La morale conduit-elle au bonheur ?
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Agir moralement, c'est agir par devoir.
Or, ce qu'on doit faire ne correspond pas toujours à ce qu'on a envie de faire.
en effet, souvent, respecter la loi morale c'est aller contre son bonheur, contre ses désirs.
I) Suivre la morale c'est atteindre le bonheur
a) Épicure: Limiter ses désirs c'est être heureux
Épicure constate que le plaisir, recherché par tous, est l'élément essentiel de
la vie heureuse.
Conforme à la nature humaine, il procure un critère parfait de
tous les choix que nous avons à faire.
Il réside dans la sensation qui, nous
mettant en rapport avec le monde, est la règle qui nous fait choisir ou
exclure.
Ce bien est inné et personnel, puisque chacun est juge de ce qui lui
convient : c'est de notre propre point de vue sensible que nous jugeons de
ce qui est pour nous un plaisir ou une douleur.
Ainsi, nous ne recherchons pas
les plaisirs qui engendrent de l'ennui, et l'on peut préférer endurer certaines
douleurs si elles sont le moyen d'accéder à un plus grand plaisir.
L'épicurisme
n'est pas une philosophie simpliste qui recherche le plaisir à tout prix et fuit la
douleur ; elle repose sur un principe de détermination, qui est la sensation,
critère complexe d'estimation des valeurs, puisqu'il aboutit à un paradoxe :
"Nous en usons parfois avec le bien comme s'il était le mal, et avec le mal
comme s'il était le bien", (Epicure).
b) Épictète: Vouloir ce qui dépend de nous, c'est être heureux
La source de tout bien et de tout mal que nous pouvons éprouver réside
strictement dans notre propre volonté.
Nul autre que soi n'est maître de ce
qui nous importe réellement, et nous n'avons pas à nous soucier des choses
sur lesquelles nous n'avons aucune prise et où d'autres sont les maîtres.
Les
obstacles ou les contraintes que nous rencontrons sont hors de nous, tandis qu'en nous résident certaines choses,
qui nous sont absolument propres, libres de toute contrainte et de tout obstacle, et sur lesquelles nul ne peut agir.
Il s'agit dès lors de veiller sur ce bien propre, et de ne pas désirer celui des autres ; d'être fidèle et constant à soimême, ce que nul ne peut nous empêcher de faire.
Si chacun est ainsi l'artisan de son propre bonheur, chacun est
aussi l'artisan de son propre malheur en s'échappant de soi-même et en abandonnant son bien propre, pour tenter
de posséder le bien d'autrui.
Le malheur réside donc dans l'hétéronomie : lorsque nous recevons de l'extérieur une loi
à laquelle nous obéissons et nous soumettons.
Nul ne nous oblige à croire ce que
l'on peut dire de nous, en bien ou en mal : car dans un cas nous devenons dépendants de la versatilité du jugement
d'autrui, dans l'autre nous finissons par donner plus de raison à autrui qu'à nous-mêmes.
Enfin, à l'égard des opinions
communes comme des théories des philosophes, ou même de nos propres opinions, il faut savoir garder une distance
identique à celle qui est requise dans l'habileté du jeu, c'est-à-dire qu'il faut savoir cesser de jouer en temps voulu.
Dans toutes les affaires importantes de la vie, nul ne nous oblige en effet que notre propre volonté.
II) Critique kantienne
Dans la Critique de la raison pratique, Kant montre que le bonheur individuel,
recherché par tout un chacun suivant ses propres penchants, ne peut être
une finalité morale.
La recherche du bonheur peut fournir des maximes
personnelles d'action, mais non des lois à la volonté, même si l'on prend pour
finalité le bonheur de tous.
La définition générale du bonheur est subjective,
donc variable et changeante.
On pourrait au mieux en tirer des règles
générales, mais jamais des règles universelles (valables toujours et
nécessairement), car la base en est l'expérience et ce que l'on en ressent.
La
recherche du bonheur ne peut donc aboutir à une éthique comportant des
règles pratiques communes à tout être raisonnable.
A la différence de ces éthiques eudémonistes (eudaimonia : bonheur) qui s'en
remettent à la subjectivité de chacun pour apprécier le bonheur, la loi morale
doit être valable pour toute volonté raisonnable.
La morale repose sur des lois
universelles et nécessaires (valables pour tous et que l'on ale devoir de
respecter).
A la question que dois-je faire ?, la morale répond : le devoir, et
uniquement le devoir.
Le souverain bien n'est pas le bonheur, mais la bonne
volonté, c'est-à-dire la bonne intention, désintéressée, l'intention de faire le
bien pour le bien, ou encore de faire le bien par devoir.
Elle repose sur un
impératif catégorique ("tu dois parce que tu dois") et non hypothétique ("si tu
veux obtenir tel résultat, fais ainsi").
Sans condition, il ne repose sur rien de
sensible.
L'action n'est pas bonne suivant ses résultats, mais bonne en soi quand elle est faite par devoir.
"Agis
uniquement d'après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle." Par
ailleurs, le devoir commande le respect de la personne, de l'être raisonnable en tant que valeur absolue : l'humanité,
que ce soit la sienne ou celle d'autrui, doit toujours être respectée comme une fin absolue, et jamais traitée
simplement comme moyen.
Seule cette volonté morale est autonome dans le sens où elle répond à la loi de raison.
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