La pensée de la mort a-t-elle un objet?
Extrait du document
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Introduction :
La mort nous met face à l'inconnu.
Elle marque une limite derrière laquelle tout est possible.
La pensée y trouve un
terrain sans repères, elle y est à la fois libre et perdue.
L'imagination peut s'y étendre sans fin, mais l'absence de
donnée empirique empêche la pensée d'être plus positive qu'un fantasme.
Cependant, la biologie étudie la mort et en fait un véritable concept scientifique : on remarque que les gênes
survivent au corps qui les porte, la mort du corps, sert à la prolifération des gênes.
On peut donc penser la mort
comme partie intégrante d'un processus biologique.
Mais ces explications dissipent-elles le mystère ? La pensée de la mort ne se contente pas d'une explication
biologique.
La mort n'est pas un concept ou une hypothèse, elle est un destin, ce qui se joue en elle n'est pas un
problème de connaissance mais avant tout un problème d'existence.
La pensée de la mort semble par là se situer
au-delà de tout objet.
Elle semble à la fois obséder la pensée et lui échapper.
C'est que la pensée de la mort est
avant tout la pensée de notre mort.
Cette pensée nous envahit comme la seule certitude sur l'existence et cette
certitude est celle d'un évènement inconnu, d'une absence d'« objet », d'une béance où tout est possible.
Mais cette certitude est en même temps celle d'un terme de l'existence et d'une urgence par rapport à la vie.
La
pensée de la mort conduit à une réflexion et une prise en main de la vie.
Problématique :
La mort est l'inconnu, la pensée s'y porte au-delà de tout objet, cependant, la pensée de la mort rebondit sur notre
propre existence comme son destin et peut être qu'à travers la mort c'est notre vie que nous prenons comme objet.
I : Une pensée positive de la mort est possible.
1)
La mort s'observe objectivement comme la décomposition d'un corps organique.
La pensée de la mort a
donc un objet empirique : ce passage de la cohésion de l'organisme vivant à sa dissolution.
2)
Une réflexion biologique sur la mort s'est développée.
Il y a les théoriciens de la mort utile : mourir selon
eux, c'est favoriser la transmission de ses gênes.
La mort est utile à la vie de l'espèce, la pensée nous
permet de nous porter au-delà de nos angoisses et d'appréhender froidement la mort comme faisant partie
d'un ordre naturel.
3)
L' « apoptose », c'est-à-dire la mort programmée des cellules, donne aujourd'hui énormément à penser.
Elle façonne le corps vivant dès le stade embryonnaire, elle sculpte la matière vivante pour lui donner forme.
Voilà qui donne à la pensée de la mort un objet intéressant.
II : La mort n'est rien pour nous.
1)
« La mort n'est rien pour nous.
» dit Epicure.
Il veut dire par là qu'elle ne peut être l'objet d'une
expérience, en effet, tant que nous vivons nous ne l'expérimentons pas et lorsque nous sommes mort, nous
ne sommes plus là pour en faire l'expérience.
Remarquons qu'Epicure ne parle pas la mort qu'observe le
biologiste de l'extérieur sur les organismes vivants, il parle plutôt de notre mort comme destin, terme de
notre existence.
2)
La mort n'est pas « objet » d'une expérience possible, peut elle être « objet » de pensée ? Le défi de la
pensée de la mort c'est de penser sans objet, on peut donc interpréter la phrase d'Epicure : la mort est
« le » rien pour nous, la pensée de rien, la pensée vide.
3)
On peut dire que ce rien a paradoxalement une certaine consistance pour nous.
En effet, il contamine la
pensée de ce qui est pleinement présent, la pensée de la mort ouvre une brèche que les existentialistes
appellent le néant.
Le néant compose notre expérience, il nous sépare des choses, il nous donne un certain
recul par rapport au monde qui nous empêche de vivre aveuglément parmi les choses et nous oblige à donner
un sens à nos actes.
Dans ce sens, la pensée de la mort nous porte au-delà de tout objet..
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