La vérité consiste-t-elle dans l'accord de la connaissance avec son objet ?
Extrait du document
«
Définition des termes du sujet:
PENSÉE: Faculté de connaître, de comprendre, de juger, de raisonner, qui est censée caractériser l'homme, par
opposition à l'animal.
Synonyme d'entendement, de raison.
PENSER: Exercer une activité proprement intellectuelle ou rationnelle; juger; exercer son esprit sur la matière de
la connaissance; unir des représentations dans une conscience.
OBJET (n.
m., étym.
: latin ob-jectum : ce qui est placé devant ; chose).
1.
— Tout ce qui est présenté par la
perception, avec un caractère stable et indépendant du sujet (objet externe) ; pour la phénoménologie, l'objet est
déterminé par la visée de la conscience (cf.
sens 3).
2.
— Tout ce qui se présente à un sujet, s'offre à la pensée,
et qui est distinct de l'acte de représentation ou du sentiment (donc du sujet), c.-à-d.
aussi bien le percept,
l'image, l'idée, que l'objet externe ou la personne aimée.
3.
— Le but qu'on se propose d'atteindre (cf.
un objectif).
VÉRITÉ
La vérité concerne l'ordre du discours, et il faut en cela la distinguer de la réalité.
Elle se définit traditionnellement
comme l'adéquation entre le réel et le discours.
Qualité d'une proposition en accord avec son objet.
La vérité formelle, en logique, en mathématiques c'est l'accord
de l'esprit avec ses propres conventions.
La vérité expérimentale c'est la non-contradiction de mes jugements,
l'accord et l'identification de mes énoncés à propos d'un donné matériel.
On distinguera soigneusement la réalité qui
concerne un objet (ce cahier, cette lampe sont réels) et la vérité qui est une valeur qui concerne un jugement.
Ainsi le jugement : « ce cahier est vert » est un jugement vrai ou bien un jugement faux.
La vérité ou la fausseté
qualifient donc non l'objet lui-même mais la valeur de mon assertion.
La philosophie, parce qu'elle recherche la vérité, pose le problème de ses conditions d'accès et des critères du
jugement vrai.
Accord: état qui résulte d'une communauté ou d'une conformité de pensées, de sentiments; c'est une entente.
Être d'accord, c'est être du même avis, partager la même idée.
Introduction.
La conception la plus élémentaire de la vérité est celle qui identifie le vrai et le réel.
Prise à la lettre, elle procède
toutefois d'une méprise, car seule une affirmation, un énoncé, une pensée, peut être vraie, et seul un objet peut
être réel.
Une façon plus correcte de présenter la conception naïve de la vérité est donc de la définir comme accord
de la pensée et de l'objet.
C'est ainsi que toute une tradition philosophique, remontant au moins à Aristote,
considère que dire vrai, c'est «dire de l'être qu'il est, et du non-être qu'il n'est pas» (Métaphysique).
Mais cette
approche suffit-elle à satisfaire toutes nos attentes légitimes envers une définition de la vérité? Comment peut-on
arriver à connaître cet accord supposé, dès lors qu'il se place, en les réunissant, au-delà de la pensée et audelà de
l'objet? Quelle idée de la vérification pouvons-nous tirer de cette définition? Pour tenter de répondre à ces
interrogations, il convient tout d'abord d'examiner les diverses formes que peut prendre cette idée d'accord, puis de
nous demander si elle suffit à nous fournir un critère de vérité (un moyen de reconnaître le vrai), avant de
rechercher dans le développement des sciences une approche plus satisfaisante de cet accord.
1.
Comment concevoir l'accord entre la pensée et l'objet?
La vérité est-ce la copie de la réalité ?
Une idée ne serait donc pas qualifiée de « vraie » ou « fausse » en elle-même par ses caractéristiques intrinsèques,
mais seulement par sa conformité ou non à la réalité.
Les scolastiques disaient : « La vérité c'est la conformité de
notre pensée aux choses » (« adeaquatio rerum et intellectus »).
L'idée vraie est celle qui est fidèle à la réalité.
Si on admet que ma connaissance d'un objet doit s'accorder avec lui pour être vraie ; mais, pour que je puisse juger
de cet accord il faudrait que j'en saisisse les deux termes.
Dans ces conditions remarque Kant, « le seul moyen que
j'ai de comparer l'objet avec ma connaissance, c'est que je le connaisse », ce qui constitue un cercle, « car,
puisque l'objet est hors de moi et que la connaissance est en moi, tout ce que je puis apprécier, c'est si ma
connaissance de l'objet s'accorde avec ma on de l'objet ».
Cette définition est incontestable mais imprécise.
Car il reste à interpréter cette conformité, cette fidélité de la
pensée vraie au réel.
Le sens commun en donne une interprétation très simple : la vérité serait une simple copie de
la réalité, la présence même de la réalité dans ma conscience qui la reconnaît.
La connaissance vraie serait une
simple réception de la réalité.
Or nous nous proposons de montrer que cette notion de vérité-copie n'a aucun sens, que tout jugement vrai est
une reconstruction intelligible du réel, suppose un travail de l'esprit et n'est pas un simple reflet passif.
Et ceci
s'applique à la vérité au sens artistique, comme à la vérité au sens scientifique et philosophique.
Pour le sens commun, la vérité artistique n'est qu'un fidèle reflet.
Entre deux portraits, un tableau, une photographie
le sens commun n'hésite pas : malgré la ressemblance « intérieure » du portrait peint, seule la photographie est
vraie.
Ainsi pour le sens commun, le moulage est plus vrai que la sculpture.
La vérité artistique n'est donc pas copie et reflet mais structuration, transfiguration.
L'art, dit Malraux, dans ses «
Voix du silence », « c'est ce par quoi les formes deviennent style ».
Le vrai ce n'est pas ici la réalité brute, mais un.
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