La religion comme source d'une consolation infantilisante ?
Extrait du document
«
Penser la religion à travers sa dimension communautaire permet de la désigner, non pas d'abord à partir de la
croyance, mais comme une pratique visant au respect d'un ensemble de règles établies soit pour la célébration d'un
culte (on parlera alors de rite religieux), soit pour l'édification d'une morale (l'exemple des dix commandements met
en évidence la racine commune entre religare et obligare qui donne obligation, devoir ou norme impérative).
Si l'on en croît Pascal, c'est d'ailleurs par la pratique que commence la croyance : la coutume, c'est-à-dire
l'habitude d'une pratique quelconque conduit à la croyance de sorte que si certains pratiquent sans croire
véritablement et que d'autres disent croire sans jamais pratiquer, il faut ajouter que la pratique religieuse fait la
croyance religieuse.
Mais les raisons de croire s'arrêtent-elles à la seule accoutumance ? Sans doute pas tant la
croyance religieuse permet à l'homme de donner des réponses aux questions pour lesquelles, rationnellement, il n'en
trouve pas.
D'où venons-nous ? Où irons-nous après la mort ? Quel est le sens de notre existence ? Autant de
questions qui offrent la possibilité de mieux cerner la nature de la croyance : nous croyons parce que nous ne
savons pas.
Croire et savoir ne se recoupent pas de sorte que si vérités religieuses il y a (sur Dieu, sur l'immortalité
de l'âme...), on doit dire qu'elle est vérité crue et non pas sue.
D'où la possible suspicion que l'on peut entretenir à
l'égard de la religion : elle nous maintiendrait dans l'illusion, s'opposant au progrès du savoir, en nous racontant des
histoires.
Dans L'avenir d'une illusion, Freud insiste sur cette faiblesse des hommes qui « pensent ne pas pouvoir
supporter la vie s'ils n'accordent pas à ces représentations [religieuses] la valeur qui est revendiquées pour elles.
»
Mais il ajoute que « l'homme ne peut pas éternellement demeurer un enfant ».
La religion ne prospère pas
simplement sur le terrain de l'infantilisme de l'homme qui a besoin d'être rassuré et consolé ; elle contribue largement
à cette infantilisation dont l'humanité, selon Freud, doit désormais se défaire.
CRITIQUE DE L'ILLUSION RELIGIEUSE.
A)
La religion comme aliénation de l'essence humaine.
La religion s'enracine dans le sentiment du sacré.
Mais dans la société moderne, depuis le triomphe de la bourgeoisie, il semble que ce
sentiment du sacré se soit évanoui ou ait été perverti.
Feuerbach est l'un des premiers philosophes à avoir pris toute la mesure du caractère
profane de notre société.
Il reconnaît que les hommes se sont si bien « appropriés » « le vrai », « l'humain » et « l'antisacré » que le
« christianisme a perdu toute force de résistance ».
Le christianisme, écrit-il, « est nié », « nié dans l'esprit et le coeur, dans la science et la vie,
dans l'art et l'industrie, radicalement, sans appel ni retour » : « L'incroyance a remplacé la foi, la raison la Bible, la politique la religion et l'Eglise, la
terre a remplacé le ciel, le travail la prière, la misère matérielle l'enfer, l'homme a remplacé le chrétien ».
Et, ajoute Feuerbach, « si dans la pratique
l'homme a remplacé le chrétien, il faut alors que dans la théorie aussi l'être humain remplace l'être divin ».
Ce qui signifie que la philosophie doit
cesser d'être « théologie » pour devenir « anthropologie ».
Dans « L'essence du christianisme », Feuerbach montre que, dans la religion,
l'homme est aliéné, cad dépossédé de lui-même, de sa propre essence.
La religion n'est jamais que le mystère de l'homme fait Dieu.
Autrement dit,
ce ne sont jamais que ses propres perfections et ses propres attributs que l'homme adore en Dieu.
L'homme s'est ainsi dépouillé de son être pour
l'attribuer à une réalité étrangère, Dieu : « Pour enrichir Dieu, l'homme doit s'appauvrir ; pour que Dieu soit tout, l'homme doit n'être rien »
(« L'essence du christianisme ») La religion est « la première conscience de soi de l'homme, mais elle est indirecte ».
En elle, l'homme « a pour
objet son propre être sous forme d'un autre être ».
La religion chrétienne est « la relation de l'homme à lui-même, ou plus exactement à son
essence, mais à son essence comme à un autre être ».
Aussi la tâche de la philosophie est-elle de faire reconnaître à l'homme sa propre essence au
lieu qu'il adore en un autre être, nommé Dieu.
Pour Feuerbach, il y a du divin, car le savoir ou l'amour sont choses divines mais il n'y a pas de
Dieu.
Il peut donc exister une religion sans Dieu.
Le véritable athée est seulement « celui pour lequel les prédicats de l'être divin, comme par exemple l'amour, la sagesse, la justice, ne sont
rien, et non pas celui pour lequel seul le sujet de ces prédicats n'est rien ».
Il ne suffit donc pas de nier l'existence de Dieu ou « le sujet de ces
prédicats » pou être athée, il se propose seulement de renverser la théologie en intervertissant le sujet et le prédicat : au lieu de dire « Dieu est
sage et bon », il dit « l'homme est sage et bon ».
Feuerbach substitue donc à la religion de Dieu celle de l'homme.
Autrement dit, l'homme doit
adorer en lui-même les qualités qu'aucun individu ne peut sans doute réaliser entièrement, mais qui sont cependant celles de l'espèce humaine.
Réaliser l'essence humaine est l'affaire de la politique.
Cette finalité est en son fond religieuse, puisqu'il s'agit d'actualiser tout ce qu'il y a de
possibilité divine en l'homme : « Il nous faut redevenir religieux, il faut que la politique devienne notre religion.
B)
La religion comme expression fantastique de l'aliénation économique de l'homme.
Si Marx reconnaît avec Feuerbach que la critique de la religion est la présupposition de toute critique, il
reproche toutefois à ce dernier sa conception abstraite de l'homme.
Feuerbach manque la réalité de l'homme
concret.
L'homme doit être conçu dans son existence réelle.
L4homme pour Marx, n'est pas « une essence
abstraite, blottie hors du mode ».
L'homme , c'est avant tout « le monde des hommes », « l'Etat », « la
société » : « Feuerbach résout l'essence religieuse en essence humaine.
Mais l'essence de l'homme n'est pas
une abstraction inhérente à l'individu isolé.
Dans sa réalité, elle est l'ensemble des rapports sociaux » (« Thèse
VI sur Feuerbach »).
C'est pourquoi Feuerbach « ne voit pas que l'esprit religieux est lui-même un produit
social »..
»
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