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La justice ne relève-t-elle que de l'Etat ?

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« PROBLEMATIQUE ENVOYEE PAR L'ELEVE: La justice a en français deux sens distincts qui sans être très éloignés ne se recoupent pas tout à fait : d'une part elle désigne une institution (on parle ainsi du fonctionnement de la Justice) , d'autre part, elle désigne une valeur (on exige ainsi par exemple qu'un partage soit juste, conforme à la justice).

Montrez ainsi que dans le premier sens, la justice désigne non pas l'ensemble des lois (cet ensemble c'est ce qu'on appelle le droit positif), mais plutôt l'ensemble des mécanismes qui sanctionnent et punissent le nonrespect des lois , la justice est en ce sens en effet sans ce qui donne aux lois leur force (sans la force, sans une institution pour le faire respecter, le droit n'est rien).

Cependant en tant que valeur la justice est une fin, elle est ce que visent les lois : les hommes sont naturellement inégaux , les sociétés humaines produisent incessamment des inégalités, des injustices que le droit (c'est-à-dire les lois) tente de corriger ou de redresser.

La justice serait alors en ce sens ce qui donne aux lois leur fin et donc leur sens.

Pourtant une loi positive n'est pas nécessairement juste et vous devrez distinguer ce qui est légal et ce qui est légitime, en consultant notre rubrique Lexique.

Dès lors si la justice relève d'une loi, c'est davantage d'une loi de la raison que la loi positive se doit de respecter, sans quoi il devient légitime de désobéir aux lois de l'Etat, l'Etat renvoyant à un ensemble politique d'institutions. [La justice ne peut reposer que sur la force de la loi. Les hommes, par eux-mêmes, ne sont pas capables d'agir justement envers leurs prochains.

Ils sont par nature bien trop égoïstes et bien trop peu sages.] La justice ne peut pas être une affaire privée Pour Benjamin Constant, «l'esprit humain a trop de lumières pour se laisser gouverner plus longtemps par la force ou par la ruse, mais il n'en a pas assez pour se gouverner par la raison (...) De là les besoins des conventions légales» (Écrits politiques).

La justice repose sur ces conventions, et non sur la manière dont chacun peut la concevoir. Dans ce passage de La République, Glaucon, ami de Socrate prend la parole pour tenter de définir la justice. Contre Thrasymaque qui vient de soutenir que la justice est naturelle et se confond avec la loi du plus fort, Glaucon pense, au contraire, que la justice résulte d'une convention. « Glaucon : - Ecoute ce que je me suis chargé d'exposer d'abord, c'est-à-dire quelle est la nature et l'origine de la justice. On dit que, suivant la nature, commettre l'injustice est un bien, la subir un mal, mais qu'il y a plus de mal à la subir que de bien à la commettre.

Aussi quand les hommes se font et subissent mutuellement des injustices et qu'ils en ressentent le plaisir ou le dommage, ceux qui ne peuvent éviter l'un et obtenir l'autre, jugent qu'il est utile de s'entendre les uns les autres pour ne plus commettre ni subir l'injustice.

De là prirent naissance les lois et les conventions des hommes entre eux, et les prescriptions de la loi furent appelées légalité et justice. Telle est l'origine et l'essence de la justice.

Elle tient le milieu entre le plus grand bien, c'est-à-dire l'impunité dans l'injustice, et le plus grand mal, c'est-à-dire l'impuissance à se venger de l'injustice.

Placée entre ces deux extrêmes, la justice n'est pas aimée comme un bien, mais honorée à cause de l'impuissance où l'on est de commettre l'injustice.

Car celui qui peut la commettre et qui est véritablement homme se garderait bien de faire une convention aux fins de supprimer l'injustice ou commise ou subie : ce serait folie de sa part.

Voilà donc, Socrate, quelle est la nature de la justice, et l'origine qu'on lui donne.

» Platon, La République, livre 2, 358d/359b.

Traduction Chambry. Vaut-il mieux subir l'injustice que la commettre ? Pour Socrate, la justice est une valeur absolue.

Elle est pour lui le bien et la vertu par excellence.

Glaucon propose ici de définir la justice non comme une fin, mais comme un moyen.

Elle n'a donc qu'une valeur relative.

Il oppose la nature et la loi.

Par nature, l'injustice est préférable.

Par la loi, la justice est préférable.

Ce changement s'explique par le fait que les hommes ont fait un calcul.

Avant l'établissement de toute loi, le risque de subir l'injustice étant supérieur à l'occasion de pouvoir la commettre dans la majorité des cas, les hommes s'entendent entre eux et établissent une convention par laquelle ils se protègent de l'injustice subie et renoncent à l'injustice commise. La justice n'est donc pas naturelle.

Elle résulte d'une institution, d'un contrat.

C'est sur la loi qu'il faut s'appuyer pour la faire exister, et non sur la nature. La justice imposée par l'État est un frein à l'égoïsme Les hommes, livrés à eux-mêmes, n'obéissent qu'à leurs penchants égoïstes et laissent libre cours à leurs passions.

Seule l'autorité de l'État peut les contraindre à respecter la justice, c'est-à-dire à ne pas léser autrui.

Comme le montre l'exemple de l'anneau de Gygès, dès que l'homme ne se sent plus contraint par la loi, il cesse d'agir justement. « ...

Gygès le Lydien était un berger au service du prince qui régnait jadis en Lydie.

Un jour, à la suite d'un violent orage, la terre se fendit et un gouffre se creusa sur les lieux de son pacage.

Stupéfait, Gygès y. »

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