La technique est-elle un caractère essentiel de l'homme ?
Extrait du document
«
Introduction
La technique, à la différence de l'art, vise l'utilité qu'elle ne peut obtenir qu'au moyen d'une économie de moyens
et d'un maximum d'efficacité.
La réussite de la technique se mesure au degré d'efficacité des moyens mis en œuvre
pour accroître les capacités d'une machine, améliorer la gestion d'une entreprise, ou faciliter la maîtrise de l'homme
sur la nature.
Même si l'on pense qu'il n'y a pas de différence essentielle entre un radiateur électrique et un feu de
cheminée, puisque leur fonction est la même, il n'en reste pas moins que l'homme tend à s'affranchir de la nature, et
ce en concevant des moyens plus efficaces selon lui.
Mais le progrès technique ne représente-t-il pas un danger,
soit par rapport aux relations humaines, soit en fonction de la difficulté de contrôler les conséquences de ses
produits ?
I.
l'homme est un animal technique.
Descartes a montré que par la technique, l'homme devient comme « maître et possesseur de la nature ».
Il faut
d'ailleurs noter que les différents de l'histoire de l'humanité sont distingués par les évolutions de la technique qui
marquent la place de l'homme dans la nature à ce moment là.
La grande révolution serait la révolution cultureélevage, où l'homme commence à se substituer à la nature créatrice : il l'imite et la transforme.
L'élevage et la
culture nécessitent une connexion réglée de techniques diverses qui réclament une organisation sociale et qui
entrainent une division des taches.
On voit donc que l'homme, par la technique, humanise la nature mais également
que celles-ci accompagnent les progrès de la science.
Mais là où Descartes ne fait que comparer l'homme à un
maître pour la nature, un projet dit techniciste marque l'histoire de l'Occident, justement autour de cette notion de
progrès.
On peut parler d'épopée technique, de quête effrénée de la maîtrise et de la puissance, à la fois de la
maîtrise de la vie et de la puissance de la matière.
L'aventure prométhéenne de la technique depuis Descartes se
donne libre cours.
L'homme est lancé dans une course à la puissance, dans la domination et même l'asservissement
de la nature.
La science délivre le savoir, la technique offre le pouvoir, savoir et pouvoir se conjuguent dans un
vouloir qui sera celui de la maîtrise de la Nature.
Ce vouloir apparaît sous nos yeux objectivé dans l'omniprésence
des objets techniques et des machines, comme la libération d'une formidable volonté de puissance sur la Nature.
Ce
n'est plus ce qu'entrevoyait Descartes, un vouloir modéré et sage qui ne cherchait que « l'invention d'une infinité
d'artifice, qui feraient qu'on jouirait, sans aucune peine, des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s'y
trouvent, mais principalement aussi pour la santé, laquelle est sans doute le premier bien et le fondement de tous
les autres biens de cette vie ».
Il faut même dire qu'il y a un empire de la technique, puisque celle-ci est imbriquée
dans le champ économique et industriel et s'étend ainsi, à quasiment tous les domaines de la vie.
Il n'est plus
beaucoup de lieux où l'homme n'a pas encore été et où il n'a pas cherché à imprimer sa marque.
La technique nous
permet non seulement de nous faire une place dans la nature mais aussi de l'absorber dans le monde culturel.
a.
L'homme est « nu » au départ, et, selon le mythe du Protagoras, il dut s'emparer du feu et des « sciences
propres à conserver sa vie » (Platon, Protagoras).
C'est de là que provient la technique : elle fournit à l'homme les
moyens d'adaptation à un environnement qui peut lui être hostile (la nature).
Le terme « technique » vient du grec
« technè » qui se définit comme un savoir-faire dont le but est un comportement efficace et approprié aux
circonstances.
L'homme est ainsi défini comme étant un « homo faber » (l'homme fabricateur d'outils).
Et le fait de
fabriquer souligne pour Bergson l'intelligence humaine (L'évolution créatrice).
Aristote déjà montrait que la
« technè » est une « disposition tournée vers la création », et « accompagné
de raison », ce qui l'oppose aux animaux (cf.
Ethique à Nicomaque, VI, 4).
b.
L'outil sera ainsi la traduction matérielle de l'intelligence de l'homme :
« Ce n'est pas parce qu'il a des mains que l'homme est le plus intelligent des
êtres, mais c'est parce qu'il est le plus intelligent qu'il a des mains » (Aristote,
Les parties des animaux).
L'outil, ou l'objet conçu et fabriqué par l'homme
pour exécuter son travail, est considéré comme un prolongement naturel de la
main.
Mais la véritable innovation est la machine, puisqu'elle a un
fonctionnement autonome, et peut ainsi remplacer l'homme sur de
nombreuses tâches à accomplir.
Mais la machine, aussi « intelligente » soitelle, reste dépendante de l'homme : elle ne se fabrique ni ne se répare ellemême.
Alors la capacité de fabriquer des outils ou des machines apparaît, au
même titre que le langage, comme indissociable de l'humanité : « le progrès
technique est lié au progrès des symboles techniques du langage » (LeroiGourhan, Le geste et la parole).
On sait que les grands singes utilisent ce qui semble avoir une fonction
comparable à l'outil dans leur activité de chasse ou de protection contre les
prédateurs.
Par exemple, un chimpanzé est capable de se servir d'une
branche d'arbre qu'il aura pris soin d'effeuiller préalablement pour recueillir des
termites ou des fourmis au fond de leur trou.
De la même manière, un castor
est capable de fabriquer ce qui ressemble à nos barrages sur les rivières...
Pour Leroi-Gourhan, il y a une différence de nature et pas seulement de degré entre la capacité humaine à inventer
des outils et ce qui s'apparente plutôt chez l'animal à un simple détournement d'objet: " La fabrication et l'usage du
biface relèvent d'un mécanisme très différent, puisque les opérations de fabrication préexistent à l'occasion d'usage
et puisque l'outil persiste en vue d'actions ultérieures.
" Le biface, c'est la pierre taillée la plus primitive que l'on
connaisse en paléontologie.
Mais il révèle déjà une pensée et pas seulement un instinct.
Les opérations de
fabrication préexistent à l'usage de l'objet : autrement dit, l'homme fabrique d'abord le biface dans sa tête avant de.
»
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