justement RIGNANO, il n'est pas d'acte volontaire sans une certaine inhibition qui empêche notre
activité d'être comme emportée par les impulsions affectives.
Mais il attribue cette puissance à une tendance qui
serait « à plus longue portée » que les autres.
Il y a là une illusion : du conflit des tendances, ne résulteront jamais
que des oscillations de l'action, des indécisions ou des incohérences si une puissance supérieure ne vient arbitrer et
résoudre le conflit.
Cette puissance supérieure n'a rien de mystérieux : c'est cette faculté de synthèse, proche
parente de l'attention, qui fait intervenir la personnalité tout entière.
II.
Volonté et idée.
A.
— On peut en dire autant du rôle des idées.
Certes ce rôle est important : il n'y a pas volonté proprement dite si
nous n'agissons que d'après des représentations purement sensibles.
Vouloir, dit Ch.
BLONDEL, c'est agir par
concepts.
B.
— Mais, ici encore, l'idée ne suffit pas.
D'une part, pour que l'idée devienne une force, il faut qu'elle emprunte
cette force au sentiment ou, plus exactement, qu'elle s'agrège, qu'elle s'incorpore à tout l'ensemble de notre
personnalité.
D'autre part, si elle demeure isolée, l'idée peut devenir tout aussi impulsive que le sentiment : c'est le
cas de l'obsession ou de l'idée fixe.
Il y a encore, en ce cas, carence de l'inhibition.
Conclusion.
Dans les deux cas, nous sommes conduits à la même conclusion.
Nos idées, comme nos sentiments,
sont, en quelque sorte, les matériaux de la volonté; mais elles ne suffisent pas.
Il n'y a proprement volonté que s'il y
a eu inhibition temporaire, ce qui n'est possible que grâce à cette activité de synthèse qui est la forme la plus haute
de notre activité psychique..
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