La justice et la loi chez Blaise PASCAL
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"Il est juste que ce qui est juste soit suivi, il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi. La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu'il y a toujours des méchants ; la force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste.La justice est sujette à dispute, la force est très reconnaissable et sans dispute. Ainsi on n'a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit que c'était elle qui était juste. Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste." Pascal, Pensées
"Il est juste que ce qui est juste soit suivi, il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi. La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu’il y a toujours des méchants ; la force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste. La justice est sujette à dispute, la force est très reconnaissable et sans dispute. Ainsi on n’a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit que c’était elle qui était juste. Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste." Pascal, Pensées
1/ Dégagez l'idée essentielle du texte et faites apparaître les différentes étapes de son argumentation.
2/ Le texte développe l'opposition entre « la justice » et « la force ». Que désignent exactement ces deux expressions ?
3/ Expliquez le sens de l'alternative : « faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste ».
4/ Essai : Qui a le droit de faire la loi ?
«
La justice et la loi chez Blaise P A SC A L
"Il est juste que ce qui est juste soit suivi, il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi.
La justice sans la force est impuissante ; la force sans la
justice est tyrannique.
La justice sans force est contredite, parce qu'il y a toujours des méchants ; la force sans la justice est accusée.
Il faut donc mettre
ensemble la justice et la force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste.
La justice est sujette à dispute, la force est
très reconnaissable et sans dispute.
A insi on n'a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit que c'était elle qui était
juste.
Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste." Pascal, Pensées
1/ Dégagez l'idée essentielle du texte et faites apparaître les différentes étapes de son argumentation.
2/ Le texte développe l'opposition entre « la justice » et « la force ».
Que désignent exactement ces deux expressions ?
3/ Expliquez le sens de l'alternative : « faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste ».
4/ Essai : Q ui a le droit de faire la loi ?
T hème : La justice et la loi
C ommentaire du texte de Pascal – STI-STG-ST SS 1/ Dégagez l'idée essentielle du texte et faites apparaître les différentes étapes de son argumentation.
P ascal, dans le texte que nous étudions, avance l'idée principale suivante : « ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût
juste » (et cela dans la dernière phrase).
L'auteur veut dire ici, que, historiquement, un choix a été fait.
O n n'a pas pu parvenir à donner à la justice la force
dont elle avait besoin, alors on a rendu juste ce qui était fort.
Bien sûr, la question qui se pose au lecteur au travers de ce texte est celle-ci : ceux qui sont forts autour de nous (la noblesse, les riches, les propriétaires,
les monarques, les occupants, etc.), sont-ils vraiment justement en place; ou, plutôt, ne se sont-ils pas habillés, après-coup, du vêtement de la justice ?
Disons cela autrement.
Est-ce que la légitimité des puissants, qui nous semble habituellement acquise, ne serait pas, en fait, une simple application du
« droit du plus fort » ? Les forts ne se font-ils pas passer pour justes, pour assoir leur domination ?
L'auteur pose les étapes suivantes : la justice et la force doivent être associées car elles ne peuvent fonctionner seules, et ne pouvant rendre forte la
justice, sur laquelle on ne s'entend pas, on a affirmé que la force était juste, elle qui n'est pas l'objet de tergiversations.
2/ Le texte développe l'opposition entre « la justice » et « la force ».
Que désignent exactement ces deux expressions ?
La justice, dans notre texte, est la justice en tant qu'idée, en tant qu'idéal.
Elle porte en elle sa propre légitimité : « il est juste que ce qui est juste soit
suivi », mais elle est faible, puisqu'elle n'est qu'une idée (et pas encore une institution), sur laquelle tous ne sont pas d'accord.
La force est effective, c'est-à-dire qu'elle a une efficacité pratique.
Elle est illégitime (« tyrannique »), si elle n'est pas juste, et en cela elle est faible (le
tyran consolidera son pouvoir s'il parvient à le faire passer pour juste); mais elle s'inscrit dans la nécessité (ligne 1), c'est-à-dire qu'elle a un pouvoir
contraignant auquel on n'échappe pas (contrainte physique).
