La science n'est-elle qu'une croyance argumentée ?
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«
La connaissance scientifique est une connaissance vraie dont le discours est adéquat à la réalité sur laquelle il
porte, que cette vérité soit matérielle (la réalité existe indépendamment de l'esprit, comme c'est le cas des sciences
de la nature) ou que cette vérité soit formelle (réalité n'a pas d'autre existence qu'à l'intérieur de l'esprit humain,
comme c'est le cas des vérités logiques).
Or le sujet vous demande si cette connaissance vraie peut être assimilée
à une croyance, c'est à dire fait intervenir l'adhésion de l'esprit à une idée ou un discours qui s'explique
essentiellement par des raisons particulières et subjectives.
Car il importe ici de bien faire la différence entre le
savoir et la croyance, le savoir étant fondé sur des raison objectives et universelles, tandis que la croyance
renvoyant à un élément beaucoup plus subjectif.
On pourrait donc penser que la croyance est éloignée du savoir
scientifique.
Mais si cette croyance est argumentée, n'est-on pas plutôt en présence d'un savoir et d'une véritable
connaissance ? L'argumentation renvoie à la capacité à rendre raison d'un discours par l'exposé des éléments qui
peuvent déterminer notre adhésion.
Reste à savoir quelle est la nature de ces arguments...
Si ce sont des
arguments spécieux et rhétoriques, alors l'adhésion argumentée est alors une adhésion forcée qui suppose la
domination (pensez à l'habileté des sophistes), mais si ces arguments sont découverts par la raison, alors il est
possible de penser l'argumentation comme un processus par lequel la rationalité d'un énoncé est présenté de façon
objective.
Il faut donc que l'argumentation scientifique ne soit pas une argumentation qui dépend seule de l'individu.
Les hypothèses scientifiques sont chargées de croyances
La connaissance immédiate, préscientifique n'est pas une connaissance objective.
Elle est au contraire chargée de
subjectivité car nous nous projetons inconsciemment sur le monde.
« Je vois le monde comme je suis avant de le
voir comme il est », disait Paul Éluard, cité par Bachelard.
Le monde de la connaissance immédiate coloré et divers,
bruyant, pittoresque est « notre représentation ».
Il sourit de nos joies et grimace de nos angoisses.
Le spectacle
de la flamme aux formes bizarre aux couleurs éclatantes, à la morsure cruelle ne nous dit pas ce
La science, écrit Gaston Bachelard, « crée de la philosophie ».
Elle représente en effet la pensée vivante,
dynamique.
Elle « instruit la raison » car la raison ne s'apparaît à elle même telle qu'elle est et telle qu'elle devient,
que dans son activité réelle, actuelle, qui est l'activité scientifique.
Le problème est alors de savoir quelle
philosophie de la connaissance la science peut suggérer.
A l'époque où écrit Bachelard les avis divergent.
Émile
Meyerson pense que la science accrédite avant tout un réalisme : « Les concepts créés par la science tels l'atome,
la masse ou l'énergie...
sont...
des choses...
participant au caractère de la chose en soi.
» Pour Brunschvicg, la
science qui substitue à l'épaisseur énigmatique du monde un réseau translucide de relations mathématiques,
justifierait plutôt l'idéalisme.
Ne transforme t elle pas la matière en idées, en formules algébriques transparentes pour
l'esprit? Pour Bergson et ses disciples, comme Édouard Le Roy, la science représente un ensemble de conventions
commodes mais artificielles qui permettent plutôt de manipuler le monde que de le comprendre.
Merleau Ponty, plus
proche de Bergson qu'il ne pense, écrit dans cet esprit que « la science
manipule les choses et renonce à les habiter », C'est là une interprétation
nominaliste de la science.
La philosophie de Bachelard n'est pas une réflexion
à posteriori sur la science déjà faite.
Elle veut tirer des enseignements du
travail lui même, de la science en train de se faire.
C'est pourquoi elle
apparaît plus complexe et plus nuancée.
Elle ne saurait être unilatérale et
retient quelque chose tout à la fois du réalisme, de l'idéalisme, du
nominalisme.
qu'est vraiment une combustion.
Il ne nous parle que de nous-mêmes, sollicite
nos rêveries, réveille et nourrit nos désirs inconscients.
Il tourne le dos à la
connaissance objective.
L'édification de la science exigera que nous «
psychanalysions » cette connaissance immédiate qui n'est que notre
représentation.
Pour parvenir au savoir scientifique il sera indispensable
d'éliminer de la connaissance les projections psychologiques spontanées et
inconscientes, d'opérer une psychanalyse de la connaissance.
Devant le
monde des choses nous devons « arrêter toutes les expansions, nous devons
brimer notre personne ».
Le monde qui est notre représentation c'est le
monde subjectif du poète, aux antipodes du monde objectif du savant : « Les
axes de la poésie et de la science sont inverses ».
Bachelard dans ses
ouvrages poétiques Psychanalyse du feu, L'eau et les rêves, etc., explore ce
monde subjectif.
Dans ses ouvrages d'épistémologie, il lui tourne le dos.
L'expression : « le monde est notre représentation » qui définit le
subjectivisme involontaire de la connaissance immédiate est empruntée, semble t il, au titre du célèbre ouvrage de
Schopenhauer Le monde comme volonté et comme représentation..
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