La politique est-elle une science ?
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L'activité politique est celle qui consiste en l'administration d'une Cité, d'une société.
Exclusivement humaine, comme le souligne Aristote, elle est menée le plus
souvent par un nombre réduit d'individus chargé d'assurer la protection de tous.
S'interroger sur sa nature revient à se demander quelles qualités seraient nécessaires
pour l'exercer : si elle est une science, elle met en relation des phénomènes et des lois de façon constante, alors les individus doués de telles connaissances seraient
les mieux à même de légiférer et gouverner.
Mais c'est sans compter la spécificité de son objet : l'homme, qui à la différence d'un électron est doté de libre-arbitre.
C'est également sans compter que ces hommes, face à d'autres, ne peuvent les traiter comme des objets inanimés.
La politique se réduit-elle à l'application de lois
constantes ou à leur découverte ? Ce savoir est-il réductible à la seule activité de la raison ?
LA POLITIQUE EST UNE SCIENCE
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Administrer une Cité en tenant compte de la diversité des individus qui la composent pour parvenir à un fonctionnement parfait, tel est le propos de Platon
dans La République.
Pour se faire, les fonctions politiques reviennent aux philosophes, dont les âmes sont guidées par leur partie rationnelle.
Comme chaque
membre d'une équation, chaque individu selon ses talents doit trouver sa place et remplir sa fonction.
« Si notre Etat est bien constitué, il doit être parfait »
affirme Platon au Livre IV, à l'image des forces du cosmos qui s'équilibrent et des lois qui les régissent.
=> La politique comme science, en la définissant par opposition à l'opinion, à la connaissance vulgaire.
- De plus, la nécessité de constitution de l'Etat et de l'action politique peut être pensée comme un calcul rationnel : l'homme à l'état de nature étant en guerre
perpétuelle, il faut instituer un Etat fort auquel chaque individu sacrifie sa liberté naturelle en échange d'une protection et d'une association avec les autres
individus.
Hobbes distingue bien l'objet qu'il étudie ici : il existe un homme régi par des forces physiques, et celui régi par les lois édictées par le Léviathan.
Ce que propose le philosophe, c'est d'établir quelque chose de ferme et de constant dans la sphère politique, se
détachant par là de la conception religieuse d'une transmission du pouvoir de génération en génération.
=> La politique est le résultat de l'hypothétique état de nature hostile dans lequel se trouvent les hommes.
Ce n'est
pas à celui qui la reçoit par une autorité occulte d'agir, mais à celui qui saura au mieux faire usage de la force pour
établir la paix.
Mais ces deux premières pensées reposent sur une conception idéale de la Cité.
Renversons cette perspective pour
une réflexion qui s'appuierait sur le réel.
Marx considère que la politique est en relation directe avec l'économie, de
sorte que les décisions prises sont dépendantes de l'évolution de la lutte des classes.
Le « socialisme scientifique »
se propose de lire la politique à la lumière des lois de l'histoire, de sorte que l'organisation des pouvoirs ne soit
qu'une dérivation d'un processus plus complexe, qui doit trouver sa fin dans l'effondrement du système capitaliste.
Ainsi, l'exercice politique peut être théorisé à partir d'une observation empirique constante.
LA POLITIQUE : SCIENCE COMME THEORIE MAIS ART DANS L'APPLICATION
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L'exercice de la fonction politique ne peut se fonder sur un principe immuable dans la mesure où le Pince doit avoir
un seul objectif : dominer le peuple.
Ainsi, il ne doit pas s'embarrasser de lois, mais parvenir à les détourner afin
d'imposer sa force.
Machiavel évoque la nécessaire « ruse » qu'il faut employer en utilisant l'image du renard,
couplée à celle de la force du lion.
Le philosophe part du constat
anthropologique suivant : « les hommes sont ingrats, volubiles,
simulateurs et dissimulateurs, ennemis du danger, avides de gains ».
Il
existe donc un art, un savoir-faire mélange d'intuitions, de calculs et d'illusions pour conserver son autorité.
Par ailleurs, si Platon désire fonder sa Cité idéale sur la volonté de philosophes, ces mêmes philosophes utilisent un
conte pour justifier la partition de la société : celui des hommes de la caste d'or, les philosophe, de la caste d'argent
pour les gardiens et enfin le fer et l'airain pour les laboureurs et artisans.
Il s'agit bien pour Platon de faire accepter
aux membres de la Cité leurs fonctions en utilisant un argument fantaisiste, s'appuyant ainsi sur la crédulité des
citoyens.
Il utilise ainsi un trompe l'oeil, une illusion, qui relève d'avantage de l'art de berner que de la raison.
A considérer la mission de l'art comme étant de créer des objets beaux, on peut se demander si la politique de ne
relève pas de l'art en ce qu'elle tente de créer une société harmonieuse au moyen de la séduction.
En effet,
Cicéron souligne la place du delectare dans tout discours, c'est-à-dire le fait d'en retirer de l'agrément.
L'homme
politique n'est-il pas avant tout celui qui envoûte les foules ? L'homme de décision ne cesse de se jouer et de jouer
le peuple des symboles de sa puissance, se constitue une mythologie propre (Cf.
les représentations picturales des
rois de France par exemple).
La politique est art de représenter un pouvoir, des idées.
POLITIQUE SANS CONSCIENCE N'EST QUE RUINE DE L'AME
Au même titre qu'il existe des comités de bioéthique pour réfléchir aux conséquences diverses des progrès en matière de
science du vivant, la politique ne peut devenir une instance sans régulation.
A ce titre, ce ne peut être la pure utilité qui
gouvernerait les hommes selon un principe de résultat.
Si la politique vise la préservation d'un état de paix, elle ne peut
s'exercer dans une ignorance complète de la morale et du respect de l'homme.
Une science politique se devrait ainsi de
faire de son premier principe l'affirmation kantienne selon laquelle l'homme doit être considéré comme une fin et non
comme un moyen, sous peine de voir le peuple se transformer en souris de laboratoire à la merci des dirigeants.
On voit donc mal comment ces derniers ne pourraient pas être soumis aux institutions qui font partie de l'appareil étatique (on peut penser aux interventions de la
Justice par exemple) en ce que même si les dirigeants disposent d'un savoir particulier, ils font eux aussi partie de la Cité.
La relation sujet observant/objet observé
n'est pas la même que dans les sciences dures : l'observateur n'est pas tout à faut exclu de l'expérience.
Enfin, en pensant la politique comme tentative de conservation des libertés de chacun, le politicien chercheur ne peut se consacrer à son intérêt particulier mais bien
se dévouer à l'intérêt général.
La politique doit donc devenir transparente et non sous le contrôle d'un petit nombre d'individus afin de contrôler les abus de pouvoir
qui sont autant d'abus des membres de la société.
Au terme de cette analyse, il apparaît que la théorie politique relève de la science dans la mesure où elle se veut un exercice rationnel qui opère sans préjugés et
influence de l'opinion.
Dans la pratique, c'est à cette dernière qu'elle est confrontée : la politique se fait alors art, usant de la ruse, de l'illusion, des artifices.
Mais en
théorie comme en pratique, il ressort qu'elle ne peut être pensée indépendamment de considérations éthique, et ce afin de préserver l'intérêt général..
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