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La personnalité. Comment se forment-elle ?

Extrait du document

« Position de la question.

On se plaît souvent à opposer la personnalité et la société, le moi et autrui.

L'étude de la formation de la personnalité chez l'enfant nous montrera ce qu'il faut penser de cette opposition. I.

Le point de départ. Car la personnalité se forme : elle n'est pas une donnée.

L'égocentrisme initial de l'enfant repose sur une multitude de confusions qui s'opposent à la prise de conscience du moi par lui-même, c'est-à-dire à l'affirmation de la personnalité : confusion du moi avec les choses, confusion du moi avec autrui, confusion du moi intime, d'une part, avec le sujet connaissant en général, d'autre part, avec la personnalité consciente.

— C'est précisément le rapport avec le milieu humain qui va arracher l'enfant à ce syncrétisme.

Mais il y a lieu de distinguer ici le rapport interpersonnel et le rapport avec le milieu social proprement dit. II.

L'action d'autrui. « Le savoir relatif à soi-même, écrit Paul GUILLAUME (Introd.

à la Psychologie, p.

191), reste encore enveloppé, implicite, alors que la connaissance des autres hommes a déjà commencé à se dégager explicitement.

Ce n'est que par un détour, par une assimilation du moi et des autres hommes, que l'enfant devient pour lui-même un objet à connaître.

» Il n'y a pas à se demander, en effet, quand l'enfant découvre la personne d'autrui.

L'égocentrisme n'est pas un solipsisme, et jamais l'enfant ne confond la perception d'autrui avec celle d'un objet quelconque.

Sans, naturellement, en prendre une conscience explicite, il a tout de suite le sentiment de l'existence chez autrui d'une vie psychique analogue à la sienne.

C'est ce sentiment qui va éveiller chez lui celui de sa propre existence psychique. A.

— Ceci se produira d'abord par une simple contagion affective, encore très éloignée, à vrai dire, de la prise de conscience.

Certains psychologues, comme le Dr WALLON, ont mis en lumière ce rôle primitif de l'émotion qui est alors, non seulement instrument de communication, mais aussi souvent occasion de ces substitutions de personnalité qu'on observe chez le tout jeune enfant. B.

— Déjà plus significative est la perception d'autrui, de ses attitudes, de sa physionomie, de sa voix : « Quand un enfant suit le geste d'une personne dirigé vers un objet qui l'intéresse, le désir de cet objet est à la fois vécu personnellement, et objectivé chez l'homme qu'il observe » (GUILLAUME, ouv.

cité, p.

192).

L'enfant prête ainsi à autrui ses propres sentiments, sans d'ailleurs en prendre conscience.

— Le regard surtout joue ici un rôle capital.

Quand l'enfant se sent regardé par autrui, il devient objet pour lui-même comme pour autrui, ce qui l'éveille à la conscience de soi. C.

— Mais c'est surtout dans les rapports actifs avec autrui que cet éveil va se produire, en particulier dans les jeux, spécialement dans ceux qui consistent à se cacher ou à chercher le partenaire, à poursuivre ou à fuir, à lancer la balle à un autre ou à la rattraper.

Le psychologue américain G.-H.

MEAD a insisté sur ce rôle du jeu dans la formation de la personnalité de l'enfant : il lui apprend notamment à « prendre l'attitude de l'autre », à jouer un rôle et ainsi à unifier sa personnalité, primitivement inorganisée, non définie. C'est, dit-il, cette activité organisée, et cela dans l'expérience même de l'enfant, qui « lui donne de l'unité et fait surgir son soi propre ». En ce sens, le moi est « l'ensemble organisé des attitudes des autres que l'on s'attribue à soi-même » . D.

— C'est ensuite seulement que le moi de l'enfant s'affirme en tant qu'original, en particulier à partir de l'âge de trois ans sous la forme de la crise de négativisme.

Le moi se pose alors en s'opposant, en antithèse, à celui d'autrui.

Ce sont d'ailleurs surtout les conflits avec autrui ou les incompréhensions de la part de l'entourage qui amènent l'enfant à réfléchir sur lui-même et à affirmer sa propre personnalité. E.

— Peu après, cette affirmation de soi prendra la forme d'une sorte de complaisance envers soi-même, de fierté de soi, de désir de se faire remarquer et admirer.

En même temps, l'enfant se mettra à imiter autrui, surtout les grandes personnes, comme pour s'égaler à elles. III.

L'action du milieu social. Des relations interpersonnelles il faut distinguer l'action du milieu social organisé.

Certes, dès son premier âge, l'enfant est plongé dans un tel milieu.

Mais, dans un milieu comme la famille ou le groupe d'enfants, les relations sont encore trop purement affectives pour qu'il sente vraiment l'action du groupe comme tel.

Tout au plus, dans le groupe de jeu, commence-t-il à éprouver devant les règles admises le sentiment de ce qu'est une autorité organisée. A.

— C'est surtout lorsqu'il entre à l'école que l'action proprement sociale commence à s'exercer sur lui.

Le fait qu'il entre en relations avec des camarades encore inconnus, le fait surtout qu'il s'y sent soumis à des règles impersonnelles et intégré à un groupe où il a un rôle déterminé, développe en lui la notion du personnage qui, on le sait, précède celle de la personne proprement dite.

En même temps, l'obéissance à une discipline développe sa volonté qui sera un élément essentiel de sa personnalité. B.

— Ce qui prouve bien que la socialisation du moi va de pair avec la formation de la personnalité, c'est que c'est aussi à cet âge que l'on peut fixer l'émergence du je, c'est-à-dire du moi devenu conscient de lui-même.

C'est alors que l'enfant s'affirme comme cause agissante, soit dans ses rapports avec ses camarades, soit par la fabrication et la construction d'objets, de jouets, etc. C.

— La puberté déterminera une nouvelle crise, la crise d'originalité, où l'enfant s'opposera non plus seulement à la personne d'autrui, mais aux institutions, aux règles, aux traditions et aux habitudes familiales ou scolaires.

C'est donc ici encore par antithèse à « l'environnement » social que la personnalité se développe.

En même temps, prend naissance dans l'âme de l'adolescent une « volonté de puissance » qui se manifeste par l'édification d'ambitieux projets d'avenir, par le besoin de dominer ou de protéger autrui, etc. Conclusion.

A toutes les étapes du développement de la personnalité de l'enfant, l'action des autres ou celle du milieu social organisé jouent, soit négativement, soit positivement, un rôle essentiel.. »

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