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La Rochefoucauld a dit : « Il est plus nécessaire d'étudier les hommes que les livres. » Qu'en pensez-vous ?

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« La Rochefoucauld a dit : « Il est plus nécessaire d'étudier les hommes que les livres.

» Qu'en pensez-vous ? I.

— INTRODUCTION. D'ordinaire, la culture s'acquiert par la lecture.

Or, pour La Rochefoucauld, cette forme de culture s'avère moins profitable que l'expérience directe acquise au contact des hommes.

C'est pourquoi il écrit : « Il est plus nécessaire d'étudier les hommes que les livres.

» II.

— ANALYSE CRITIQUE ET EXPLICATION. a) L'expression : « Il est plus nécessaire » reste assez vague.

Nécessaire à quoi, peut-on se demander ? Pour réussir dans le monde, sous-entend sans doute, La Rochefoucauld ! Cette précision semble utile puisque, pour certains travaux philosophiques, l'étude des livres, tout en s'accompagnant de celle des hommes se révèle bien plus importante et exige du philosophe davantage d'heures de travail.

Le professeur de psychologie trouve beaucoup plus la matière de ses cours dans les livres que dans la rue, les salons ou même la salle de classe. b) Le verbe « étudier » demande aussi réflexion.

Étudier un objet, une chose, consiste à appliquer son esprit à mieux le connaître et le comprendre.

A remarquer que La Rochefoucauld parle de l'étude des hommes et non d'un homme particulier.

Il ne faut plus, dés lors, s'attendre à ce qu'elle revête l'exactitude scientifique ou la rigueur mathématique puisqu'elle s'applique à la connaissance de l'homme en général.

Mais l'auteur pense davantage à l'homme de société ou du monde qu'au psychologue ou au philosophe. Cependant, on ne peut nier l'importance du rôle des livres pour la connaissance de l'homme en général.

S'en priver, c'est se condamner à ne connaître que superficiellement les hommes. e) Enfin, un dernier point de la pensée retient l'attention : a étudier les livres.

» En fait, on étudie dans les livres et non les livres euxmêmes.

Dans les livres, on étudie quelque chose d'autre que les livres. Et puis, demandons-nous quels sont les livres dont l'étude doit passer après celle des hommes ? Le lecteur d'aujourd'hui penserait volontiers aux livres de psychologie.

Mais, ils n'existaient pas encore du temps de La Rochefoucauld. Ajoutons qu'il existe des livres également nécessaires à l'acquisition de cette science qu'est l'étude directe des hommes. III.

— CE QU'IL FAUT EN PENSER. La Rochefoucauld accorde la primauté à l'étude directe des hommes sur celle de la matière contenue dans les livres.

Sa pensée peut, en définitive se formuler : Il est plus nécessaire à celui qui veut connaître l'homme, d'observer directement les hommes eux-mêmes que de chercher son information dans les livres qui parlent des hommes.

Examinons les résultats obtenus selon que l'on accorde la primauté à l'étude directe ou aux livres. A) Primauté de l'étude directe. Dans ce cas, l'étude directe des hommes n'est autre que l'observation minutieuse de leur comportement et de leurs réactions dans les différents milieux où ils évoluent.

Mais, l'étude efficace des autres dépend de celle de soi-même comme le veut Socrate. Nos idées les plus solides émanent de notre expérience du réel.

Or, dans ce domaine, il n'y a de réels que des individus.

Aucune étude psychologique acquise dans les livres ne vaut l'étude directe de l'homme.

Cette dernière apparaît même d'une nécessité absolue à qui entend parler objectivement de l'homme. Pour connaître l'homme, il ne suffit nullement de savoir ce qu'en disent les livres.

Les connaissances que les hommes acquièrent de leurs semblables s'additionnent, s'organisent à mesure que leurs contacts se multiplient et qu'ils s'observent. Accordons alors à La Rochefoucauld que pour bien connaître l'homme, l'étude directe et attentive de l'homme lui-même est primordiale. Rien d'étonnant d'ailleurs que La Rochefoucauld préfère l'étude directe de l'homme.

N'oublions pas que ce ci-devant Prince de Marcillac a été fils d'un Duc et Pair de France, tant homme de société que de « brigues et d'intrigues », qu'il a fréquenté aussi assidûment la Cour que les salons les plus célèbres de son époque où, grâce à sa conversation subtile et charmante, il a tenu un rôle de premier plan. B) Primauté du livre. Le savoir humain se trouve consigné dans les livres.

Quand nous étudions les hommes qui se présentent à nous, notre savoir d'origine livresque nous permet de les comprendre et de déceler ce qu'ils offrent de significatif.

Nous pouvons même aller jusqu'à affirmer que les connaissances puisées dans les livres demeurent nécessaires, pour ne pas dire indispensables à l'étude directe des hommes. A la connaissance des hommes et de l'homme, s'applique ce que J.

Guéhénno dit de la culture générale dans son livre : Sur le Chemin des Hommes.

a Une culture est un vaste système de références littéraires, scientifiques, morales, politiques...

Celui qui dispose du plus grand nombre n'est pas nécessairement le plus cultivé.

La sèche connaissance ne suffit pas.

Quiconque a pris l'habitude de ces références au point qu'à tout instant, elles s'imposent à lui, est sûrement devenu un autre homme.

Il est le plus humain qui soit possible, vivant dans une sorte de familiarité avec tous les hommes qui ont vécu, rêvé, espéré avant lui et pour lui, essayé les pensées qu'il essaie à son tour.

Sur le chemin, il se sent poussé par une longue procession d'ombres.

» C) Complémentarité des deux études. En réalité, il existe un va-et-vient constant entre la réalité que révèlent l'étude des livres et celle des hommes.

En lisant un livre parlant des hommes, je me réfère sans cesse à ceux que j'observe journellement autour de moi.

Grâce à cette référence, je conclus que l'auteur du livre possède une vue exacte de ses semblables, qu'il les analyse finement ou que son analyse est inexacte ou exagérée. D'autre part, le spectacle bien observé de la comédie humaine évoque à l'esprit de celui qui a beaucoup lu, des souvenirs qui complètent son observation.

Sans ceux-là, celle-ci serait d'une pauvreté extrême.

Pour bien voir ce qui mérite d'être vu, il faut d'abord savoir.

Cette science s'acquiert essentiellement dans les livres.

Mais, si l'on a en vue, comme La Rochefoucauld, la vie mondaine et le succès dans les relations sociales, l'observation directe des hommes passe au premier plan.. »

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