3/ Expliquez le sens de l'alternative : « faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste ».
La difficulté tient ici à montrer en quoi la justice forte (première alternative), diffère de la force juste (seconde alternative).
La justice forte serait une justice efficace, une justice ayant le pouvoir de s'appliquer (justice comme institution).
La force juste, est une force, nous dit Pascal, qui a dit que la justice « était injuste, et a dit que c'était elle qui était juste », puis qui a été faite juste
(dernières lignes).
Expliquons cela, afin de saisir l'alternative.
La force que l'on a rendu juste, a, en fait, initialement écarté injustement la justice et s'est fait
passer pour juste.
La force juste, dans le texte, n'est qu'une force qui se fait passer pour telle, ou que l'on a fait passer pour telle.
A insi, seule la justice forte est réellement légitime.
V oici, donc, pourquoi Pascal pose ici une alternative, il estime que « faire que ce qui est juste soit fort », n'est pas la même chose que de « faire que ce qui
est fort soit juste ».
4/ Essai : Q ui a le droit de faire la loi ?
Nous pouvons demander, à la suite de Pascal, qui est en position de faire les lois.
On pourra convenir qu'il serait juste que ce soit « la justice », ou, disons
ici, les justes (s'il en est), qui fassent la loi.
Mais est-ce bien le cas ? Est-ce que ce ne sont pas nécessairement les forts (« la force »), qui de fait (opposé à
en droit), qui ont le pouvoir de la faire ? Q uelles raisons pourraient nous pousser à le penser ?
Indiquons d'abord que l'expression « faire la loi » a deux sens.
Le premier, dans le langage courant, évoque l'idée suivante : faire la loi c'est commander,
diriger.
O n retrouve ce sens dans l'expression « ce ne sont pas les enfants qui vont faire la loi ici ! ».
Le second sens est celui que nous donnons à
l'expression lorsque nous la lisions ici : faire la loi c ' e s t préparer des lois (ce que font l e s parlementaires ou le gouvernement), puis l e s voter
éventuellement, et enfin les mettre en œuvre.
Q uant au « droit », ici, de faire la loi, nous prenons le mot au sens strict, c'est-à-dire que nous demandons qui est en position de préparer, voter et appliquer
les lois.
Est-ce que ce sont les justes ou les forts qui font la loi ? Historiquement, nous devons remarquer que ce sont, dans nos sociétés, surtout les forts qui ont
été en position de légiférer.
Dans les cités grecques antiques, lorsque les citoyens étaient au pouvoir, leurs esclaves n'avaient, comme on l'imagine, pas le
droit de vote.
Dans les monarchies, le pouvoir héréditaire, bien sûr, ne pouvait garantir un partage du pouvoir entre tous, et un accès à celui-ci assuré aux
plus justes.
On trouvera la même structure dans les oligarchies (une classe dominante se maintient au pouvoir) et dans les tyrannies.
M ais qu'en est-il de nos démocraties ? On pourra demander si elles permettent à coup sûr à tous d'accéder au pouvoir de faire la loi.
Pierre Bourdieu,
sociologue, avance qu'il y a une reproduction des hiérarchies sociales.
M arx, pour sa part, indique que "Les pensées de la classe dominante sont aussi, à
toutes les époques, les pensées dominantes" (L'Idéologie allemande).
Est-ce à dire que malgré la possibilité offerte à tous de voter et de s'exprimer
publiquement, il est possible que certaines personnes (les forts, les riches, les personnes cultivées, les techniciens, l e s économistes, la « classe
bourgeoise », les « énarques », etc.) soient de fait, toujours en position de faire la loi ? Est-on bien certains que le pouvoir est accessible à tous ? Est-on
bien certains que si un « juste » se présentait, il pourrait accéder au pouvoir ?
Nous avons vu que, en idée, le juste doit primer, mais que dans les faits, la force ou du moins une « classe dominante », pourrait être au pouvoir et s'y
maintenir.
La justice est idéale et la force concrète..
»
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