La Justice (cours complet)
Publié le 19/04/2022
Extrait du document
«
La justice
La justice est traditionnellement définie comme la conformité à la loi, et en particulier comme le fait de
rendre à chacun ce qui lui revient.
La justice est également une vertu (une qualité morale), qui consiste donc à
respecter la loi et à rendre à chacun ce qui lui revient de droit.
Par extension, la justice est le pouvoir d’appliquer
les lois et de punir les contrevenants – dans un tribunal et selon des règles, par opposition à la vengeance, qui
repose sur un sentiment subjectif (à distinguer de la loi du talion).
Un concept proche de celui de justice est le
droit.
En latin, directus signifie « direct, sans courbure, juste ».
Aujourd’hui, le droit est d’abord un ensemble
de règles et de lois régissant une société donnée : c’est le droit positif (ou objectif), c’est-à-dire les règles et
lois établies, écrites ou non, que les membres de la société doivent respecter sous peine de sanctions, et qui
sont appliquées par le pouvoir politique.
Du point de vue individuel, le droit dit subjectif est la possibilité
garantie par la loi, la liberté, pour un individu, de faire tout ce qui n’est pas contraire à la loi, ou d’exiger ce
qui lui revient (par exemple, le droit de faire appel d’un jugement).
À première vue, le droit semble être établi en fonction de ce qui est juste.
Mais qu’est-ce qui est juste ?
Comment déterminer ce qui « revient » à chacun ? Cela n’a rien d’évident, et il n’est pas rare que des citoyens
s’opposent au droit en vigueur au nom de la justice, comme les suffragettes réclamant le droit de vote.
Dans
ce cas, les citoyens remettent en question l’ordre légal car, selon eux, il n’est pas légitime.
Tandis que le légal
désigne ce qui est conforme à la loi positive, le légitime désigne ce qui est conforme à la loi telle qu’elle devrait
être, à une loi idéale.
Il peut donc exister un conflit entre le droit positif (les lois telles qu’elles existent) et
l’aspiration à un droit et une justice autres, conçues comme légitimes.
Que révèle ce conflit ? Qu’il n’y a pas toujours de consensus sur ce qu’est la justice, et, conséquemment,
sur ce qu’est le droit.
Cela signifie-t-il que la justice est simplement relative aux peuples et aux États, qu’elle
est conventionnelle ? Ou bien doit-on penser qu’il existe une essence de la justice (une justice par nature) mais
que celle-ci n’est pas toujours reconnue ? Le problème qui se pose à nous est donc le suivant : existe-t-il une
essence de la justice (et donc du droit), ou bien la justice est-elle conventionnelle ?
1.
Il existe une justice par nature
1.1 Le « droit du plus fort »
Le conflit entre le légal et le légitime s’explique du fait que nos lois établies sont parfois contraires à la
justice et au droit naturels.
Le terme « droit naturel » désigne un ensemble de droits et de lois censés dériver
de la nature humaine, indépendamment de et antérieurement à toute convention particulière (droit naturel
s’oppose à droit positif).
Le jusnaturalisme est un ensemble de théories selon lesquelles il existe un droit
naturel, dont doit découler le droit positif.
Or, qu’est-ce qui est juste par nature ? D’après Calliclès (dans Gorgias, écrit par Platon), il est juste par
nature que le plus fort ait le dessus sur le plus faible.
TEXTE 1.
Cette thèse, selon laquelle le supérieur doit
commander l’inférieur et avoir plus que lui, s’appuie sur une réalité naturelle : dans le règne animal et humain,
nous constatons que c’est le plus fort qui a le dessus.
La justice des hommes doit suivre cette justice naturelle,
foncièrement inégalitaire : il est juste qu’à des êtres inégaux par nature reviennent des places inégales.
Or,
d’après Calliclès, la justice et le droit humains sont contre-nature, puisqu’ils cherchent à substituer à l’inégalité
naturelle une égalité artificielle.
La justice humaine devrait au contraire favoriser, privilégier, ceux qui sont
favorisés par la nature : les plus forts (la suite de l’entretien avec Socrate consistant d’ailleurs à savoir qui sont
les plus forts : les plus robustes, ou les plus intelligents, ou les plus énergiques ?).
Mais est-il bien vrai que la justice par nature soit l’avantage du plus fort ? La justice ne serait alors qu’un
prolongement de l’ordre naturel, et la notion de droit deviendrait superflue.
1.2 La mise en ordre de la cité et de l’individu.
Bien que Platon donne dans Gorgias une place à la théorie de Calliclès, il présente dans La République
une tout autre conception de la justice.
Le dialogue La République comporte dix livres et est centré sur la
notion de justice.
Pour découvrir ce qu’est la justice en elle-même (dans son essence), Socrate propose de
s’intéresser d’abord à la cité (c’est-à-dire à l’État) avant de parler de la justice dans un individu, dans l’idée
qu’il sera plus facile de discerner ce qu’est la justice dans la cité que dans l’âme (de même qu’on lit plus
facilement des grandes lettres que des petites).
Mais il s’agit dans les deux cas de la même justice : l’harmonie
1.
»
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