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La loi dégage-t-elle de toutes responsabilités ?

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« Définition des termes du sujet Le mot « loi » peut avoir deux sens : un sens politique d'une part, et il désigne alors une règle obligatoire mise en place par l'autorité au pouvoir et prescrivant certains comportements, certains principes communs, ou posant certaines interdictions – ce sens politique peut d'ailleurs se généraliser à un sens moral, et faire référence à une règle que l'on se prescrit ou que l'on suit parce qu'elle nous semble pertinente pour nous faire réaliser un idéal moral ; un sens scientifique d'autre part, et une loi est alors un rapport constant observé entre des phénomènes. Cependant, lorsque l'on emploie l'expression « la loi », on fait référence à son sens strictement politique : c'est donc sur celui-ci qu'il faudra se concentrer. Dégager quelqu'un de quelque chose, c'est faire en sorte qu'il ne soit plus concerné par cette chose ; le sens de ce verbe est donc fort, il contient l'idée d'une rupture définitive entre deux éléments. Avoir la responsabilité d'un acte, c'est l'assumer, pouvoir s'en déclarer l'auteur.

C'est aussi consentir à prendre en charge cet acte : une responsabilité est donc à la fois une tâche et une attitude que l'on entretient avec cette tâche et par laquelle on se pose comme en étant l'agent.

Le mot est ici employé au pluriel et avec le déterminant « toutes » : il faudra donc envisager la responsabilité sous les avatars multiples qu'elle peut prendre.

On peut en effet être responsable d'une chose parce que nous l'avons initiée, parce que nous l'assumons, ou parce que l'on nous a confié cette attitude de responsabilité. C'est le lien entre la loi et la responsabilité qui est ici interrogé : la loi est-elle une prescription qu'il s'agit de suivre aveuglément, sans l'interroger et sans chercher à l'assumer personnellement pour elle-même ? Si l'on accepte cette définition, alors il peut sembler pertinent de soutenir que la loi dégage de toutes responsabilités, parce qu'elle fonderait nos actions à notre place, dicterait notre comportement, si bien que nous n'aurions plus à assumer ce dernier.

Il semble néanmoins abusif de considérer la loi comme une prescription agissant sur nous comme un programme que nous exécuterions en aveugles.

Il faut alors se demander quelle part de responsabilité personnelle reste ménagée par la loi – la loi limite-t-elle la responsabilité, ou laisse-t-elle celle-ci intacte ? Eléments pour le développement * Le rôle de la loi et la responsabilité politique Kant, Idée d'une histoire universelle du point de vue cosmopolitique « L'homme est un animal qui, lorsqu'il vit parmi d'autres membres de son espèce, a besoin d'un maître.

Car il abuse à coup sûr de sa liberté à l'égard de ses semblables ; et quoique en tant que créature raisonnable il souhaite une loi qui pose les limites de la liberté de tous, son inclination animale égoïste l'entraîne cependant à faire exception pour lui-même quand il le peut. Il lui faut donc un maître pour briser sa volonté particulière, et le forcer à obéir à une volonté universellement valable ; par là chacun peut être libre. Mais où prendra-t-il ce maître ? Nulle part ailleurs que dans l'espèce humaine. Or ce sera aussi un animal qui a besoin d'un maître.

De quelque façon qu'il s'y prenne, on ne voit pas comment, pour établir la justice publique, il pourrait se trouver un chef qui soit lui-même juste, et cela qu'il le cherche dans une personne unique ou dans un groupe composé d'un certain nombre de personnes choisies à cet effet.

Car chacune d'entre elles abusera toujours de sa liberté si elle n'a personne, au-dessus d'elle, qui exerce un pouvoir d'après les lois.

» Pour décider si la loi dégage de toutes responsabilités, il importe d'examiner d'abord le fondement et le fonctionnement de la loi.

L'origine de la loi semble résider dans le besoin pour l'homme d'être dirigé par un maître pour pouvoir rendre viable la vie en communauté.

Autrement dit, la loi semble instaurer une sorte de responsabilité forcée des uns à l'égard des autres, responsabilité qui n'existerait pas à l'état apolitique. * Le rapport à la loi doit être actif Aristote « Les actions dont les principes sont en nous dépendent elles-mêmes de nous et sont volontaires.

En faveur de ces considérations, on peut, semble-t-il, appeler en témoignage à la fois le comportement des individus dans leur vie privée et la pratique des législateurs eux-mêmes : on châtie, en effet, et on oblige à réparation ceux qui commettent des actions mauvaises, à moins qu'ils n'aient agi sous la contrainte ou par une ignorance dont ils ne sont pas eux-mêmes causes.

En effet, nous punissons quelqu'un pour son ignorance même, si nous le tenons pour responsable de son ignorance, comme par exemple dans le cas d'ébriété où les pénalités des délinquants sont doublées, parce que le principe de l'acte réside dans l'auteur de l'action lui-même, qui était maître de ne pas s'enivrer et qui est ainsi responsable de son ignorance.

». »

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