la technique peut elle donner lieu à des productions originales ?
Extrait du document
«
On oppose ordinairement la technique comme pure répétition d'une même activité, comme une production d'objets utilitaires à l'art qui
produirait en petite quantité des objets inédits.
Or depuis la fin du 19 e siècle environ, on a pris conscience que la technique ne pouvait être
cantonné à cela, qu'elle était capable elle aussi de productions originales, tout d'abord d'un point de vue esthétique et aussi d'un point de
vue technique en innovant
1) La technique et le design : la production de l'originalité.
On mesure alors les inconvénients du terme d'esthétique industrielle.
Il souligne bien que les objets produits par l'industrie ne s'épuisent
pas dans leurs fonctions utilitaires, et qu'ils peuvent développer de surcroît des qualités plus généralement humaines.
Mais, à cause des
traditions qui lient spontanément l'idée d'esthétique à celle d e beauté, il ne donne pas à penser que ce surcroît est d'abord d'ordre
sémantique (informationnel), et comprend principalement : les messages dénotés et connotés au sens habituel de la théorie des signes,
et les messages de l'espace-temps sensible, que devrait déchiffrer une sémantique plastique (ou sémantique esthétique, au sens précis
où le terme est entendu dans l'étude consacrée aux « expériences esthétiques »).
C'est pourquoi s'est imposé le terme d' industrial design.
Design a l'avantage de signifier à la fois dessein et dessin.
Dessein indique le propre de l'objet industriel, qui est que tout s'y décide au
départ, au moment du projet, tandis que dans l'objet ancien, fait à la main, le projet se différenciait en cours d'exécution.
Et dessin précise
que, dans le projet, le designer n'a pas à s'occuper des fonctionnements purs, affaire de l'ingénieur, mais seulement de la disposition et
de la forme des organes dans l'espace et dans le temps, c'est-à-dire de la configuration.
À la fin du XIXe siècle, on se rendit compte que
notre environnement n'était plus composé d'objets artisanaux mais d'objets industriels, et qu'il fallait donc trouver les moyens de donner
à ceux-ci les qualités humaines de ceux-là.
Étant donné la situation spirituelle de l'époque, dominée par la bourgeoisie et le socialisme
post-romantiques, il était normal que ce surcroît fût entendu comme « beauté », et que cette beauté fût cherchée dans une
correspondance, sinon avec les formes, du moins avec les mouvements d e la nature.
Dans les Arts and Crafts et le Modern Style, les
matériaux industrialisés s'attachèrent, selon le vœu d e William Morris, à réaliser des objets « aussi naturels, aussi charmants que le
champ vert, la rive du fleuve ou le silex de la montagne ».
Encore en 1934, dans Technique et civilisation, Lewis Mumford vantera certaines
machines en rapprochant leur allure de celle de l'oiseau, du poisson ou de la plante.
2) L'exemple du bauhaus.
Dès la fin de la Première Guerre mondiale, le Bauhaus – comme, avec des nuances, le mouvement hollandais De Stijl – se détourne de
ce naturalisme.
Il estime que réduire la machine à un moyen de produire plus vite et à moindres frais des formes ancestrales, c'est ne
pas avoir saisi la révolution de structures qu'elle comporte.
Pour Gropius, l'industrie introduit un ordre nouveau.
Elle engendre un univers
composé d'éléments selon des combinatoires, et cela quant à la ligne, la couleur, la construction, la fonction, le maniement.
Il y a
d'ailleurs un rapport intrinsèque entre combinatoire et élément : plus l'élément est pur, plus la combinatoire est riche, et réciproquement.
On voit ainsi ce que le Bauhaus entend par fonction : non pas la simple adaptation à des fins utilitaires, mais la capacité pour un système
d'éléments (un objet) de renvoyer à d'autres, de s'y articuler, de s'y substituer, de leur faire signe, de les signifier Le terme de beauté
n'est pas rejeté mais redéfini : plus les objets sont fonctionnellement riches, plus ils constituent des systèmes ouverts et commuables, et
plus ils sont « beaux ».
Les conséquences culturelles de ce programme sont incalculables.
