La recherche du bonheur est-elle un idéal égoïste ?
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Cadrer la problématique:
La question renvoie à un des plus anciens débats de la philosophie morale: que faire de l'aspiration au bonheur ? Il
semble d'un côté que nul ne puisse souhaiter mieux ni même autre chose que d'être heureux.
La sagesse grecque
propose l'idéal de l'eudaimonia, la vie heureuse, réussie.
Mais l'identification fréquente du bonheur et du plaisir rend
le bonheur suspect aux moralistes; on le soupçonne de faire la part trop belle à la chair au détriment de l'esprit.
Le
christianisme contribue également à suspecter le bonheur comme idéal terrestre détournant l'âme de la recherche de
son salut.
"Un idéal égoïste"
L'idéal est ce qui donne sens à la vie; c'est une idée qui oriente l'action.
Un idéal égoïste serait d'une
part, une orientation qui me centre sur moi-même, qui me rend particulièrement attentif à moi-même, et
d'autre part, une orientation qui me coupe d'autrui, qui me détourne de ce que je dois à autrui.
Selon les
traditions, l'égoïsme moralement condamnable peut ne concerner que le deuxième aspect ou également le
premier: pour Pascal, "le moi est haïssable" et, pour pouvoir me tourner vers Dieu, je dois abandonner tout
souci de moi-même.
Mais Freud fait valoir qu'un minimum d'amour de soi est nécessaire pour pouvoir
goûter à la vie.
"La recherche du bonheur"
Il faudra analyser avec soin l'expression tout entière et ne pas oublier que la question ne porte pas sur le
bonheur lui-même mais sur sa recherche, ce qui peut changer bien des choses.
rechercher le bonheur,
est-ce en effet poursuivre un objectif bien déterminé, ou chercher en même temps le sens du bonheur,
quitte à le découvrir dans une activité désintéressée et tournée vers autrui ?
On pourra également penser au fait que la recherche du bonheur, "pursuit of happiness" est considérée
par le Préambule de la Constitution des Etats-Unis comme une des valeurs fondamentales que L'État doit
défendre.
L'État peut-il avoir intérêt à défendre l'égoïsme individualiste ? Ou doit-on dire qu'avoir la liberté
de rechercher son bonheur comme on l'entend rend disponible pour les autres ?
Tout dépendra donc de la façon dont on remplira la recherche, de la compréhension du bonheur qui s'y
formera progressivement.
Mobiliser des références:
* Il sera bon de consulter les sagesses grecques, particulièrement le stoïcisme et l'épicurisme, mais aussi l'éthique
d'Aristote: toutes placent le bonheur à l'horizon de la vie, en proposant des fils directeurs différents: la conformité à
la nature et la liberté pour les stoïciens, le plaisir pour les épicuriens, l'harmonie politique pour Aristote.
Tous
construisent une dialectique plus ou moins naturelle entre la recherche d'un bonheur personnel et le développement
de l'amitié.
* Kant se montre très méfiant à l'égard de la notion de recherche du bonheur, qui est fatalement égoïste car guidée
par notre sensibilité; mieux vaut rechercher la fidélité au devoir, qui nous rend digne d'être heureux.
* Bergson montre que le bonheur entendu comme joie dépasse l'opposition de l'égoïsme et de l'altruisme pour
atteindre l'universel..
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