La science s’oppose- t-elle au sens commun ?
Publié le 20/03/2024
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«
LA SCIENCE
La science s’oppose- t-elle au sens commun ?
Pour connaître le monde qui nous entoure, nous nous fondons sur l’observation
et l’expérience quotidiennes.
Cette connaissance de la réalité est utile mais
insuffisante et parfois trompeuse.
Afin de remédier aux insuffisances du sens commun, la science est la recherche
rigoureuse et méthodique des lois qui gouvernent la pensée (pour ce qui est des
sciences formelles comme la logique ou les mathématiques) et les
phénomènes naturels (pour ce qui est des sciences naturelles comme la
physique ou la biologie).
Cette recherche semble parfois s’appuyer sur les intuitions du sens commun pour
les approfondir mais elle exige aussi de rompre avec les acquis de l’expérience
quotidienne.
La science peut-elle se fonder, en partie, sur le sens commun ou bien ne peutelle exister qu’en rompant radicalement avec lui ?
Wittgenstein (polycopié) explique que la quasi-totalité de nos certitudes ne
relèvent pas ni du sens commun ni du résultat des recherches scientifiques
mais de la confiance que nous accordons à certaines autorités scientifiques.
Le sens commun n’est pas ce à quoi la science s’oppose mais ce qu’elle
contribue à former lorsque les résultats se répandent sous la forme de
représentations collectives admises sans démonstration.
Le sens commun ne
précède donc pas la recherche scientifique ; il évolue avec elle en retenant
seulement ses conclusions.
Toutefois, dans son fondement même, la recherche scientifique exige une
séparation nette et franche vis à vis de l’opinion ainsi que des manières de
penser la réalité comme le soutient Gaston Bachelard (page 347).
En effet, la
manière de penser du sens commun n’est pas scientifique.
Le sens commun est
donc un obstacle épistémologique cad un facteur qui empêche le savoir de se
constituer.
Faire de la science revient à se débarrasser des manières non scientifiques
d’appréhender le réel.
Qu’est-ce qu’une connaissance scientifique ?
Certaines démarches de connaissance constituent une forme de savoir alors
qu’elles ne sont pas scientifiques : c’est le cas de l’expérience accumulée au
cours de son existence.
Il importe alors de déterminer ce qui garantit la
scientificité d’une recherche ou d’une théorie afin de pouvoir distinguer ce qui
est scientifique et ce qui ne l’est pas.
Peut-on reconnaître le savoir scientifique à la qualité de ses résultats ou bien
s’agit-il plutôt d’une spécificité relative à la méthode permettant d’atteindre ces
résultats ?
Claude Bernard (polycopié) détermine la spécificité de la démarche
scientifique en distinguant la recherche scientifique de la simple observation.
Tandis que l’observateur non scientifique est simplement celui qui regarde
passivement les phénomènes, le scientifique n’observe un phénomène que dans
les conditions dont il a lui-même choisi les paramètres.
Le propre de la science
est donc l’expérimentation.
Le scientifique isole le phénomène qu’il souhaite
étudier dans un cadre de recherche qui permet de faire varier les paramètres
susceptibles d’influencer la mesure du phénomène en question.
Schèma.
Mais la science ne se distingue pas des autres formes de connaissance
uniquement du point de vue de la méthode expérimentale, elle s’en différencie
du point de vue du type des connaissances produites et de la manière dont elle
les met à l’épreuve.
Karl Popper (page 351) montre ainsi que le raisonnement inductif ne peut
être considéré comme fiable : le nombre de cas qui confirment ou infirment
une hypothèse ne peut suffire à la qualifier de scientifique.
Une hypothèse est
nécessairement partielle donc falsifiable.
Par conséquent, une théorie
scientifique doit pouvoir être assujettie à des tests expérimentaux
susceptibles de la réfuter.
C’est imaginer une expérience qui puisse le cas
échéant en montrer son invalidité.
La preuve de sa robustesse est
proportionnée à sa résistance face à ces tests d’invalidation.
La science doit offrir
une perspective de remise en cause pour prétendre à la scientificité ; elle ne peut
avoir réponse à tout.
Ainsi, Popper critique la conception selon laquelle les
connaissances scientifiques seraient des certitudes absolues, laissant imaginer
que la vérité pourrait être définitive.
Ce critère de falsifiabilité est le critère essentiel entre les sciences et les pseudosciences.
Par exemple, la psychanalyse freudienne qui s’appuie sur l’hypothèse
suivante : pensées et comportements sont sous l’influence de pulsions
inconscientes.
Popper nous explique qu’une hypothèse interprétative doit
s’organiser autour d’une méthode et être mise à l’épreuve pour prétendre à
l’objectivité.
La connaissance de l’absolu est donc une illusion.
Si l’expérience sensible est
nécessaire, elle n’est pas suffisante.
Elle requiert elle-même une construction
intellectuelle.
En effet, l’expérience scientifique est une expérimentation qui ne
donne de réponses qu’aux questions que l’Homme pose à la nature.
Elle est une
construction qui ne permet pas d’avoir une connaissance de l’absolu.
Pour Kant (page 353), le centre de la connaissance est le sujet connaissant et
non une réalité extérieure.
En effet, ce n’est pas l’objet qui oblige le sujet à se
conformer à ses règles mais bien le sujet qui donne les siennes à l’objet pour le
connaître.
Ainsi, les sources de la connaissance sont avant tout dans la raison.
De ce fait, la manière dont nous connaissons le monde est-elle dépendante de la
forme de notre esprit ou bien, la connaissance peut-elle restituer son objet
d’étude tel qu’il est, indépendamment de notre esprit ?
La science est-elle une connaissance objective du réel ?
Le savoir scientifique se constitue par des expérimentations qui permettent de
dégager des lois des phénomènes et d’accéder à une connaissance objective de
la réalité.
Pourtant, les théories scientifiques ne cessent d’évoluer et il semble
impossible d’établir une vérité scientifique définitive.
Cette absence de certitude est-elle due au développement insuffisant de la
science ou bien à la constitution même de la réalité qui ne saurait faire l’objet
d’une connaissance parfaitement objective ?
On pourrait penser que la science, en recourant à des concepts simplifiant la
réalité, ne produit pas une connaissance objective de celle-ci.
Pourtant, c’est
grâce à une simplification conceptuelle que Darwin (à lire seulement,
polycopié) a réussi à établir la théorie de l’évolution.
Le concept d’espèce s’est
révélé immuable même s’il fige une réalité naturelle qui n’est pas immuable.
Par ailleurs, on peut aller jusqu’à se demander si, en cherchant l’objectivité à
tout prix, la science ne passe pas à côté d’une dimension fondamentale de la
connaissance.
C’est en tout cas l’idée que défend Merleau-Ponty (page 358
texte 16).
Selon lui, la science se rend incapable de connaître la dimension la
plus essentielle de la réalité : l’existence subjective.
Merleau-Ponty pense la relation à autrui comme fondamentale au sens où elle
précède toute connaissance.
Avant toute objectivité scientifique se trouve la
perception de mon corps, que ma conscience habite avec sa subjectivité.
Ce
corps « propre » ne peut pas faire l’objet d’une étude scientifique.
Le monde
vécu n’est pas objectif : c’est un monde que nous partageons avec d’autres
sujets donc un monde intersubjectif.
Certaines sciences ont pourtant prétendu rendre compte de cette dimension
humaine de la réalité.
C’est la raison pour laquelle on entend séparer les
sciences de la nature des sciences humaines, ces dernières s’efforçant de
comprendre le sujet humain.
Même si la réalité humaine est complexe, on peut se fonder....
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