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La technique peut-elle améliorer l'homme ?

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« [Introduction] Conçue de façon classique, la technique a pour but, non de transformer l'homme, mais de faciliter ses tâches : de l'outil à la machine, elle lui assure un travail plus aisé, et une production plus importante.

Cependant, le développement moderne des techniques invite à en modifier la définition : en élaborant progressivement un univers artificiel dont l'homme ne peut plus se passer, en bousculant totalement l'ordre naturel, n'est-elle pas désormais en mesure de modifier, non seulement l'environnement, mais bien l'homme lui-même ? Se demander si la technique peut améliorer l'homme, c'est alors s'interroger nécessairement sur ses capacités dans un tel domaine, mais aussi sur ce qui pourrait être en mesure de contester ou d'interdire une telle amélioration.

Car, avant d'approuver cette dernière, il convient sans doute de se demander dans quel but elle pourrait être accomplie. [I.

Les possibilités de la technique moderne] Le développement des techniques a modifié le monde humain.

Non seulement en donnant à l'homme des possibilités d'action sans commune mesure avec ses propres forces physiques, qui se trouvent multipliées dans des proportions difficilement calculables, mais aussi en transformant son environnement. L'environnement humain est intégralement constitué par les résultats de la technique, que ce soit par la prolifération des constructions (de la hutte à la mégapole contemporaine), par le perfectionnement des moyens de transport, ou par la production d'une multitude d'objets qui sont quotidiennement utilisés.

Mais notre environnement est aussi composé, au-delà de ces manifestations « culturelles », par notre situation dans la nature.

Or, cette dernière se trouve elle-même transformée en profondeur par une technique dont les effets sont désormais planétaires : restructuration des paysages, modification éventuelle des climats, pollution industrielle, rupture des écosystèmes – depuis quelques dizaines d'années, l'actualité ne cesse de dénoncer les retombées négatives de notre activité technique, même si par ailleurs elle entonne les louanges de la technologie de pointe lorsqu'elle semble sans danger. Le développement récent des biotechnologies ajoute aux soucis écologiques de nouvelles interrogations : il est clair qu'avec la procréation assistée, le diagnostic prénatal, la possibilité d'intervenir médicalement ou chirurgicalement sur le foetus, s'ouvrent des perspectives totalement inédites, qui ne vont pas sans ambiguïté.

Les techniques médicales ont désormais la capacité d'intervenir sur les personnes elles-mêmes et sur ce qui les définit traditionnellement.

De tels aboutissements inaugurent-ils une ère radicalement neuve, dans laquelle l'homme pourrait être « amélioré» ? ou s'agit-il seulement d'une amplification de phénomènes déjà anciens ? [II.

Les améliorations déjà effectuées] D'un certain point de vue, on peut admettre que la technique a déjà amplement amélioré la vie de l'homme, y compris dans son aspect biologique.

L'amélioration de l'hygiène, le développement de la diététique, les victoires remportées sur quelques épidémies ou maladies endémiques ont par exemple allongé la moyenne de l'espérance de vie, mais aussi provoqué un accroissement de la taille, ou supprimé de nombreux risques de mortalité infantile. D'autre part, il est clair que les changements dans les conditions de la vie quotidienne ont produit des rythmes d'existence, des usages du temps qui n'ont plus rien de commun avec ce qu'ils furent il y a deux ou trois siècles (du moins dans les sociétés industriellement « développées »).

Ce faisant, c'est bien la mentalité globale qui change : l'individu s'habitue à profiter d'un temps de loisir, mais ses intérêts, ses sentiments, sa vision du monde se modifient aussi en fonction des loisirs qu'il privilégie. On sait combien de telles transformations des habitudes et des mentalités suscitent de discussions : certains applaudissent sans restriction les nouveaux mode de spectacle (télévision), d'autres les critiquent et montrent une nostalgie à l'égard des loisirs antérieurs (lecture), jugés plus « enrichissants » ou moins « abrutissants ».

Il en va désormais de même avec les modes de communication : on peut s'extasier sur l'ouverture à un savoir universel que propose Internet, ou juger au contraire que la navigation y prend beaucoup de temps pour le peu d'informations effectivement utiles qu'on en retire.

De même, l'usage des ordinateurs domestiques favorise le travail à domicile, et va développer un commerce ne nécessitant plus de déplacement hors de chez soi : faut-il s'en réjouir, en arguant que l'on aura davantage de temps à consacrer à la vie familiale, ou craindre, à la fois, un dépérissement des relations sociales et une confusion – en effet nouvelle – entre le temps du travail et le temps privé ? Dans de tels exemples, ce que certains considèrent comme une amélioration des conditions de vie est, d'un point de vue différent, considéré comme une détérioration de l'individualité et de ses conditions d'existence. Mais tout cela ne concerne encore que l'extérieur de l'individu.

Les choses sont évidemment plus graves lorsqu'on envisage d'« améliorer» l'homme dans sa vie biologique.. »

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