La technique est-elle dangereuse ?
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«
THESE: La technique est inhumaine.
Elle représente un danger
Zola a plus d'une fois décrit la machine comme une sorte de monstre broyant sans relâche les vies de ceux qui la
servent.
Que l'on pense à Germinal par exemple.
Il n'est que de se référer aux premières chaînes de montage pour
comprendre en quoi la technique, à mesure qu'elle augmente la production, réduit l'homme à n'être qu'un automate
ignorant la finalité du geste qu'il répète à longueur de journée.
La division du travail qui s'est imposée avec le
développement de la grande industrie, et qui caractérise encore aujourd'hui nombre d'entreprises a vu son utilité
très vite contestée.
Des premières manufactures aux usines modernes, la division technique du travail s'est en effet accentuée jusqu'à
l'extrême parcellisation.
Tant que le travail est divisé en métiers différents, chaque homme de métier peut réaliser un
produit dans son ensemble, et même s'il existe une coopération, chacun est capable d'accomplir toutes les tâches
nécessaires à la réalisation du produit (au Moyen âge par exemple, la fin de l'apprentissage est symbolisée par la
réalisation d'un chef-d'oeuvre).
Avec les manufactures cette capacité à réaliser le produit en entier se perd et, dans
la grande industrie, avec le machinisme, elle disparaît totalement.
Au début du XX ième , Taylor invente « l'organisation scientifique du travail », qui vise à augmenter la productivité en
rationalisant le travail.
Le travail est divisé de telle sorte que chacun n'effectue plus qu'une parcelle de l'objet.
Le
travailleur répète toujours les mêmes gestes.
Aucune habilité de métier n'est plus nécessaire, les tâches simplifiées
peuvent être exécutées sans formation.
Ce qui entraîne pour l'ouvrier une activité dénuée de sens et ennuyeuse,
simple moyen de gagner sa vie.
L'idée d'aliénation semble particulièrement adéquate pour désigner ces phénomènes.
La « rationalisation » du travail, est critiquée comme déraisonnable d'un point de vue humain.
D'autre part, au nom de l'égalité entre les hommes, il est possible de reprocher à la rationalisation du travail
d'accentuer la division entre travail intellectuel et travail manuel et entre tâches de commandement et tâches
d'exécution.
En effet, l'organisation de la fabrication du produit doit être pensée entièrement à l'avance et la
production décomposée en un certain nombre de gestes : ce travail préalable de conception n'est pas le fait de
ceux qui exécuteront le travail.
De plus, l'exécution d'une tâche dépendant de l'exécution d'une autre, les rythmes
de production doivent être strictement respectés et donc contrôlés.
La technique aliène l'homme
C'est dans la phase initiale de sa pensée que Marx écrit : « Ce qui est animal
devient humain, ce qui est humain devient animal ».
Ce qui est humain, c'est le travail.
Or, dans les « Manuscrits de 1844 »,
encore marqués par l'influence de Hegel, si le travail est principiellement
formateur, sa forme contemporaine (le travail à la chaîne) devient aliénante,
abêtissante, inhumaine.
En clair, le travail de vient animal.
Les « Manuscrits » appartiennent à la phase initiale de la pensée du jeune
Marx.
Notre auteur n'y est pas encore en possession des principales
catégories de sa pensée.
Le matérialisme historique n'est pas parvenu à la
formulation qu'il acquerra dans la maturité.
D'une part, Marx s'y montre plus
proche d'une réflexion proprement politique, qui passera ensuite au second
plan (ou se verra réélaborée après les analyses économiques du « Capital »).
D'autre part, Marx y est encore tributaire d'une lecture essentialiste, moins
historienne que par la suite.
C'est ainsi qu'il prétend définir une essence du
travail qui se voit pervertie par les formes modernes de production.
Marx est alors très marqué par un passage de la « Phénoménologie de l'esprit
» de Hegel, la dialectique du maître & de l'esclave.
Dans ce mouvement, qui
fait suite à l'épisode de la lutte à mort pour la reconnaissance, Hegel montre
que la libération véritable de l'humanité ne vient pas du maître, qui ne domine
que symboliquement le monde, mais de l'esclave.
C'est par la discipline
qu'impose le travail que l'homme s'éduque et domine, réellement cette fois, la
matière.
Si le travail, qui est humain, devient animal, c'est tout d'abord que seul l ‘homme, au sens propre, travaille.
Certes,
certains animaux « fabriquent » ; castors, abeilles « construisent ».
Mais cette activité est instinctive, la règle de
construction est, si l'on veut, donnée par la nature.
Le travail spécifiquement humain est tout autre.
Comme le dit
Marx dans le « Capital » :
« Ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais architecte de l'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la cellule.
»
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