Tous les objets du monde, espère-t-on, vont
s'harmoniser, puisqu'ils s'obtiendront à partir d e s m ê m e s éléments.
L e s h o m m e s s'harmoniseront aussi, puisque créateurs et ouvriers
travailleront les mêmes données avec les mêmes moyens.
Plus radicalement : le réel n'est plus un ensemble de substances, mais de
relations ; la forme cède le pas à la structure.
Le fonctionnalisme bien compris ouvre le XXe siècle.
Par-là le Bauhaus a donné naissance à
des productions originales qui ont fait date dans l'histoire de l'art.
L'innovation technique :
La genèse des produits nouveaux ou des nouvelles méthodes d e production (innovations dans la technique instrumentale) a
profondément changé depuis le début de la civilisation industrielle.
Jusqu'au début du XXe siècle environ, et dans la plupart des cas, les
innovations techniques ont pour origine une invention, c'est-à-dire une idée technique nouvelle susceptible de conduire à d e s résultats
utiles.
Les inventions sont habituellement l'œuvre d'industriels, d'ingénieurs, d'artisans, d'ouvriers, travaillant seuls ou en petite équipe,
bénéficiant évidemment des essais, résultats, améliorations antérieurs.
Les liens entre les inventions et des acquisitions scientifiques
récentes sont alors généralement assez flous, voire nuls, du moins dans les domaines essentiels des inventions mécaniques (vapeur,
textiles, transports) et métallurgiques.
Par contraste avec les situations actuelles, deux traits de la genèse sont à cette époque importants
pour l'économiste : l' aléa et la quasi-gratuité.
L'apparition de l'invention elle-même est incertaine et donc rarement provoquée sciemment
par les industriels établis.
Par ailleurs, comme le lien avec la science reste assez lâche et les techniques peu complexes, l'invention est
peu coûteuse à l'échelon social ; des ressources individuelles sont généralement suffisantes.
Il en est de m ê m e pour le passage d e
l'invention à l'innovation : son lancement est très risqué, comme en témoignent d'innombrables échecs, mais la mise au point
commerciale ne nécessite pas d'investissements particuliers.
3) La technique comme production à la chaîne.
Quand l'homme n'est plus qu'un chaînon de la machine elle-même, on peut parler d'aliénation comme on peut le voir dans les Temps
modernes de Charlie Chaplin , l'activité technique n'est plus qu'une répétition machinale et sans réflexion d'un geste.
L'aliénation est un
risque pour beaucoup de travaux humains soumis à la répétition, à la parcellisation.
L'aliénation est le contraire de la reconnaissance par
le travailleur du produit de son travail comme étant le sien.
.
En d'autres termes, le produit du travail devient étranger à l'homme qui l'a
produit de par la division du travail de l'économie capitaliste.
L'homme rencontre le produit de son travail comme un être étranger, comme
une puissance indépendante de lui-même en tant que producteur.
Dans ce cadre, l'activité technique est ce qui a engendré l'aliénation, la
division du travail, la parcellisation engendrée par la mécanisation et l'automatisation.
La technique et l'industrie n'ont pas pour but de
produire des objets originaux mais de produire en masse des objets purement utilitaires.
C'est ce genre de technique qui est absolument
à l'opposé à la création d'objets originaux.
Conclusion.
La technique est capable de productions originales, et elle le doit si elle ne veut pas sombrer dans la pure répétition si elle ne veut pas
lasser l'utilisateur ou le consommateur.
Aussi, l'innovation fait partie intégrante de la technique, innovation du point de vue des matériaux
utilisés, de leur résistance, innovation au sujet de la fonctionnalité, de l'apparence extérieure et esthétique, innovation des nuisances et
des pollutions que peut produire la technique.
Si il y a un domaine en perpétuelle évolution, c'est bien la technique qui emploi des
innovations en les reproduisant en série..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Peut-on donner raison a la technique ?
- Le progrès technique peut-il tenir lieu de morale ?
- La technique ne produit-elle pas des besoins au lieu de se contenter d'y répondre ?
- l'athéisme peut-il donner lieu à un comportement religieux ?
- La technique peut-elle tenir lieu de sagesse ?