La liberté et le bonheur sont-ils compatibles avec la vie en société ?
Extrait du document
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Analyse du sujet :
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Il y a un présupposé curieux à ce sujet, et qui doit être interrogé : liberté et bonheur
sont-ils eux-mêmes déjà compatibles entre eux ?
Peut-être la réponse à cette question est-elle contenue implicitement dans le sujet :
liberté et bonheur seraient par exemple compatibles à la condition sine qua non qu'il y ait la vie en
société (ou justement au contraire, à condition de vivre sans la société).
Il est bon de tenter de définir succinctement les notions en présence.
On ne peut se contenter de comprendre la liberté comme « absence de contrainte ».
Pour
s'élever à une intelligence plus forte de la notion, on peut la compléter à l'aide de la notion de
« raison », en considérant que la vraie liberté est celle de l'être rationnel délibérant sur ses actions et
choisissant ses actes en toute responsabilité.
De même le bonheur ne peut-il simplement en rester à la jouissance passive de l'animal
soumis à son plaisir instinctif ou organique.
Il y a des formes de bonheur qu'on a tendance à
considérer comme plus élevées, qui vont de la satisfaction à exercer sa raison jusqu'à celle de
regarder sa vie comme un tout cohérent, et qui peuvent même passer par le sacrifice pour le bien de
la société.
Problématisation :
Le sujet semble d'emblée s'appuyer sur des prémisses hâtives : nous ne sommes pas en mesure d'affirmer sans
émettre des réserves que la liberté et le bonheur soient eux-mêmes compatibles entre eux.
Dès lors, est-il permis de
pousser l'assertion jusqu'à affirmer qu'ils puissent être compatibles avec un troisième terme, à savoir cette
mystérieuse « vie en société » ? La liberté et le bonheur pourraient très bien être incompatibles, car être libre, c'est
faire des choix, c'est-à-dire prendre le risque du remords, courir le danger de l'acte qui va nous conduire au malheur,
en endosser la responsabilité et ainsi redoubler le malheur par la culpabilité.
Toutefois, peut-on dire qu'un homme qui
serait heureux sans être libre connaîtrait un bonheur véritable ? Si donc la vie en société est compatible avec la
liberté et le bonheur, c'est qu'elle permet aussi que soient réconciliés ces deux derniers termes.
Le problème qu'il
nous faut résoudre est donc de savoir si la vie en société peut réunifier suffisamment ces deux termes opposés pour
qu'ils trouvent en elle une existence réelle.
Proposition de plan :
1.
Le bon sauvage est un homme solitaire :
Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les
hommes.
« Tant que les hommes se contentèrent de leurs cabanes rustiques, tant
qu'ils se bornèrent à coudre leurs habits de peaux avec des épines ou des
arêtes, à se parer de plumes et de coquillages, à se peindre le corps de
diverses couleurs, à perfectionner ou à embellir leurs arcs et leurs flèches, à
tailler avec des pierres tranchantes quelques canots de pêcheurs ou quelques
grossiers instruments de musique, en un mot tant qu'ils ne s'appliquèrent qu'à
des ouvrages qu'un seul pouvait faire, et qu'à des arts qui n'avaient pas
besoin du concours de plusieurs mains, ils vécurent libres, sains, bons et
heureux autant qu'ils pouvaient l'être par leur nature, et continuèrent à jouir
entre eux des douceurs d'un commerce indépendant: mais dès l'instant qu'un
homme eut besoin du secours d'un autre; dès qu'on s'aperçut qu'il était utile
à un seul d'avoir des provisions pour deux, l'égalité disparut, la propriété
s'introduisit, le travail devint nécessaire et les vastes forêts se changèrent en
des campagnes riantes qu'il fallut arroser de la sueur des hommes, et dans
lesquelles on vit bientôt l'esclavage et la misère germer et croître avec les
moissons.
»
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Rousseau s'inspire ici d'une opinion aujourd'hui
courante : la nature avait tout mis en place pour le bonheur
des hommes et ce n'est que parce que celui-ci
- suite à un accident - bascula dans l'état social, qu'il connut le malheur et l'aliénation.
On sait que pour Rousseau, la liberté et le bonheur à l'état de nature ne font qu'un, car
l'homme écoute alors les impulsions de son coeur et c'est en toute bonne volonté qu'il suit ses
conseils.
L'homme d'alors est certes proche de la bête, mais il connaît un bonheur que ne restreint ni
la société civile, ni l'exercice de son libre arbitre.
Toutefois, cette interprétation apparaît un peu légère, car peut-on vraiment considérer
qu'il y a bonheur et liberté si cet homme est plus proche de la bête que de l'animal rationnel ?
Si l'on considère que non, l'on est contraint de chercher quelles seraient alors les.
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