La sensation est-elle source de science?
Extrait du document
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Analyse du sujet :
·
Trois éléments doivent être pris en compte : la sensation, la science, et leur relation, "source de".
·
Etre la source peut désigner être au principe de, selon le sens du commencement (la science
commence avec la sensation) ou du commandement (la science est fondée sur la sensation).
Dans le premier
cas, la sensation est simple origine, dans le second elle est une justification.
·
La sensation : rapport de passivité à l'égard d'une extériorité ou d'un donné (se distingue ainsi de la
perception qui indique une certaine construction du donné).
Comme expérience d'une extériorité, la sensation
se distingue du sentiment (expérience de ce qu'on ressent, donc qui porte sur son intériorité).
Dans la
sensation, l'extériorité est donnée telle quelle, sans reflexion.
La sensation est toujours expérience de
quelque chose de particulier (on fait l'expérience de ceci ou cela).
La sensation se distingue également de
l'intuition intellectuelle, on la désigne ainsi parfois comme "intuition empirique" (par exemple Kant).
L'intuition
intellectuelle est une "vue de l'esprit" (inspectio mentis) selon l'expression de Descartes.
·
La science : une connaissance vraie et justifiée, qui implique une certaine généralité (ou
universalité) et une nécessité, donc des lois.
On peut distinguer différents types de savoirs selon les objets,
ou bien admettre que l'unité de la science est l'unité d'une méthode (la même science s'appliquerait alors à
tous les objets).
Avoir la science de quelque chose suppose d'avoir une idée vraie de cette chose.
La
science est donc une expérience d'idées d'un certain type.
·
Le sujet nous demande si la sensation est source de science, mais pas si c'est la seule source.
Il
faut donc s'interroger sur d'autres sources possibles : la réflexion, la démonstration, l'intuition etc.
Il faudra
ainsi chercher ce qui, dans la sensation, peut s'oppose à ce qu'elle soit source de science, mais aussi, dans
la science, ce qui requiert que la sensation en soit à la source.
On pourra ainsi déterminer le problème.
Problématique
La science est un certain état de l'âme ou du sujet qui se caractérise par la possession de propositions vraies et
justifiées, universelles et nécessaires.
De ce point de vue, la science ne paraît pas présupposer la notion de
sensation mais uniquement celle d'un donné qui constitue le contenu de ces propositions.
Or, ce donné peut être
fondé sur une intuition non empirique (qui ne fait pas intervenir l'un des cinq sens), laquelle peut seule être source
de science.
En effet, la sensation est changeante et relative, en sorte qu'elle ne peut qu'être source de croyance.
Néanmoins, l'intuition doit pouvoir être distingée de l'imagination, et la question se pose de sa validité au delà du
sujet.
En effet, l'objectivité qui caractérise la science requiert une intersubjectivité qui elle, suppose une sensation
partageable.
En outre, l'intuition doit elle-même pouvoir reposer sur un élément de sensation, si l'on admet que le
monde sensible peut être objet de connaissance, et si la notion d'expérience doit avoir un sens.
Enfin, l'intuition
elle-même paraît requérir l'expérience au moins comme commencement, dès lors que l'intuition repose sur une
abstraction.
Le problème est donc le suivant : la sensation ne semble pas permettre de fonder la science, et
néanmoins, elle est requise pour sa construction.
Proposition de plan
1.
La science ne peut ni se fonder, ni être à l'origine de la science, laquelle commence dès lors qu'on exclut
la sensation.
·
On peut tout d'abord montrer avec Platon (Théétète 151-152) que la sensation ne peut être source
de science.
En en s'inspirant de Protagoras, Théétète répond à Socrate à la question de savoir ce qu'est la
science : "la science n'est autre chose que la sensation » car celui qui sait ce qu'est une chose la sent".
Pour Protagoras : l'homme est la mesure de toute chose « de l'existence de celles qui existent et de la non
existence de celles qui n'existent pas ».
Telle une chose m'apparaît, telle elle est pour moi, telle elle
t'apparaît, telle elle est pour toi.
Dès lors, apparence et sensation sont la même chose, la science a ainsi
toujours un objet réel et n'est pas digne d'erreur.
Ce relativisme conduit au scepticisme.
En effet, il n'y a
alors pas de possibilité de fonder une science unique.
Platon répond (Théétète 184-185) en réfutant
l'empirisme : les données sensibles sont par elles-mêmes éparpillées et nécessitent une activité intellectuelle
pour en faire une connaissance.
Les sensations ne sont pas en nous comme « en des chevaux de bois ».
Il y
a une forme unique (ou âme) en laquelle toutes convergent, usant ainsi de ces sensations comme des
instruments pour voir des objets.
La pensée peut concevoir une chose qui relève de deux canaux perceptifs
différents, ou une « perception commune » : ex.
la notion d'être relativement à un son et une couleur, la
ressemblance / dissemblance, identité / différence, les nombres, la quantité, pair / impair.
« Les communs
n'ont point, comme les sensibles, d'organe propre ».
C'est l'âme qui fait cet examen des communs.
·
En outre, la sensation doit être écartée pour accéder à la science.
C'est l'exemple du doute
méthodique de Descartes.
En effet (Méditations I) : les sens m'ont parfois trompés il peuvent donc me
tromper à nouveau.
On ne peut donc fonder la science sur les sens.
Dans les Règles pour la direction de
l'esprit (règle 3), il est question de l'intuitus mentis (intuition de l'esprit) expliqué par la comparaison avec la
vision.
La connaissance vraie se caractérise par le rejet du doute (règle 2 : « toute science est une
connaissance certaine et évidente »).
Contre les scolastiques (pour lesquels seuls les purs esprits sont
doués d'intuition intellectuelle), Descartes pose que tout raisonnement est une enchaînement de
« conceptions pures » ou intuitus.
Il y a deux manière de connaître sans erreur : la déduction et l'intuition.
Intuition = non pas témoignage changeant des sens ou jugement trompeur d'une imagination qui compose
mal son objet mais « conception d'un esprit pur et attentif, conception si facile et si distincte qu'aucun
doute ne reste sur ce que nous comprenons ».
Ou encore : conception ferme d'un esprit pur et attentif qui.
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