La violence est-elle le mal ?
Extrait du document
«
Introduction :
La violence est un usage de la force, d'une puissance contre un objet ou un individu.
Elle est
essentiellement destructrice mais peut servir au maintien de l'ordre et de la sécurité : son statut est ambiguë.
En
effet, comme le développe Gusdorf dans la Vertu de la force, réduite à elle-même, la violence est une absurdité
pure, désespoir de l'humain.
Le légionnaire romain tue Archimède ; le milicien nazi massacre le savant juif etc.
« La
faiblesse de la violence nue est si évidente qu'elle doute de soi.
» Or c'est bien là le problème de la violence comme
mal nécessaire.
Comment voir une nécessité dans un crime ? Ou plus exactement comment pouvoir l'excuser d'une
quelconque manière ? Et c'est bien ce que met en exergue Jankélévitch dans L'imprescriptible, Pardonner ? Dans
l'honneur et la dignité notamment après les crimes contre l'humanité de la Seconde Guerre mondiale avec les
chambres à gaz, les assassinats de résistants etc.
: « l'extermination des juifs est le produit de la méchanceté pure
et de la méchanceté ontologique ».
Il s'agit d'un crime « contre-nature […] Oublier ce crime gigantesque contre
l'humanité serait un nouveau crime contre le genre humain.
» Toute explication que l'on pourrait fournir serait à
jamais insuffisante, il n'y a pas d'explication contre ce type de violence ni même de nécessité et l'on a peine à
croire, dans l'hypothèse d'un être transcendant comme Dieu, qu'il y ait une raison à ce déchaînement de violence.
Et c'est bien dans cette perspective que se pose la question de savoir la violence ne serait pas qu'un mal absolu ne
produisant aucune positivité donc l'absurde même ? Toutefois, n'est-ce pas réduire le concept ?
Si la violence peut se comprendre comme l'expression d'un mal radical en l'homme (1ère partie), il n'ne reste
pas moins qu'il n'est pas absolu (2nd partie) et peut se saisir à travers une certaine positivité reconsidérant le
concept même de violence (3ème partie).
I – La violence comme expression du mal radical
a) La violence trouve l'une de ses causes dans l'agressivité.
Or celle-ci semble constitutive de l'homme.
En effet,
comme le remarque Freud dans Malaise dans la civilisation on peut constater une agressivité naturelle de l'homme,
consubstantielle à lui-même.
L'homme n'est pas l'être débonnaire assoiffé d'amour mais au contraire, un être qui
porte en lui une somme d'instincts d'agressivité.
Le prochain pour lui n'est pas seulement un auxiliaire et un objet
sexuel possibles, mais aussi un objet de tentation.
Il est tenté de satisfaire ses besoins de violence : « Homo homini
lupus : qui aurait le courage, en face de tous les enseignements de la vie et de l'histoire, de s'inscrire en faux
contre cet adage ? ».
La violence se rattache à l'une des deux pulsions fondamentales de l'homme à savoir
Thanatos c'est-à-dire une pulsion de destruction et finalement une pulsion de mort ; l'autre étant Eros pulsion de
conservation.
En ce sens, la nature humaine semble traversée par cette nécessité de la violence ; elle apparaît
comme un mal nécessaire et intrinsèque de l'homme.
b) Plus profondément, on peut dire avec Kant dans la Religion dans les limites de la simple raison, que la violence
n'est qu'un symptôme d'un mal que l'on pourrait qualifier de radical chez l'homme : « l'homme est mauvais, ne peut,
d'après ce qui précède, vouloir dire autre chose que ceci : l'homme a conscience de la loi morale, et il a cependant
adopté pour maxime de s'écarter (occasionnellement) de cette loi.
Dire qu'il est mauvais par nature, c'est regarder
ce qui vient d'être dit comme s'appliquant à toute l'espèce humaine : ce qui ne veut pas dire que la méchanceté
soit une qualité qui puisse être déduite du concept de l'espèce humaine (du concept d'homme en général), car elle
serait alors nécessaire, mais que, tel qu'on le connaît par l'expérience, l'homme ne peut pas être jugé différemment,
ou qu'on peut supposer le penchant au mal chez tout homme, même chez le meilleur, comme subjectivement
nécessaire.
Or, comme ce penchant doit être lui-même considéré comme moralement mauvais et que, par suite, on
doit y voir non pas une disposition physique, mais quelque chose qui puisse être imputé à l'homme ; comme il doit
consister conséquemment dans des maximes du libre arbitre contraires à la loi, et que, d'autre part, ces maximes, en
raison de la liberté, doivent être tenues pour contingentes en elles-mêmes - ce qui, de son côté, ne saurait
s'accorder avec l'universalité de ce mal, à moins que le principe suprême subjectif de toutes les maximes ne soit,
peu importe comment, étroitement uni avec l'humanité et comme enraciné dans elle - nous pourrons nommer ce
penchant un penchant naturel au mal, et puisque il faut toujours pourtant que ce penchant lui-même soit coupable,
nous pourrons l'appeler dans la nature humaine un mal radical et inné (dont nous sommes nous-mêmes la cause
néanmoins) ».
c) C'est donc bien dans cette nature de l'homme, de part l'usage de son libre arbitre que la violence peut devenir ce
mal absolu.
En effet, Kant poursuit dans la Religion dans les limites de la simple raison en disant : « Nul homme,
même le plus pervers, et quelles que soient ses maximes, ne viole la loi morale dans un pur esprit de révolte (en lui
apposant un refus d'obéissance).
Elle s'impose à nous irrésistiblement, au contraire, en vertu de notre disposition
morale ; et si d'autres mobiles ne venaient la combattre en lui, l'homme l'accepterait dans sa maxime suprême,
comme principe suffisant de détermination du libre arbitre, c'est-à-dire qu'il serait moralement bon.
Mais il dépend
encore, en vertu de sa disposition naturelle, également innocente, des mobiles de la sensibilité, et il les adopte aussi
dans sa maxime (selon le principe subjectif de l'amour de soi).
Et s'il les adoptait dans sa maxime comme suffisants
par eux seuls à la détermination du libre arbitre, sans se soucier de la loi morale (que cependant il porte en lui),.
»
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