La technique peut-elle changer la condition humaine ?
Extrait du document
«
Termes du sujet:
CHANGER: Modifier, transformer, rendre autre.
CONDITION (n.
f.) 1.
— Dans la proposition « si A alors B », A est condition de B ; se dit aussi du premier terme
d'une relation causale réelle (les conditions d'un phénomène).
2.
— Condition nécessaire et suffisante : A est
condition nécessaire et suffisante de B, si quand A on a toujours B et sans A jamais B.
3.
— Manière d'être, situation (la condition humaine), situation sociale.
4.
— Conditionné : a) Qui dépend d'une condition.
b) Qui a subi un conditionnement.
5.
— Conditionnement :
processus par lequel un comportement en vient à être déterminé par des conditions données ; modification d'un
comportement par établissement de réflexes conditionnés (cf.
réflexe).
6.
— Conditionnel : qui dépend d'une
condition ; pour QUINE, nom de l'implication matérielle.
TECHNIQUE
Tout ensemble de procédés pour produire un résultat utile.
La technique moderne s'appuie sur la science; mais elle
s'en distingue puisque la science est un effort pour expliquer ce qui existe tandis que la technique cherche à
produire ce qu'on souhaite qui soit — qui n'est pas.
La technique peut se définir comme un vouloir, incarné en un
pouvoir par l'intermédiaire d'un savoir.
Comme adjectif: par opposition à esthétique, qui concerne des procédés susceptibles d'être développés et transmis,
et non des dons ou capacités innées.
[Si l'on examine la possibilité d'un changement de la condition humaine, c'est que celle-ci n'est pas figée une fois
pour toutes, ce qui implique une mise en cause de la notion de nature humaine.]
Introduction
Aristote, pour souligner la nécessité de l'esclavage, ironise sur les conditions de sa disparition: on pourra se passer
d'esclave "le jour où les navettes tisseront toutes seules" - ce qui lui semblait impossible.
"Si chaque instrument était capable, sur une simple injonction, ou même pressentant ce qu'on va lui demander,
d'accomplir le travail qui lui est propre, (...) alors, ni les chefs d'artisans n'auraient besoin d'ouvriers, ni les maîtres
d'esclaves." Aristote, La Politique, 384-322 av.
J.-C.
Aristote envisage un état de la technique où le travail pourrait être fait par des machines.
N'est-ce pas en partie le
cas du monde moderne ? Mais à la différence des citoyens libres d'Athènes, les hommes d'aujourd'hui ont une
conception de la vie où le travail occupe une place essentielle.
Si les Grecs de l'Antiquité avaient disposé de moyens
techniques suffisants, il est fort probable qu'ils auraient conçu une société où les machines auraient remplacé les
esclaves (les outils).
La finalité du travail aurait eu dès lors un tout autre sens.
Aujourd'hui les navettes tissent toutes seules et l'esclavage n'existe heureusement plus.
Peut-on penser que la technique peut changer la condition humaine et pas seulement la condition d'une partie de
l'humanité ? Quel est l'impact moral du progrès technique sur l'homme ? L'empire et l'emprise de la technique ne
changent-elles pas profondément la nature humaine ? De l' "homo sapiens" à l' "homo faber" jusqu'à l'homme
technophile, quels changements dans l'essence même de l'homme et donc dans sa relation à lui-même, à autrui et à
la nature qui l'environne ?
1) Humanisation & technique.
La création et la conservation de l'outil est l'un des éléments qui indique et implique la rupture avec l'animalité.
La
main n'est « pas un outil, mais plusieurs » (Aristote, IVe siècle av.
J.C, Traité des Parties des animaux).
La main, a
écrit Kant (XVIIIe s.) signale chez l'homme le « congé définitif» que l'intelligence donne à l'instinct.
La main, organe doué d'expressivité.
Pensez aussi au caractère éminemment individuel de la main : empreintes
digitales, graphologie, lignes de la main, expressivité de la main du musicien, etc.
A la différence de l'animal, l'homme crée les moyens de son travail : les outils.
L'outil est une sorte de ruse de la
raison, qui se détourne provisoirement du but à atteindre, pour construire un moyen d'action efficace : fabriquer un
marteau, c'est différer d'enfoncer le clou...
pour l'enfoncer plus facilement.
Marx a repris à son compte la définition
de Franklin : l'homme, écrit-il, est un toolmaking animal, un « animal fabricateur d'outils » (Le Capital, 1867).
On dit
souvent, dans le même sens, que l'homo sapiens est d'abord un homo faber.
L'outil est un intermédiaire entre l'homme et la nature, il est un prolongement du corps anatomique.
A la différence
des animaux, les hommes ne sont plus tributaires de leur propre capacité organique.
Leur possibilité d'action sur la
nature se trouve ainsi considérablement agrandie.
Sans doute, l'usage d'outils est-il propre à des animaux.
Ainsi, par
exemple, les singes peuvent contre leurs ennemis, se servir de pierres ou prendre tout ce qu'ils peuvent trouver qui
a une force percutante.
Mais ces outils ne sot pas fabriqués, ils ne sont pas mis en réserve ou préparés.
Ils sont
fournis par la Nature et utilisés dans l'urgence du moment.
Certains hominidés sont aussi capables de fabriquer des
outils, d'emmancher deux bambous, par exemple.
Mais ces outils ne sont pas perfectionnés.
On peut affirmer que
l'outil qui existe à l'état rudimentaire chez les animaux devient un caractère distinctif de l'espèce humaine..
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